Colize, Paul «Concerto pour 4 mains» (10/2015)
Colize, Paul « Concerto pour 4 mains » (10/2015)
Fleuve Editions 363 pages – Prix Arsène Lupin en 2016 – (annoncé en Poche Pocket 09/03/2017)
Résumé : « Cinq bandits de haut vol, deux femmes d’exception, un avocat mythique et… de la musique avant toute chose.
D’un côté Jean Villemont, avocat pénaliste amoureux des sommets et sa consoeur Leila Naciri. De l’autre, Franck Jammet, braqueur virtuose et sa compagne Julie Narmon, aussi discrète qu’efficace. Entre eux, un homme et une affaire. Où se trouvait Franck Jammet la nuit du 18 au 19 février 2013 ? Pourquoi Jean Villemont ne se contente-t-il pas de la version officielle ? Qui a réalisé le casse du siècle ? »
Mon avis : C’est le deuxième livre que je lis de lui. Ma première expérience fut « Back Up » (Prix Saint-Maur en poche 2013), un livre que j’avais trouvé excellent (Un plongeon en arrière, le monde de la musique rock, une intrigue haletante…).
Le début de ce « Concerto » ne m’a pas emballée. Factuel, descriptif, froid, la procédure est très présente et très instructive … aucune émotion juste un compte rendu super documenté et détaillé … Je n’ai pas croché de suite car j’avais l’impression de lire une chronique judiciaire : la construction du casse, minutée, impeccable et les personnages dans leurs rôles de braqueurs. Quelques réflexions frappées au coin du bon sens sur les jeunes et les raisons pour lesquelles ils tournent mal.
C’est une étude de l’implication de l’avocat qui va mener une enquête pour tenter de déterminer ce qui se passe derrière les faits. C’est l’étude de l’itinéraire d’un braqueur de haut vol. C’est l’avancée de la police dans l’enquête. Il faut noter que la trame du roman mêle des braquages avérés et des braquages inventés.. Le réel et la fiction s’imbriquent donc.
Heureusement, en deuxième partie de roman, les personnages se dévoilent et le livre devient plus personnel, l’émotion entre en scène, l’empathie se crée avec l’avocat, le braqueur principal. Des anecdotes et des rencontres se mêlent au roman. Cela se lit très facilement, on ne le lâche pas. La partition est bien jouée, la musique bien choisie, les notes justes et le petit je ne sais quoi qui fait vibrer… ou pas… s’invite au fur et à mesure de la lecture. Donc après un petit bémol au démarrage, je recommande.
(Le romancier s’est inspiré de la vie d’un ancien ennemi public N°1 belge reconverti François Troukens : https://romainhubaut.wordpress.com/2014/11/14/portrait-francois-troukens-de-lombre-a-la-lumiere/ – Son film « Tueurs, la stratégie de la tension » est attendu pour 2017 : http://www.versusproduction.be/films/tueurs-la-strategie-de-la-tension )
Extraits :
Avant, les flics, ils te respectaient. Ils te disaient vous. Les nouveaux, maintenant, ils te parlent comme si tu étais un chien. Ils savent à peine écrire, mais ils se prennent pour des ministres parce qu’ils ont un uniforme et un flingue.
Ils sont de plus en plus jeunes. Quand serons-nous débarrassés de cette racaille ?
Il ne m’en veut pas d’avoir défendu ses agresseurs, mais il voue une haine féroce aux braqueurs, surtout s’ils font usage de leur arme.
— Quand nous mettrons en place des structures qui leur permettront de s’épanouir, de donner un sens à leur vie et d’être fiers d’eux.
Ils se retrouvent à la rue, livrés à eux-mêmes, laissés-pour-compte. Autour d’eux papillonnent des jeunes de leur âge qui portent le blouson ou les chaussures dont ils rêvent, qui utilisent le Smartphone dernier cri dont ils rêvent, qui exhibent leur richesse comme ils cachent leur misère. Ils se regroupent, envisagent un petit coup, puis un autre. C’est l’escalade.
Je salue ceux qui parviennent à sortir de ce cercle infernal, ou à ne pas y entrer. En règle générale, ils ont un projet, des objectifs. Ils ont trouvé un sens à leur vie.
J’ai pris une grande respiration et je suis parti en guerre contre ma moyenneté.
Dès ma première année d’études, le droit pénal me faisait de l’œil. Le pénal a des relents de perversion. Le pénal sent le soufre, l’argent sale, le sexe, le crime, le sang.
Les avocats pénalistes sont comme les urgentistes. En cas de besoin, ils ne posent pas de questions, ils ne tergiversent pas, ils n’évoquent pas la distance, leur jour de congé ou leurs états d’âmes. Ils foncent. Ils réfléchiront ensuite.
Jamais. Toujours. Jamais. Autant de signaux d’alerte que j’ai ignorés. Ils m’apparaissent à présent lumineux.
Ici, vous n’aurez jamais qu’une seule porte ouverte à la fois.
La phrase m’était restée en mémoire.
La privation de liberté se résume à ces quelques mots.
En prison, la liberté se mesure à l’intervalle qui sépare deux portes closes.
la différence entre un avocat qui réussit et celui qui végète est en bonne partie due à la maîtrise d’une science inexacte qui n’est pas enseignée à l’université.
Elle s’appelle le feeling, le flair ou l’intuition.
La seule maîtresse que j’ai connue est mon travail. Je ne sais pas si je suis un amant passionné ou une catastrophe horizontale.
J’ouvre les yeux.
Un sentiment de plénitude m’envahit. Je me raccroche au rêve qui s’effiloche.
En musique, un concerto est une forme de dialogue entre un soliste et un orchestre. L’idée m’est venue d’écrire un concerto pour quatre mains. Un piano qui dialogue avec un piano.
Après ces quelques échanges, l’orage gronda, une cascade d’accords déferla et les spectateurs se figèrent.
Le premier tiers de la pièce était rageur, chargé de hargne et de révolte. Le vent soufflait, les flots se fracassaient contre les rochers, la tempête se déchaînait.
Ensuite vint l’accalmie.
2 Replies to “Colize, Paul «Concerto pour 4 mains» (10/2015)”
Ah ben voilà, tu l’as fini itou.
Perso, je n’ai pas ressenti le début comme toi 😉
J’ai démarré tout de suite dedans… peut-être parce que ça concerne mon plat pays ?
En première partie ,j’ai eu le même ressenti que toi Catherine,en deuxième partie l’histoire arrive ,avec beaucoup d’émotions parfois contradictoires ,mais le livre devient captivant et on ne le lâche que difficilement .
Je vais lire d’autres livres de ce écrivain .