Mayeras, Maud « Hématome » (2006)

Mayeras, Maud « Hématome » (2006)

Auteur : Maud Mayeras est une romancière française, Elle est née le 6.10.1981 à Limoges où elle vit toujours. Son premier livre, « Hématome » est paru aux éditions Calmann-Lévy dans la collection Suspense en 2006. Sept ans plus tard, son second roman intitulé « Reflex » est édité aux éditions Anne Carrière. En 2016 elle publie « Lux »

Calmann-Lévy – 05.04.2006 – 278 pages / Le livre de poche – 28.11.2007 – 312 pages

Résumé : Une jeune femme se réveille péniblement dans une chambre d’hôpital. Elle ne sait ni qui elle est, ni pourquoi son corps la fait autant souffrir : sa mémoire est comme effacée. A son chevet, Karter, son compagnon. Effondré, il apprend à la jeune femme qu’on l’a agressée, puis violée. Il fera tout pour lui redonner le goût de vivre. Dès sa sortie, Emma, assaillie par des flashs terrifiants, tente de reconstituer le puzzle de sa vie. Les questions se suivent et les zones d’ombre apparaissent : qui l’a agressée alors qu’elle attendait un enfant ? Elle dirigeait une affaire prospère ; quel grand malheur a mis un terme à sa carrière ? Son frère et sa mère sont morts ; pourquoi le silence la sépare-t-elle de son père depuis toutes ces années ? Bribe par bribe, les souvenirs ressurgissent, sans apporter compréhension ni réconfort. Emma croise des personnages de plus en plus inquiétants et la mort semble peu à peu tout recouvrir autour d’elle, telle la neige qui prend doucement possession de la ville. Le mystère s’épaissit pour brutalement exploser dans un dénouement aveuglant, comme un flash dans l’obscurité.

Mon avis :

Premier roman publié par Maud Mayeras et premier que je lis.. Grosse impression. Je vais suivre cette auteure !
Hématome évoque des coups.. Et Emma Kazan me fait penser à Elia Kazan… De là à déduire que ce sera le chaos…  Dans le livre de Kasan « L’arrangement », c’est d’ailleurs une quête d’identité, une plongée en soi. Ici c’est Emma qui veut se retrouver et non Gwendoline … C’est toujours Emma qui est en quête d’elle-même sur un lit d’hôpital et non pas Eddie.. Tous les personnages concentrés en un seul ? C’est le récit d’une personne qui cherche à savoir qui elle est, qui tente de faire coïncider son présent et son passé, se reconstruire. Mais tout comme Eddie, Emma a perdu tous ses repères au début du roman et il va lui falloir reconstruire son image au fil des pages. Idem pour Emma. Autour d’elle, il y a des personnes qui sont aux petits soins, et elle va devoir leur faire confiance pour retrouver ses souvenirs … Petit à petit des souvenirs ressurgissent, des questions se soulèvent… quelques doutes, quelques images, des certitudes, des flashs…
Machiavélique. Par moments j’ai l’impression de me retrouver dans les ambiances glauques de Karine Giebel…
Ames sensibles s’abstenir : le suspense psychologique est là, présent et suffocant jusqu’à la fin

Extraits :

La douleur dans mes tempes est lancinante. Comme une vis qu’on ne cesserait de tourner sans jamais pouvoir l’enfoncer tout à fait.

Simple moment où l’univers entier commence à tourner, le début du sommeil paradoxal. Les médicaments jouent tout de même un sacré rôle dans la composition de mon nuage.

Un jour, il faudra qu’on m’explique pourquoi seules les femmes parviennent à fermer leur propre sac.
– Peut-être parce qu’elles ne transforment pas tous leurs vêtements en rouleaux de printemps !

Je découvre enfin le monde extérieur. Comme si je naissais à nouveau. J’ai tout à apprendre. Tout ce que je devais savoir. Avant tout ça.

Une énorme bibliothèque s’impose sur le mur d’en face. Elle déborde de livres. Certains beaucoup plus lus que d’autres. Dévorés même. Presque au sens propre. Tellement abîmés que quelques-uns ont égaré leur couverture.

Je réalise que je suis en train de pleurer entre mes mains, silencieusement. Pourquoi donc se cacher pour pleurer? L’instinct, probablement.

Mon visage va mieux. Tant qu’on apprécie l’œuvre de Francis Bacon.

Il s’est arrêté sur mes cuisses qu’il pétrit avec ardeur, enfonçant légèrement ses griffes à travers mon peignoir. La douleur est infime. Mais les sentiments des animaux sont toujours sincères, alors je le laisse faire.

Plus ma mémoire s’exerce, plus elle a besoin de matière. Des bouts de puzzle tentent de se coller à l’intérieur de ma tête, sans succès pour l’instant. J’essaie tant bien que mal d’attribuer un rôle et une vie à chacun des personnages que j’ai pu croiser, mais cela ne m’aide pas.

Morphée a serré ses griffes de coton autour de mes poignets et m’emporte avec lui dans le doux cyclone qui berce mes sens.

Après cette rasade de souvenirs, mon esprit décide de réintégrer la réalité. Mon réveil est pénible, ma tête douloureuse.

J’ai dormi dans ses bras durant les quelques heures qui ont suivi. Sans que ma mémoire ne fasse irruption dans mon sommeil. Les rêves m’épuisent.

Ma mémoire semble m’offrir de plus en plus de souvenirs. Elle doit vouloir démarrer avec les pires. Elle a plutôt intérêt à se calmer si elle veut que mon cœur tienne la route. Je ne sais pas si je supporterai qu’elle continue comme ça.

Il connaît si bien mes habitudes. Il me guide vers ma vie d’avant. Il réitère, chaque jour, mes anciens gestes, pour qu’ils m’appartiennent à nouveau un jour. Plutôt difficile d’apprendre une vie qu’on ignore.

Chaque élément autour me fait mal, chaque souvenir me tue à petit feu. J’ai l’impression que chaque fois que ma mémoire se réveille, c’est pour me déchirer de l’intérieur.

Les gens ont l’air pressés mais sourient malgré tout. Ce doit être cela que l’on appelle l’esprit de Noël.

La neige crie sous nos pas, et nous restons silencieux en l’écoutant.

Une Porsche Carrera grise. Pas les superbes modèles qui filent à plus de deux cents kilomètres/heure facile, celle-ci est bien trop vieille, ses rhumatismes ne supporteraient pas une telle vitesse.

J’ai la vague impression d’être en phase terminale d’une maladie mortelle et perfide. Je profite de mes derniers moments. Libre.

 

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