Croubalian, Mélanie « Azad » ( 2023) 232 pages

Autrice:

Mélanie Croubalian est une journaliste suisse bien connue : elle anime chaque semaine une émission Le grand soir. D’origine suisse et arménienne, elle parle plusieurs langues en plus du français. Née au Canada d’une mère suisse et d’un père arménien d’Égypte, Mélanie Croubalian a grandi entre Genève et le Caire. Elle  vit et travaille à Lausanne, où elle anime et produit depuis près de  vingt ans de nombreuses émissions pour la RTS. Sa recherche de ses racines, comme chrétienne d’Orient, soit catholique d’Arménie, a donné son premier roman : Azad. On y découvre la sensibilité extrême de cette femme qui a creusé sa voie (voix)  à la Radio Télévision Suisse.

Slatkine – 20.02.2023 – 232 pages

Résumé:

Alep, septembre 2015. Le matin de ses vingt ans, Nayef quitte sa  ville sous les bombes. Le conflit qui déchire la Syrie le laisse orphelin  et le pousse sur la route de l’exil. Dans le sac qu’il emporte à la hâte, il découvre un carnet manuscrit. Sur la couverture, un seul mot : AZAD. D’où vient ce journal ? Qui l’a rédigé?
D’Alep à Calais, sur la route périlleuse empruntée par des milliers de migrants, Nayef découvre que le voyage le plus bouleversant n’est peut-être pas celui qu’il croit…

Mon avis:

Quel magnifique roman, poignant, humain, qui frappe aux tripes et au coeur. Coup de coeur.
On est immédiatement dans le vif du sujet. A Alep, sous les bombes, pris en tenailles entre les troupes de Bachar et les combattants islamiques. Le jeune Nayed se réveille et tout s’effondre, littéralement et psychologiquement. Lui qui a déjà perdu ses parents sent son immeuble vaciller puis descendre… et en plus de perdre sa maison, sa grand-mère, son grand-père et sa soeur ne survivent pas au bombardement. Il a juste le temps de s’enfuir avec pour tout bagage le sac de survie que la grand-mère avait préparé à son intention dans les sous-sols, entreposé en cas d’urgence. Le voilà seul et sous le choc, à la gare routière, en route pour un long voyage. Là il va retrouver deux de ses amis, dans la même situation, et ils vont entreprendre ensemble le périple à destination de l’Europe, ou pas…

Dans le sac préparé avec amour par sa grand-mère, il trouve un carnet : le journal intime d’un homme dont il ignore tout. Ce journal date de 1915 et retrace le parcours d’un médecin arménien.
Un long chemin semé d’embuches attend nos 3 amis : atteindre la frontière turque, Izmir.. et la suite. Un voyage qui fait frémir. Azad, l’homme du carnet, va l’accompagner tout au long du périple. Lui aussi a fait un long voyage, un siècle auparavant, mais dans l’autre sens, pour rejoindre sa famille.  Les deux chemins vont se croiser, à un siècle d’intervalle…
Je vous laisse en compagnie de ces personnages attachants, qui vont aller au bout d’eux-mêmes pour rejoindre leur terre promise.
Un livre magnifique sur les migrants, sur l’exil, sur les drames de la guerre, des religions, de la haine et de la violence… Et qui met en lumière ceux qui n’ont d’autre choix que de tout quitter. Lisez ce livre et vous comprendrez une fois encore que l’exil est survie…
Et ce livre est lumineux, un message d’espoir, même si la traversée et tout ce qui est resté derrière est souffrance … Mais aussi souvenirs qui illuminent et portent vers l’avenir… Et le tout avec une grande place faite à l’amitié, à l’amour, écrit avec sensibilité et humour !

Je remercie les Éditions Slatkine qui m’ont fait découvrir Mélanie Croubalian en tant qu’autrice.

Extraits:

Quand tout est à reconstruire, on peut s’inventer une vie idéale, un peu comme lorsque l’on vient de s’acheter un billet de loterie. Jusqu’au tirage, tout est possible

… il sait que s’il veut s’en sortit vivant il n’y a pas de place pour la nostalgie, le regret ou la culpabilité. Il faut simplement avancer, ne pas se poser de questions, on soignera de l’âme quand on aura le temps d’y penser.

Pour ces migrants dans leur canot, ce sera vue sur la mer obligatoire avec noyade en option.

Certains sont trop occupés à survivre au jour le jour pour avoir le temps de penser à l’après.

Tu sais qu’on a une sacrée expérience maintenant, on pourrait rédiger un Lonely Planet du migrant . 

Nous avons tous une lumière en nous. Il faut la laisser briller, cette lumière intérieure éclaire même la plus sombre des nuits. Tout ira bien