Niel, Colin « Darwyne » (2022) 313 pages

Auteur: né le 16 décembre 1976 à Clamart, est un auteur français de romans noirs.
Ingénieur des eaux et forêts, diplômé d’études approfondies en biologie de l’évolution et écologie, Colin Niel a travaillé pendant douze ans dans la préservation de la biodiversité. Il a vécu plusieurs années en Guyane française, où il a notamment été chef de mission pour la création du parc amazonien de Guyane, mais aussi à Paris, à Lille, à Montpellier, en Guadeloupe où il fut directeur adjoint du parc national de la Guadeloupe.
Romans:
Série guyanaise: Les Hamacs de carton (2012) – Ce qui reste en forêt (2013) – Obia (2015) – Sur le ciel effondré (2018)
Autres romans: Seules les bêtes (2017) – Entre fauves (2020) – Darwyne (2022) – Wallace (2024)
Adaptés à l’écran : Seules les bêtes (en 2029)
Rouergue – 24.08.2022 – 288 pages / Livre de poche – 31.01.2024 – 313 pages (Grand Prix de littérature policière 2023)
Résumé:
Darwyne Massily, un garçon de dix ans, légèrement handicapé, vit à Bois Sec, un bidonville gagné sur la jungle infinie. Et le centre de sa vie, c’est sa mère Yolanda, une femme qui ne ressemble à nulle autre, bien plus belle, bien plus forte, bien plus courageuse. Mais c’est compter sans les beaux-pères qui viennent régulièrement s’installer dans le petit carbet en lisière de forêt. Justement un nouvel homme entre dans la vie de sa mère : Jhonson, un vrai géant celui-là.
Et au même moment surgit Mathurine, une employée de la protection de l’enfance. On lui a confié un signalement concernant le garçon. Une première évaluation sociale a été conduite quelques mois auparavant par une collègue qui a alors quitté précipitamment la région. Dans ce roman où se déploie magistralement sa plume expressive, Colin Niel nous emporte vers l’Amazonie, territoire d’une puissance fantasmagorique qui n’a livré qu’une part infime de ses mystères.
Darwyne, l’enfant contrefait prêt à tout pour que sa mère l’aime, s’y est trouvé un refuge contre le peuple des hommes. Ceux qui le voudraient à leur image.
Darwyne évoque un enfant déchiré entre son amour pour sa mère et celui qu’il éprouve pour la forêt amazonienne, avec laquelle il entretient une relation intime et quasi magique. Ce roman est suivi par Wallace en 2024, dans lequel on retrouve plusieurs de ses personnages.
Mon avis:
Darwyne a dix ans et est un petit garçon avec un coté sauvage, un petit être à part, qui vit dans son monde. Il ne souhaite que 2 choses : vivre avec sa mère et ne pas devoir partager son amour et vivre avec la forêt, dont il a un besoin pour ainsi dire vital et avec laquelle il entretient un rapport pour ainsi dire charnel. Mais il a un gros problème : les beaux-pères qui se succèdent et il ne s’entend vraiment pas avec eux…
Mathurine est assistante sociale dans la protection de l’enfance et reçoit un signalement anonyme concernant la famille ; elle doit faire un rapport sur le placement ou non de l’enfant dans une famille d’accueil… et elle va faire sa connaissance.
Et en prime il y a le rapport avec la nature, la découverte de la forêt, de la végétation, des animaux et des oiseaux qui y vivent…
Un roman magnifique, tant du coté rapports humains que rapports avec la nature.
A la fois violent, émouvant, dépaysant, fort, puissant, avec une touche de magie, du suspense, poétique aussi, le tout porté par une très belle écriture.
Merci aux personnes qui m’ont conseillé ce roman (Aurore, Delphine entre autres). J’ai eu le coup de coeur et je vais bien sûr lire la suite.
Extraits:
Mais la mère ne bouge pas, les yeux rivés à sa lessive, l’air de laver sa propre vie. Les mains plongées dans l’eau mousseuse, elle noue et dénoue sans cesse pour essorer la crasse de leur quotidien.
elle saisit les sons de la faune comme l’alphabet d’un autre monde, tente de déchiffrer les signes qui s’échangent en forêt.
C’est peut-être ce qu’elle aime le plus, d’ailleurs : cette impression d’être dépassée par le monde qui l’entoure. Cette certitude que, quoi qu’elle fasse, quoi qu’elle apprenne, l’Amazonie conservera sa part d’inconnu. Sa part de magie, quand tout ailleurs est devenu si rationnel et maîtrisé.
Je ne vous dis pas qu’il a un retard mental, hein, il n’est pas le seul à être en décrochage. Mais lui… il est un peu à part, quoi. Complètement dans son monde.
Et bientôt c’est l’Amazonie, le sous-bois s’empare de lui telle une femelle de son rejeton blessé, le recueille dans son ombre.
Que c’est l’un des grands drames de l’humanité moderne, que plus personne ne soit capable de mettre un nom sur le moindre volatile. Que c’est cette ignorance qui pousse les humains à détruire cette part du monde qu’à présent ils appellent nature, qui au fil des siècles leur est devenue étrangère.
Elle oublie la protection de l’enfance, tous ces gosses devenus dossiers, empilés sur les bureaux comme autant d’anonymes, maltraités, brutalisés, abusés.
Darwyne comprend que les autres, en fait, il ne les aime pas. Qu’à bien y réfléchir, il ne sera sans doute jamais comme eux, et que cette idée, elle lui plaît plus qu’il ne l’aurait cru.
l’enfant communique réellement avec eux, dans une langue inconnue des humains, une langue magique et universelle. Une langue qu’un jour il pourrait lui apprendre.
Parce que les enfants, c’est comme les arbres, finalement, il ne faut pas les laisser pousser n’importe comment.
Une éducation faite de punitions et d’humiliations, une éducation que la mère elle-même compare à du dressage. À du re-dressage, se corrige l’éducatrice
Et elle attend qu’enfin tout cela se termine.
Rêve, réalité, vie, mort, qu’importe tant qu’il existe une fin.
Mythes et legendes de Guyane
Le MASKILILI, terreur des petits guyanais appartient au monde de la nuit et de la forêt. On lui prête la faculté de se déplacer, émet un sifflement caractéristique par intervalles. Sa particularité est d’avoir les pieds retournés à l’envers, si bien que si on s’aventure à le suivre, fatalement il vous égarera. Il circule dans l’obscurité et bien sûr demeure constamment invisible. Il est dit encore qu’il peut enlever les petits enfants qui ne sont pas sages. La nourriture préférée du MASKILILI c’est le piment et le café, qu’il vient picorer durant la nuit. Le MASKILILI est invisible même si on l’entend souvent rôder autour des habitations.
Il a pour but d’effrayer les enfants guyanais pour qu’ils ne s’éloignent pas de leurs parents le soir. C’est une créature qui ressemble à un enfant dans le but de donner confiance à l’enfant en question. Il n’est pas dit qu’il est méchant avec les humains mais les grands-parents laissent croire que si .. Le Maskilili est joueur et aime perdre les chasseurs en forêt.
(Sources : Ville de Cayenne – Etres fabuleux et génies de Guyane / Wikipedia )
3 Replies to “Niel, Colin « Darwyne » (2022) 313 pages”
Coucou Cath, je cherchais une inspiration, je crois que je l’ai trouvée
Je viens de terminer ce roman qui m’a beaucoup touché. L’histoire de ce petit garçon à part qui semble être bien élevé par sa mère qui suscite l’admiration autour d’elle, pour son courage à subvenir aux besoins du foyer dans un logement situé dans un petit bidonville : un carbet en Amazonie. Darwyne son petit garçon de 10 ans voue un amour inconditionnel à sa mère, une admiration aussi pour celle qui lui répète en boucle qu’il a bien de la chance, lui le petit Pian, cet opossum un peu dégouttant au petits yeux noirs rapprochés qui joue toujours dans la boue en forêt. Mathurine la nouvelle assistante sociale est en charge du dossier de l’enfant qu’elle n’a jamais rencontré, il est vrai que les gens de la ville ne s’aventurent pas souvent dans les bois profonds de l’Amazonie où se trouve celui de bois sec où vit toute la famille, la mère et le fils et les nombreux beaux-pères qui passent mais ne restent pas. Il y a cette question comment se fait-il que cette femme dont tout le monde salue la grâce et la beauté n’arrive pas à garder un compagnon. Pourquoi un jour disparaissent-ils sans laisser de trace ? Est-ce à cause de l’enfant ? Trop difficile à cause de son handicap ? Ou bien serait-ce l’enfant lui-même qui ferait disparaître les compagnons trop proches de la mère ? Il y a ce côté suspens policier tout au long du roman mais il y a surtout ce rapport à la nature amazonienne que l’on découvre, riche, luxuriante, mystérieuse et inaccessible aussi. Mathurine, touchante dans son désir d’enfant sur le tard qui malgrè de nombreuses PMA n’arrive pas à concrétiser son rêve. Est-il pour cela qu’elle se rapproche de Darwyne qui reste mutique ou tout simplement inexistant quand elle le convoque avec sa mère. C’est un grand roman sur la nature, sur l’homme et son rapport avec elle, ses interactions, sur la différence qui selon où elle vit est un handicap ou un atout vu avec un regard différent. C’est un coup de cœur.
contente de lire ton avis.
Il y a une suite « Wallace » ( pas encore lue)