Utroi, Wendall «Les yeux d’Ava» (RL2020)

Utroi, Wendall «Les yeux d’Ava» (RL2020)

Auteur : Wendall Utroi, auteur français de romans à suspense. Policier aux différentes facettes, officier de police judiciaire (OPJ), instructeur, Wendall Utroi est curieux de tout et attiré par les missions à l’étranger. Il a commencé à écrire son premier roman « Un genou à terre » alors qu’il était en mission en Afghanistan en 2009. Ancien policier formateur, vit aujourd’hui à Romans-sur-Isère. Il diffuse son premier roman sur Internet en 2014 et rencontre un succès inespéré. Auteur de sept romans, il reçoit en 2018 le Prix des lecteurs des plumes francophones. L’un de ses romans, Wanda, a fait l’objet d’un court métrage tourné au Canada ayant remporté deux prix internationaux. En 2018 « La tête du lapin bleu » qui ressort en 2020 sous le titre « Les yeux d’Ava». En 2020, il publie « La Loi des hommes » aux Editions Slatkine et en 2021 « Le paradis des vauriens », toujours chez Slatkine. En 2024 il publie « Le courage des lâches » aux éditions La Trace.

Livre de poche – 30.09.2020 – 378 pages –

Résumé : « Si vous lisez cette lettre, c’est que vous tenez mon manuscrit entre vos mains, qu’on me l’aura volé, ou que ma fin sera proche. Il ne me quitte jamais, collé à ma peau, dissimulé sous mon manteau ou dans mon cabas. Les premières pages, nées il y a des années, sont raturées et usées par les griffes du temps. » Rédigée quinze ans après les faits, la lettre d’Ava a le goût âcre de la rédemption. En 2002, la jeune femme, mariée à un homme rencontré sur les bancs du lycée, mère de deux beaux enfants, des jumeaux, a une vie idéale.
Un amour solide, des désirs simples comblés par des bonheurs immenses. Mais c’était compter sans le destin. Lui peut se jouer de nous, brouiller les cartes, changer les règles. Quand un tragique accident remet toute sa vie en question, Ava sombre. Comment peut-on faire face quand toutes nos certitudes sont réduites à néant ?

Mon avis : Comme à mon habitude, j’aime bien voir la signification des noms des personnages, surtout quand ils ont des noms qui sortent un peu de l’ordinaire, comme Ava. Bingo !  Ava peut se traduire par « donner la vie », « vivante » ou « vie » ; Kevin signifie « bien aimé » ou « bel engendré » ; quant à Rose, symbole de l’amour et de la beauté, c’est une fleur, qui vit et qui meurt rapidement… Pour ce qui est de Marguerite, on dit des femmes qui portent ce nom qu’elles sont altruistes, d’un grand réconfort pour leur entourage …

Tant que j’en suis à parler de noms, j’en profite pour me poser une question : pourquoi avoir changé le titre du livre ? Sorti précédemment sous le titre « La tête du lapin bleu », il me semble que cela correspondait nettement plus à l’histoire qui nous est contée…

Passons maintenant au plus important : ce livre est porté par le souffle de l’émotion. C’est le roman d’une vie brisée, alors que tout semblait être au beau fixe dans la vie de la petite famille idéale : un mari aimant, une femme amoureuse, deux jumeaux qui étaient le soleil de leur vie. Et soudain, sur la route des vacances, tout bascule… et c’est la descente aux enfers. Le voile du bonheur se déchire, des secrets émergent et d’un coup, tout se noircit… le passé, le présent, le futur. Ava n’est manifestement pas de taille à affronter les choses de manière positive et elle va se laisser couler, faire les mauvais choix, se réfugier dans la fuite, la culpabilité, la colère, la folie et la haine en se martyrisant et s’auto-flagellant au lieu de se redresser. Mais la tactique « tous coupables et moi la première » peut-elle se révéler gagnante à long terme ?
Pour le savoir, l’auteur nous invite à dégringoler le précipice de la vie avec Ava. Elle rencontrera sur sa route toute sorte de gens :  des aigris, des méchants, des qui n’ont pas les mots et des qui savent trouver les mots pour aider… et au final… mais à vous de vous accrocher au doudou et de faire le voyage …

Dans le langage des fleurs, la Marguerite symbolise Un nouveau commencement, l’amour véritable, la fidélité… et c’est le personnage qui m’a le plus touchée dans le livre… Elle est petite la marguerite, mais elle est symbole  d’espoir et de renouveau.

Par moments, ce livre m’a fait penser aux histoires que nous conte Agnès Ledig :  j’ai beaucoup aimé.

Extraits :

Vous savez, l’espoir, cette lumière qui nous empêche parfois de sombrer, cette poussière d’étoiles qui fend la noirceur de l’âme et nous autorise un sursis lorsqu’on se sent perdu, au bout de tout.

Ce qui embellit une existence, ce ne sont ni la géographie ou le sens de la girouette, ni la langue que l’on parle ou l’altitude, mais les êtres que l’on croise.

Je cherchais une souffrance physique, quelque chose de plus fort que le malheur.

Il existait des douleurs qui ne pouvaient se partager avec des mots.

La douleur ne pouvait se contenter de vivre, il fallait qu’elle mugisse, qu’elle s’exprime, qu’elle blesse.

Le bonheur possède tous les pouvoirs, même celui de disparaître en un claquement de doigts.

Le bonheur et l’amour savent se faire oublier. Si l’on ne leur prête pas attention, ils se diluent et perdent de leurs couleurs, s’effacent pour n’être plus que l’ombre d’eux-mêmes.

C’est lorsque des gens qu’on aime s’effacent qu’on s’en veut d’avoir été loin d’eux.

Avec le recul, je comprenais mieux ; elle craignait de me voir un jour dans sa position ; l’ombre d’un autre, une vie par procuration.

J’avais ressenti le besoin de pleurer et cette fois je l’avais laissé venir. Les larmes ne s’imposaient plus à moi, elles m’accompagnaient.

Je commençais à me poser la question, peut-être que je me réfugiais derrière ce non-dit pour me préserver.

— Vous voyez Ava, votre vie ressemble un peu à ce thé, il est tellement brûlant qu’il en devient imbuvable. Pourtant dans un moment, si vous le laissez décanter, il se chargera d’arômes et vous pourrez y goûter sans crainte.

Aimer, c’est être prêt à souffrir

Tu vois, nous avons fait des erreurs, peut-être parce que personne n’est venu nous soutenir. Le malheur, ça fait fuir. D’abord les amis, puis la famille.

Il avait eu beau m’expliquer et tenter de me convaincre qu’il agissait pour mon bien, j’avais fini par m’emporter et me disputer avec lui. Enfin, pour se disputer il faut être deux, lui ne répondait pas.

De ma bouche écumaient des mots qui le blessaient, il restait impassible et cela décuplait ma rage.

j’avais l’impression d’être différente, le vide envahissait tout mon être. Me sentir remplie de vide paraissait tellement étrange, aux frontières de la raison. La rage, la colère, le remord et la hargne s’étaient estompés pour me laisser seule au-dedans, seule avec la douleur et juste l’envie de disparaître.

le malheur se repaissait de chaque minute, mordait et arrachait même les joies les plus fugaces

La vie était ainsi que l’on devait se détacher de nos parents, s’affranchir de leurs ailes protectrices pour un jour, à notre tour, passer le flambeau. Pourtant, dans des moments comme celui-ci, on réalisait qu’on avait toujours besoin les uns des autres.

Il n’y a qu’une personne qui peut vraiment t’aider, c’est toi et toi seule.

Je ne parvins pas à trouver le sommeil, tourmentée par mille questions, mais surtout une en particulier : qu’est-ce que je faisais là ?

Une cicatrice, ça ne s’efface pas, au mieux, ça se camoufle. On vit tous avec nos fantômes, je sais de quoi je cause !

Détrompe-toi, et arrête de crier sur les toits que tu l’as tuée. T’as pas réussi à la sauver, et ça fait une énorme différence.

Je réalise que je suis une bombe à retardement… autant exploser loin des miens.

Et si toutes ces routes, ces bosses, ces retrouvailles et séparations, ces joies et ces malheurs n’étaient juste là que pour nous apprendre une seule chose ? Le plaisir de marcher sur les chemins de la vie. Avancer et aimer chaque pas, des premiers jusqu’aux derniers.

La vie, elle ne te respectait que quand tu te battais, que tu te gaussais de ses coups de bâton, quand tu choisissais la route qui monte, et que, même la gueule dans le caniveau tu continuais de l’apprécier.

La vie m’avait blessée et laissé des plaies profondes, mais au lieu d’essayer de les soigner, de les panser, je les avais entretenues pour qu’elles s’infectent toujours plus.

4 Replies to “Utroi, Wendall «Les yeux d’Ava» (RL2020)”

  1. Merci beaucoup Catherine pour ta lecture et ce très joli retour. En lisant les extraits, j’ai plongé de nouveau. Le changement de titre est une décision du Livre de Poche pour éviter la redondance avec la couverture qu’ils désiraient conserver. ♥

    1. petite réflexion complémentaire ! la miss AVA il y a quand même des fois ou j’ai eu envie de la secouer, de la baffer !!!

        1. L’essentiel c’est qu’elle donne envie de réagir ! Cela prouve qu’elle nous touche, ne laisse pas indifférente, génère des réactions ! On a envie qu’elle se sorte de cette foutue galère!

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