Del Árbol, Victor «La víspera de casí todo» (2016) / La veille de presque tout (01-2017)

Del Árbol, Victor «La víspera de casí todo» (2016) / La veille de presque tout (01-2017)

Résumé : Germinal Ibarra est un policier désenchanté poursuivi par les rumeurs et par sa propre conscience. Il y a trois ans il a demandé sa mutation dans un commissariat de La Corogne après avoir résolu le meurtre de la jeune Amanda. Mais il est brutalement sorti de son refuge et de son anonymat quand une femme qui vient d’être hospitalisée pour coups et blessures le demande..

Une mystérieuse Paola qui tente d’échapper à ses propres fantômes a fait son apparition il y a trois mois dans le lieu le plus reculé de côte galicienne Elle s’installe chez Dolores, une femme sensible et torturée, qui l’accueille sans poser de questions.

Prix Nadal de littérature espagnole 2016 ( plus ancien prix espagnol – équivalent du Goncourt)
Prix Transfuge Magazine de la rentrée littéraire d’hiver 2017 – Meilleur polar étranger

Prix Caméléon – 2017

Mon avis :

La vie, la mort, les racines et le passé. Les thèmes chers à Victor del Arbol sont là.

C’est l’histoire de personnages qui luttent pour continuer/recommencer à vivre malgré le passé. Et plusieurs histoires parallèles, comme dans les romans précédents. De fait au moins sept histoires se croisent et se mêlent : Paola, Germinal, Dolores, Mauricio, Oliverio , Martina, Daniel … On peut aussi ajouter un autre personnage : le lieu où va se dérouler le roman.. Le bout du monde… le paysage, les éléments, le ciel, les étoiles (filantes ou absentes) quand il fait noir dans le cœur, les étoiles ne brillent pas dans le ciel… L’idée d’aller au bout du monde pour recommencer sa vie n’est pas anodine.

Tout ce que font les personnages est en relation avec leur enfance/jeunesse et les raisons d’agir sont la conséquence de ce qu’ils ont vécu. Le passé conditionne la vision du monde et justifie le présent. Le mal sans raison n’existe pas : il y a toujours une raison qui fait que… Une fois encore Victor del Arbol nous entraine dans le sillage de jeunes qui souffrent. Et dans l’Histoire : ici une incursion dans l’histoire de l’Argentine, la guerre des Malouines…

Je ne considère pas cet auteur comme un auteur de « romans noirs » ou de « polars » ; bien que le livre commence par un assassinat, il passe vite au second plan car en quelques pages on connaît le meurtrier et tout ce qui concerne l’assassinat est balayé. L’important ce sont les personnages, et, comme toujours l’adulte conditionné par son passé, par son enfance. On grandit mais les blessures de l’enfance façonnent la personne que nous devenons, elles font partie de nous. Pour continuer d’avancer, il faut prendre acte de ce que nous sommes, accepter nos blessures et notre passé.

Etre aux commandes de sa vie, et de sa mort. La liberté de choisir la vie ou la mort, de s’envoler pour la vie ou pour la mort.. . Un des thèmes abordé dans le livre est le suicide. Etre capable de supporter sa propre souffrance c’est une chose, supporter celle des gens qu’on aime en est une autre.

Non je ne vais pas vous raconter l’histoire… il vous faudra la vivre.. avec tristesse, douleur, révolte et rage… car elle est noire l’histoire… comme la vie.. elle est dure, inhumaine parfois.. Il faudra aller jusqu’au bout du livre pour comprendre… et surtout il vous faudra attendre 2016 si vous ne vous lancez pas dans le livre en espagnol (ou catalan) et que vous attendez la traduction française.

J’aime les références littéraires et musicales qui jalonnent le livre ; Zola, et « Germinal » (un policier dont le père était anarchiste et révolutionnaire) ; Virginia Woolf et Orlando ; les musiques – le Clair de lune de Debussy, Johnny Cash ; et je vais découvrir Juan Gelman (la dernière fois je m’étais replongée dans Maïakovski – mais lui je connaissais)

Notes :

Syndrome de Williams : Cette maladie génétique porte les noms du cardiologue néo-zélandais J.C.P. Williams (en), qui le premier identifia en 19612 cette maladie réunissant une malformation cardiaque (sténose aortique congénitale supra valvulaire), une déficience intellectuelle et des traits faciaux « elfiques » caractéristiques, et du pédiatre allemand A.J. Beuren (de l’université de Göttingen) qui décrivit indépendamment cette association en 19623.

Sa cause fut initialement attribuée à un surdosage en vitamine D4 mais son origine génétique est suspectée au début des années 19905. Il est alors démontré que la maladie correspond, non pas à une mutation, mais à une délétion d’au moins un gène6.

Tiresias : Dans la mythologie grecque, devin aveugle de Thèbes. Selon L’Odyssée, il garda le don de prophétie jusqu’aux Enfers où Ulysse alla le consulter. Il joua un rôle dans le drame thébain dont le roi Laïos et son fils Œdipe furent les héros. Des légendes plus tardives relatent qu’il vécut durant sept (ou neuf) générations et qu’il mourut après la guerre des Sept contre Thèbes ; on raconte également qu’il fut transformé en femme pour avoir tué la femelle d’un couple de serpents en train de s’unir ; il ne reprit son sexe premier que sept ans plus tard, après avoir tué le serpent mâle.

À la suite de cette expérience, il fut un jour consulté par Zeus et Héra qui ne parvenaient pas à se mettre d’accord : Héra soutenait contre Zeus qu’en amour les femmes ont moins de plaisir que les hommes ; Tirésias affirma que l’amour donnait aux femmes dix fois plus de plaisir qu’aux hommes. Furieuse de voir qu’il avait révélé le secret de son sexe, Héra frappa Tirésias de cécité, mais Zeus lui accorda en compensation le don de prophétie. D’autres encore prétendent que c’est Pallas Athéna qui l’avait aveuglé parce qu’il l’avait épiée tandis qu’elle se dévêtait pour prendre son bain.

Depuis l’Œdipe roi de Sophocle, le personnage de Tirésias réapparaît à diverses reprises dans la littérature européenne avec son double caractère de prophète et d’homme-femme, comme dans la pièce de Guillaume Apollinaire Les Mamelles de Tirésias (1928) et dans La Terre gaste (The Waste Land, 1922) de T. S. Eliot.

Ceibo : … Fleur nationale Argentine – appelée localement ceibo, seibo ou bucaré, est une espèce d’arbre de la famille des Fabaceae,

Juan Gelman (poète) : Né dans le quartier de Villa Crespo, Buenos Aires, quartier à l’identité juive fortement marquée, Juan Gelman est le troisième enfant (le seul né en Argentine) d’un couple d’immigrants juifs ukrainiens, Joseph Gelman et Paulina Burichson. Il apprend à lire à 3 ans et écrit ses premiers poèmes d’amour à huit ans ; il sera publié pour la première fois à onze ans (1941) par la revue Rojo y Negro. À quinze ans il adhère à la Federación Juvenil Comunista (Fédération des Jeunes Communistes). En 1948 il entreprend des études de chimie à l’Université de Buenos Aires mais les abandonne rapidement pour se consacrer pleinement à la poésie.

Extraits : ( juste quelques phrases)

Esas cicatrices fascinaban a Daniel; eran como raíces secretas que ascendían hacia la superficie, o como dedos crispados de náufragos.

El tiempo se detuvo cuando el eco de la última nota se extinguió. Durante un instante, cada uno de los presentes se trasladó a un lugar distinto de sí mismo

Pero sus ojos eran un desierto de indiferentes piedras minerales, un espacio lunar barrido por el viento donde ella, «madre desnaturalizada» (así empezaron a llamarla cuando los rumores saltaron a la prensa rosa), vagaba sin voluntad

Hay algo bondadoso en las personas que duermen. Tanto da que sean asesinos, torturadores, soldados, viejos o niños. El sueño y su inconsciencia los aleja de su mundo cotidiano y eso los reconcilia con una humanidad primigenia. Cuando dormimos, todos somos inocentes

La gente debería aprender a ponerse en paz consigo mismo y con sus vicios. Una persona que niega lo que es no puede ser feliz de ningún modo

A veces hay que despertar y regresar a la realidad. Eso es todo

¿Volver a la realidad? ¿Dónde estaba el mapa con el camino de regreso?

Lo que no tiene remedio es el pasado. Pero la memoria es una forma de inventar el presente.

 

lien vers une interview ( en espagnol)  :  « Lecturafilia »

 

5 Replies to “Del Árbol, Victor «La víspera de casí todo» (2016) / La veille de presque tout (01-2017)”

  1. Trés belle analyse du dernier livre de Victor del Arbol ,comme toujours Catherine tu nous donne envie de lire ce livre .Dès qu’il paraît en français ,je me « jette » dessus pour le lire !!

    En attendant Bojangles est dans ma pile , je n’ ai pas trés envie de le lire ,mais je vais lire ton commentaire et je suis sûre qu’après cela va changer .Je vais lire les autres articles aussi .

  2. Un super article en ce jour de sortie française du livre avec la play-list du roman 😉

    À écouter, bien sûr, Carlos Gardel, interprétant Cuesta Abajio ou Volver, mais aussi Osvaldo Pugliese ou Atilio Stampone.
    Pour ne pas oublier, Joan Manuel Serrat, La Montonera,
    Mais aussi, aria de Vivaldi par Jaroussky, stabat Mater, Nocturnes de Chopin -Arturo Rubinstein, Clair de Lune de Debussy, Hurt de Johnny Cash.
    et d’autres …

    http://quatresansquatre.com/article/chronique-livre-la-veille-de-presque-tout-de-victor-del-arbol-1483282275

  3. C’est avec le même talent que dans ses autres romans, que Victor del Arbol, croisent les vies et les époques.
    Ces allers et retours entre le présent et le passé, tissent peu à peu le destin des principaux personnages et en fait l’histoire d’une chaîne de souffrances qui va se constituer petit à petit car chaque personnage en est un maillon qui va venir s’accrocher- voire se fracasser – à un autre.
    Ce roman nous renvoie à la dictature de la Junte militaire en Argentine au moment de la Guerre des Malouines, cette époque où les bourreaux faisaient la loi a façonné aussi certains personnages et leur vie, comme si on n’en avait jamais fini avec la noirceur qu’elle soit celle de son histoire ou celle de l’Histoire . L’imbrication du passé donne les clés pour comprendre le présent mais cela ne libère pas des blessures. La construction est brillante et il faut lire jusqu’à la fin pour terminer le puzzle de ces destins.
    C’est une histoire qui m’a remplie de larmes et qui raconte la souffrance des enfants qui paient le prix fort dans ce roman et la souffrance des adultes qui essaient d’esquiver leur douleur, de s’en arranger ou de s’en venger.
    Et comme dans les 4 romans de Del Arbol que j’ai lu les personnages continuent de me hanter bien après que j’ai refermé le livre. Je voudrais savoir ce que vont devenir les survivants tant l’auteur en fait des êtres de chair et nous fait oublier que ce sont des personnages de fiction.
    Très noir ! Très fort !
    Je ne te remercierai jamais assez Catherine de m’avoir fait découvrir cet auteur magnifique

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