Gruen, Sara « De l’eau pour les éléphants » (2007) 471 pages

Autrice: Sara Gruen est une romancière canadienne ( et américaine) née à Vancouver en 1969. Ses livres traitent principalement des animaux1, qu’elle affectionne. Auteur de deux premiers romans, La Leçon d’équitation (Riding Lessons) en 2004 et Parcours sans faute (Flying Changes) en 2005 , elle se fait connaître du public avec l’édition de son troisième livre, De l’eau pour les éléphants (Water for Elephants) en 2006, qui devient numéro un du classement des meilleures ventes du New York Times. Ce best-seller est publié dans le cadre du National Novel Writing Month, un concours littéraire qui consiste à écrire un roman de 50 000 mots en un mois. Le quatrième roman de Gruen, La Maison des singes, (Ape House) est sorti en 2010, suivi de Au bord de l’eau (At the water’s edge) en 2015

Le réalisateur Andrew R. Tennenbaum a acquis les droits d’adaptation du roman au cinéma pour un montant de plus d’un million de dollars. Le film est sorti en 2011 avec Reese Witherspoon, Peter Pattinson, Christoph Walt… 

Albin-Michel – 16.05.2007 – 402 pages / Livre de poche, 03.06.2009 – 471 pages (traduit par Valérie Malfoy)

Résumé:
Ce roman pas comme les autres a une histoire exceptionnelle : en quelques mois, il a fait d’un auteur inconnu un véritable phénomène d’édition, le coup de coeur de l’Amérique. Durant la Grande Dépression, dans les années 1930, les trains des petits cirques ambulants sillonnent les États-Unis. Jacob Jankowski, orphelin sans le sou, saute à bord de celui des frères Benzini et de leur « plus grand spectacle du monde ». Embauché comme soigneur, il va découvrir l’envers sordide du décor. Tous, hommes et bêtes, sont pareillement exploités, maltraités.Sara Gruen fait revivre avec un incroyable talent cet univers de paillettes et de misère qui unit Jacob, Marlène la belle écuyère, et Rosie, l’éléphante que nul jusqu’alors n’a pu dresser, dans un improbable trio.Plus qu’un simple roman sur le cirque, De l’eau pour les éléphants est l’histoire bouleversante de deux êtres perdus dans un monde dur et violent où l’amour est un luxe.

Mon avis:
Cela faisait des années qu’il traînait dans ma Pal. Et pourtant j’avais pensé le lire après que ma soeurette N@n en ait dit le plus grand bien… Voilà… je l’ai enfin lu et beaucoup aimé. 

Au centre de ce roman, la vie de Jacob, vétérinaire dans un cirque itinérants aux Etats Unis durant la Grande Dépression. L’autrice a truffé le roman de vraies histoires ( le vol de citronnade, l’éléphante et son cornac qui ne se comprenaient pas, le drame du whisky frelaté) .
Ce voyage nous fait visiter les coulisses des cirques, la ménagerie, la vie des artistes en déplacement perpétuel, la cohabitation entre les artistes et les employés.
A cette époque, pour être un cirque reconnu – la référence de l’époque étant le cirque Barnum – il faut avoir des monstres humains à exhiber et des éléphants… en plus de tout le reste..
La magie des spectacles – maintenant c’est assimilé à de la maltraitance – c’est le dressage des animaux : les chevaux, les fauves, les éléphants. Et dans ce cirque, la vedette, celle qui est vêtue de paillettes et est le clou des spectacles, c’est la belle Marlène qui elle, tout comme Jacob, aime les animaux.
Et l’envers du décor, c’est bien la maltraitance, et pas uniquement celle des animaux!  Le jeune Jacob, qui va prendre le train en marche et se retrouver engagé pour soigner les animaux va en faire la cruelle expérience. Il va – malheureusement pour lui – tomber amoureux de la belle Marlène  qui est mariée à un homme violent et jaloux et se trouve être le responsable des animaux. Quant au propriétaire du cirque, c’est un homme qui exploite les employés et n’hésite pas à s’en débarrasser…
Dans ce récit à la fois historique, sociétal et roman d’amour, Jacob va risquer sa vie à plusieurs reprises, par amour ou par amitié.
Et maintenant qu’il est à la fin de sa vie, seul dans une maison de retraite, les souvenirs affluent, il se souvient. C’est également un livre qui aborde la manière dont sont traitées les personnes âgées dans leurs résidences spécialisées et à quel point certains s’y sentent terriblement mal, surtout quand ils ont encore toute leur tête et que tout le monde semble considérer que l’âge est une maladie… 

Et enfin  une fin qui allume toutes les lumières de la piste aux étoiles et permet de rêver encore un peu à l’humanité de certaines personnes… 

Extraits:

On se met à oublier des mots : ils sont sur le bout de votre langue – et le hic, c’est qu’ils y restent ! On va chercher quelque chose, et en cours de route, on ne se rappelle pas quoi. On appelle un enfant par le nom de tous ses frères et sœurs et même celui du chien, avant de tomber sur le bon. Parfois on oublie quel jour on est. Et pour finir, l’année.

Sa mort fut un arrachement. Ce jour-là, ce fut le commencement de la fin pour moi, et je préfère qu’elle n’ait pas personnellement connu cela. Survivre à son conjoint, c’est le pire.

L’endroit « d’où l’on est », est-ce la dernière adresse en date, ou bien là où sont nos racines ?
— De nulle part.

Doux Jésus, comme elle me manque ! Et pas seulement parce que, si elle était encore en vie, je ne serais pas dans cet établissement. Malgré notre commune décrépitude, on aurait veillé l’un sur l’autre, comme toujours. 

Je plaisantais !
— Je sais ! Vous allez m’accuser, en plus, de ne pas avoir le sens de l’humour ?
Grande Dépression

Grande DépressionMais je suis grincheux, car je ne l’ai peut-être plus, en effet. C’est à se demander… Je suis si habitué à être grondé, materné et manipulé que je ne sais plus comment réagir quand on me traite en être humain.

— Parfois, quand on vieillit – et je ne parle pas de vous, je parle en général, car chacun vieillit à sa façon – on finit par prendre ses désirs pour la réalité. On croit avoir réellement vécu certaines choses, et si jamais quelqu’un tente de vous détromper, on s’en offusque. Car tout ce qu’on voit, c’est qu’on s’est fait traiter de menteur. 

Photo : photo prise en Tanzanie (Ruaha River)