Dahl, Kjell Ola – L’homme dans la vitrine (2012)
Série Gunnarstranda et Frank Frölich ( 1er titre traduit en français)
Résumé : Un matin d’hiver, Reidar Folke Jespersen, antiquaire à Oslo, va se poster dans un café non loin de chez lui. Après quelques heures d’attente, il aperçoit son épouse qui va retrouver son amant. Ensuite, Jespersen quitte le café pour se rendre chez ses frères pour un important rendez-vous d’affaires. La réunion se passe mal et les frères se séparent fâchés.
Le lendemain matin, on retrouve le corps sans vie de Jespersen, placé nu dans un fauteuil de la vitrine de son magasin. Le commissaire Gunnarstranda arrive sur les lieux du crime avec l’inspecteur Frank Frølich. Les indices dont ils disposent ne sont pas nombreux : une série de chiffres tracés au feutre sur le cadavre et des objets volés. L’enquête s’annonce d’autant plus difficile que de nombreuses personnes semblent très contentes de la disparition du vieil homme.
Avec L’homme dans la vitrine, Kjell Ola Dahl signe un roman dense et complexe, une histoire d’amour et de vengeance sur laquelle plane l’ombre du passé et des heures les plus sombres de l’histoire norvégienne.
Mon avis : Très belle découverte que cet auteur de polars norvégien. On entre petit à petit dans l’intrigue ; on fait la connaissance des personnages, et plus on avance plus on se demande qui est le meurtrier.. Il faut dire que la victime ne brille pas par son côté sympa et que tout le monde pourrait bien avoir eu envie de le faire disparaitre… A relever le contexte historique (et oui.. un petit contexte historique dans un polar est toujours un plus)… Dans ce cas il s’agit d’un petit détour dans le passé, au temps de la IIème guerre mondiale et du gouvernement collaborationniste de Vidkun Quisling qui s’installe au pouvoir en Norvège en 1942. Un suspense classique, efficace, peu de personnages sympathiques, plus de psychologie que de sang.. et ça moi j’aime bien… je vous invite à faire connaissance de cet auteur et du tandem de flics (le commissaire Gunnarstranda et son adjoint Frölich) que je vais me faire un plaisir de suivre ans de nouvelles aventures glacées…
Extraits :
C’était comme si elle avait emballé et caché une partie d’elle-même dans du papier de soie, un petit paquet qu’elle ouvrait en compagnie de l’homme habitant de l’autre côté de la rue.
plus il sentait la colère monter en lui. En même temps, il percevait que la résignation essayait de contenir sa fureur. C’était là un sentiment qu’il haïssait par-dessus tout, la façon qu’avait cette apathie d’un vieux monsieur de s’insinuer dans sa conscience, semblable à une nappe de brouillard qui se pose sur un bois et le rend impénétrable et incolore. C’était une apathie qui cherchait à faire croire à son corps qu’il ne possédait ni la force ni l’énergie de relever le gant. Cette agressivité mêlée de résignation lui fit croire, pendant quelques secondes, qu’il allait étouffer.
L’idée de s’être infligé une existence totalement inutile était tellement terrifiante qu’elle la balaya sur-le-champ. Même si elle parvint à peu près à chasser cette perspective, cette dernière traînait autre chose dans son sillage, chose qui la tourmentait tandis qu’elle attendait que le sommeil veuille bien montrer le bout de son nez.
Ce que tu aimes, ce que tu as autour de toi, cela en dit long sur toi en tant que personne.
« Tu t’ennuies ? » demanda-t-elle.
Il se mit à zapper avec la télécommande.
« M’ennuyer, moi ? Non… »
Par cette température, les gens prennent de l’huile de foie de morue et des vitamines, mais ce n’est pas nécessaire. Tout ce qu’il faut, c’est manger épicé. Penses-y. Tu mets quatre oignons dans tes sandwiches du petit déjeuner, et tu rajoutes du piment rouge — du genre brûle-gueule, à te couper le souffle. Avec ce type de munition, t’es blindé, et t’auras pas froid aux mains. Tu peux même te promener à poil par – 20 oC, et tu verras le nuage de vapeur autour de toi. Il n’y aura pas un virus, pas un bacille qui passera par ta bouche, et rien qu’avec ton haleine tu vas tuer raide les plantes vertes. T’es immortel, mon vieux, immortel.
D’un autre côté, il y a une énergie qui ne dépend pas de la proximité physique. Le désir, sentimental et psychologique, qu’éprouvent deux personnes l’une pour l’autre, c’est une forme d’amour authentique. Le désir, c’est l’amour qui ne connaît pas de limites. Le désir ne peut jamais être détruit, disparaître ou mourir.
« Quand l’essentiel se réduit à quelques souvenirs, ce sont toujours des fragments des bons côtés des choses. C’est le bon côté qui survit et qui fait de la mémoire la qualité la plus importante que tu puisses posséder. La capacité de se souvenir, non seulement pour revenir au passé, mais aussi pour conserver qui tu es, et ton âme. »
Bien des gens doivent se confronter, tôt ou tard, à leurs rêves, à ce qu’ils sont. Certains sont plus précoces, d’autres n’en feront jamais l’expérience. »
« Mais comment les gens se rencontrent et se marient, c’est un peu comme les fleurs et les abeilles : ils se trouvent mutuellement, ils travaillent ensemble.
Il n’y a ni honte ni déshonneur dans l’amour. Les gens qui aiment sont innocents, quelle que soit la personne qu’ils aiment, et quelles que soient les raisons de leur amour. »
— Dans le meilleur des cas, la réalité de la guerre est surréaliste. Il est vain de vouloir comprendre la guerre avec la paix comme référence.