Christophe «Vivre la nuit, rêver le jour» – Souvenirs (2021)

Christophe «Vivre la nuit, rêver le jour» – Souvenirs (2021)

Daniel Bevilacqua, alias « Christophe« , est un auteur-compositeur, chanteur et occasionnellement comédien français, est né le 13 octobre 1945, tout juste après la guerre, à Juvisy-sur-Orge en banlieue parisienne, descendant d’immigrés italiens originaires du Frioul.. Il est décédé le 16 avril 2020 à Brest, à 74 ans, des suite de la Covid19. Au total, il a publié dix-sept albums studio, trois albums en public et collaboré à quatre longs métrages en cinquante-cinq ans de carrière.

Denoël – 07.04.2021 – 255 pages

Résumé : « Personne ne peut expliquer vraiment qui il est ni ce qu’il aime. Il y a trop de paramètres cachés et mystérieux. Pour créer, je me sers de ces choses qui sont terriblement secrètes et ancrées en moi, de souvenirs très importants. Plus j’avance, plus je reviens en arrière, plus j’aime l’intouchable que j’étais ». Les souvenirs bruts et incandescents de la plus singulière étoile de la chanson française.
Enfant d’une famille italienne aimante mais chaotique, jeune dragueur de Saint-Germain-des-Prés, fan d’Elvis et de John Lee Hooker, version frenchy de James Dean, dandy moustachu en smoking crème, fou de bagnoles, chasseur de sons aux verres fumés, Christophe a traversé avec élégance les époques sans jamais se démoder. Du Golf-Drouot à la salle Pleyel, du hit-parade au frisson underground, ses souvenirs dessinent une autre histoire de la chanson française.
Esthète, obsessionnel, anticonformiste, Christophe s’apprêtait à publier le récit sans filtre de son existence quand la mort s’est interposée.

Mon avis : Un an après le décès de Christophe est sorti ce livre « polémique » qui d’après ses proches ne pourrait pas avoir été écrit par le chanteur et qui dépeint un anti-Christophe. Comme je l’ai vu chez une copine qui se jette sur toutes les bio des gens célèbres, j’ai eu envie de me faire une idée du livre.

Il faut dire qu’il ressort assez antipathique du portrait qui est fait de lui et on pourrait effectivement penser que quelqu’un a voulu régler des comptes… En même temps, quel que soit le ton des mémoires, j’ai trouvé que cela se lisait facilement. De plus, je dois dire que si j’ai bien aimé certaines de ses chansons, je n’ai jamais trouvé le bonhomme sympathique. Mais j’ai bien aimé ses « sons », sa musicalité, ses influences blues américaines (blues et rock), et plus récemment son album plus électronique « Les vestiges du chaos »
Il y parle de ses rencontres : Gainsbourg, Bashung, Jarre, Adamo, Michelle Torr (!) et de ses influences musicales, de son parcours, de ses fréquentations, de ses intérêts.
Si le portrait de l’homme en fait un personnage assez déplaisant, la partie musique m’a bien plu. Et pour un musicien/chanteur, c’st quand même ce qui importe le plus, non ?  Et puis apprendre l’histoire de chansons qui ont accompagné notre vie, c’est assez sympa… dit la midinette de service…

Extraits :

L’inconnu est la route qui devrait primer dans toute recherche personnelle.

Il y a les gens du jour, gens de l’ennui, et les gens de la nuit, gens de l’amour.

La nuit camoufle pas mal de choses et rend le monde autour plus beau.

Nous étions une famille complètement décousue : à la fois unie comme les familles italiennes peuvent l’être et avec une difficulté majeure à dire les choses, à exprimer nos sentiments.

Mon papa, lui c’était plutôt un pastaga
il était plus du midi et moi du soir…
Enfin même plus que du soir… de la nuit, quoi.
Pour moi, c’était plutôt un Jack Daniel’s
Vu que mon père s’appelait Jacques
Et moi Daniel.

Brassens tissait d’abord un tapis sonore avec sa guitare et ce n’est qu’ensuite qu’il mettait des mots dessus.

J’aime être un passeur, faire découvrir les musiciens qui ont ouvert de nouveaux espaces dans ma tête.

Je n’avais pas de plan, c’était l’inconnu. Depuis, l’inconnu ne m’a jamais fait peur. Il est même devenu un mode de vie. C’est une forme d’inconscience qui me permet de franchir les barrières, qui allume une flamme à l’intérieur de moi, quelque chose d’inexplicable qui me pousse à agir.

J’ai toujours aimé tout ce qui est cirque, clowns, gens qui créent des histoires, qui aiment l’imaginaire et le mêlent à la réalité.

Faire une chanson, oui, parce que c’est toujours à partir des mélodies que je crée, mais aussi parvenir à donner une couleur à cette chanson à partir de ma palette sonore particulière.

Avec moi, Jean-Michel Jarre n’était pas musicien mais auteur… un auteur qui connaissait le son des mots.

Quand on est créateur, artiste, écrivain, il y a souvent plusieurs personnalités qui cohabitent en nous : chez moi, il y a Christophe et il y a Bevilacqua.

Je m’en remets souvent au hasard, à l’aléatoire en termes de création. Je ne suis pas un faiseur de chansons calibrées. J’emprunte des trajets périphériques qui déclenchent les résonances et les nuances dont je suis en quête.

Le dandysme, c’est assumer ce que l’on est dans l’attitude, dans la différence, le style.

Oui, je m’aime. Je m’aime moi et la route que j’ai tracée, même avec tous les stops. Je sens que je suis en décalage, mais je l’assume, je sais m’adapter à ce jeu avec le regard des autres.

Le cinéma, c’est comme la musique, on est dans une vibration particulière, on suit différents fils pour créer. Je ne suis pas un expert et je n’en serai jamais un parce que je ne poursuis que l’émotion.

Pour tous les films que je regarde, je laisse à l’image le temps d’arriver, d’entrer en moi, de former un collage de sons et de couleurs. C’est très proche de ma démarche en musique. Chaque chanson pour moi est un court-métrage. Je ne me considère pas comme un chanteur et, quand je fais un album, c’est un peu comme si je réalisais un film.

Il y a quelque temps encore, le poker c’était comme les Harley-Davidson. Un truc de voyous ou de marginaux. On avait la chair de poule quand on en parlait.

la voix n’est jamais la vedette, elle se fond dans la musique. J’ai souvent dit : « Je ne suis pas un chanteur », dans le sens où je ne mets pas ma voix en avant comme font les chanteurs d’habitude. La voix est un instrument parmi d’autres.

Je compose de façon anarchique. Parfois tout le temps. Parfois en pointillé. La création n’est pas une petite clé programmée par une petite usine pour que toutes les portes du disque s’ouvrent instantanément. Elle surgit dans la sensibilité. Je revendique mon artisanat, mes réflexions et mes recherches incessantes sur le son. Et quand on trouve, c’est comme une délivrance, et de ce tourbillon magique naît une chanson.

Pour l’écriture, les mots viennent, comme ça dans tous les sens, et à un moment il reste à faire le collage. La chanson, c’est comme dans la vie, on répète toujours la même chose, les mêmes rengaines, et pourtant on ne s’en lasse pas…

On me demande souvent les clés pour comprendre ma création. Je ne rate jamais un moment qui me semble beau. Par contre, ce n’est pas moi qui vais au-devant de ce moment, c’est lui qui vient à moi.

L’instinct, c’est la résonance de l’inconnu. Je ne m’analyse pas, je suis un spontané, je ne marche qu’avec l’émotionnel. Au niveau des mots, je laisse mon imaginaire complètement libre.

Je cherche en permanence la meilleure couleur du son. Je me vois comme un peintre avec une palette.

Quand on est amateur de synthétiseurs, qu’on est chineur, qu’on est curieux, on cherche autant des machines du passé que des machines modernes, parce qu’on sait que c’est le mélange des deux qui va faire la matière sonore d’un album.

 

5 Replies to “Christophe «Vivre la nuit, rêver le jour» – Souvenirs (2021)”

  1. J’aime bien certaines chansons de Christophe, et leur tonalité spleenétique. Ce sont des mini symphonies du désenchantement et de la nostalgie d’un temps envolé.
    Ces chansons-là traversent le temps, les ailes légères.

    Quant à savoir si X ou Y est sympathique ou pas, pensez qu’un visage est éclairé à l’aide d’une bougie. Il suffit de déplacer la bougie et la part d’ombre ou de lumière va varier…

    1. Tout à fait Jean-Pierre . Mais certaines personnes paraissent plus ou moins sympathiques à l’instinct, même si on peut se tromper !

  2. En concert, il avait une forme d’autodérision, ce qui me le rendrait plutôt sympathique. Mais, nul n’est fait d’un seul bloc 100% sympa ou 100% antipathique.
    Que le livre soit un autoportrait ou pas, cela n’empêche pas que l’auteur de la biographie se trompe sur lui ou sur l’autre, au moins en partie. Je peux me montrer tour à tour indulgent à mon égard et parfois trop critique…
    Pourquoi se fier à un livre et non à son sentiment ?

    1. De fait, je ne l’ai jamais vu en concert mais il ne m’a jamais paru éminemment ouvert et solaire.. Mais il y a plusieurs de ses chansons que j’aime bien et j’ai découvert certaines zones de sa vie avec intérêt

  3. J’ai vu à la télé un concert à la Villa Médicis à Rome, et il ironisait en disant que c’était le moment du concert où le chanteur se levait et faisait mine de s’en aller. Alors le public le réclamait et il revenait. Réclamez-moi tout de suite et ça m’évitera un aller-retour pénible à mon âge.
    Ce n’est pas du mot à mot, mais c’est tout à fait dans l’esprit.
    Comme tu vois, il maniait l’autodérision et se moquait des codes du système.

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