Agus, Milena «Mal de pierres» (2007)
Auteur : Issue d’une famille originaire de Sardaigne, Milena Agus est italienne, née à Cagliari (Sardaigne) en 1959. Elle est professeur et donne des cours d’italien ainsi que d’histoire dans un institut technique de Cagliari. Mère divorcée, Milena vit dans la maison familiale de sa grand-mère en Sardaigne, terre à laquelle elle s’attache profondément, et dont la passion ressort de façon très significative dans ses romans.
Résumé : Entourée de jeunes hommes qui pourraient demander sa main, l’héroïne tarde pourtant à trouver un mari car elle rêve de l’amour idéal. À trente ans, elle est déjà considérée une vieille fille par les siens, dans une Sardaigne qui connaît les affres de la Seconde Guerre mondiale… Et lorsqu’elle conclut une union très attendue, c’est en affirmant haut et fort que ce n’est pas par amour mais par raison. Comme son unique enfant, l’amour se fera attendre. Elle finira par le rencontrer sur le Continent, lors d’une cure thermale destinée à guérir son «mal de pierres», des calculs rénaux, mais qui aura raison aussi de son «mal d’amour». À sa petite-fille, elle racontera quelques décennies plus tard ses émotions, ses cheminements, tout en laissant des zones d’ombres. La vérité ne se recomposera que longtemps plus tard, de façon inattendue, lorsque la dernière pièce du puzzle se retrouvera entre les mains de la narratrice. Mais quelle est au juste la vérité?
Prix Relay du Roman d’Évasion – Prix Elsa Morante en Italie
128 pages «Une miniature. C’est ainsi que Dominique Vittoz, la traductrice, a défini ce texte. Et la comparaison me semble excellente. L’observateur aperçoit d’abord l’héroïne qui souffre de ce « mal de pierres ». Ensuite il découvre en arrière-plan les personnages secondaires peints jusque dans les moindres détails avec une touche d’une extraordinaire adresse et finesse. Avec une sensibilité et une liberté de langage étonnantes Milena Agus déroule pour nous l’histoire. Mais il vous faudra attendre les dernières pages pour tout comprendre. Enfin, presque tout, car comme dans la vie, la vérité se dérobe… Vous allez dévorer ce livre d’une traite, mais vous ne l’oublierez pas.»
Mon avis : J’ai eu envie de lire ce livre en le voyant nommé aux Césars 2017 du cinéma (8 nominations mais aucun César). Petit roman tout en finesse qui retrace l’histoire de la folie sous-jacente qui habite une femme… elle est qualifiée en filigrane de dérangée, de femme à lubies. Saga familiale qui couvre trois générations en 120 pages… La narratrice retrouve un petit carnet sur lequel sa grand-mère a couché sa vie rêvée, bien loin de sa vie réelle. Une vie qui serait « amour ». Un roman qui mêle folie et vraie vie, vérité et mensonges, au point où tout se mélange un peu aussi dans notre vision des choses. J’ai aussi aimé (comme toujours) les couleurs du récit… Entre le bleu du ciel sarde et le brouillard milanais… Entre des murs solides et des parois qui s’effritent… Entre apparence trompeuse et réalité cachée… Le seul moyen de vivre la réalité serait-il de se réfugier dans une vie rêvée ? Le dialecte sarde est employé à de nombreuses reprises. La vie de la grand-mère démarre vraiment quand elle fait un bref séjour sur le continent pour soigner des calculs rénaux. Elle va y rencontrer un homme. Elle va surtout y rencontrer l’Amour… le vrai le grand… pendant quelques jours… avant de retrouver sa vie réelle… enceinte… mais de qui ? de lui ? de son mari ? le fils qui va naitre quelques mois plus tard vivra de et pour la musique… La grande rencontre de la vie de la grand-mère restera un mystère, jusqu’à la découverte d’une lettre… Ce petit livre dévoile l’importance, l’influence, les conséquences, le pouvoir de l’écrit, de la poésie, de la littérature, de l’évasion par les mots, de l’imaginaire. Certains dons peuvent être aussi des malédictions.
Extraits :
Elles ne se sont jamais chamaillées, ni vraiment parlé, mais elles se sont tenu compagnie, jour après jour, un peu par la force des choses.
ils se sourirent en se regardant dans les yeux et ce soir-là ils restèrent sans manger ni boire.
« Une princesse. Vous vous comportez comme une princesse. Vous ne vous souciez pas du monde autour de vous, c’est le monde qui doit se soucier de vous. Votre seule tâche est d’exister. C’est bien ça ? »
« Et si nous embrassions nos sourires ? »
Tout était si étranger et si sombre, sous ce ciel plein de nuages, qu’elle pensa être arrivée dans l’au-delà, parce que seule la mort pouvait être ainsi.
Ma grand-mère a été tout entière à moi au moins autant que mon père tout entier à la musique, et ma mère tout entière à mon père.
Comme pendant toute sa vie on lui avait dit qu’elle semblait débarquer de la lune, elle eut l’impression d’avoir finalement rencontré quelqu’un du même pays.
Pour faire un tel sacrifice, disparaître pour le bien de l’autre, il faut l’aimer vraiment.
Et la nostalgie, c’est de la tristesse, mais c’est aussi un peu de bonheur.
D’après maman en effet, dans une famille, le désordre doit s’emparer de quelqu’un parce que la vie est ainsi faite, un équilibre entre les deux, sinon le monde se sclérose et s’arrête.
Dans chaque famille, il y a toujours quelqu’un qui paie son tribut pour que l’équilibre entre ordre et désordre soit respecté et que le monde ne s’arrête pas.
Car au fond, en amour, il s’agit peut-être au bout du compte de se fier à la magie, on ne peut pas dire qu’on puisse trouver une règle, quelque chose à suivre, pour que tout se passe bien, par exemple obéir à des Commandements.
N’arrêtez pas d’imaginer. Vous n’êtes pas dérangée. Ne croyez plus jamais ceux qui disent cette chose injuste et méchante. Écrivez.
One Reply to “Agus, Milena «Mal de pierres» (2007)”
J’ai beaucoup aimé ce livre avec ses couleurs ,ses détails ses « musiques » .Oui c’est un petit bijou dont on garde longtemps le souvenir présent à la mémoire .