Marny, Dominique «Quai de la perle» (2019)

Marny, Dominique «Quai de la perle» (2019)

Autrice : Dominique Marny est née à Paris. Elle y a toujours vécu. Actuellement, elle habite dans une rue animée et pittoresque du Ve arrondissement.
Après la naissance de sa fille, elle commence à écrire et à publier. Ses premiers romans Crystal Palace, Les Fous de Lumière, Les Désirs et les Jours mêlent fiction et réalité pour raconter la vie des peintres impressionnistes.

Son éditeur lui demandant une biographie consacrée à Jean Cocteau, son grand-oncle, elle préfère évoquer les femmes qui ont accompagné et inspiré le poète. Ce sera Les Belles de Cocteau. Quelques années plus tard, elle y ajoutera un album illustré : La Belle et la Bête, les coulisses du tournage. L’écriture ne lui fait pas oublier les voyages. Plusieurs séjours en Inde lui inspirent Darjeeling et Du Côté de Pondichéry. Dans Les Nuits du Caire, elle évoque une Egypte moderne et moins explorée que celle des pharaons. Avec Cap Malabata, elle entraîne ses lecteurs au Maroc.

Ses romans : “Courtisanes” (1994) – “Darjeeling” (1996) – “A l’ombre des amandiers” (1997) – “La rose des vents” (2000) – “Les nuits du Caire” (2001) – “Du côté de Pondichéry” (2002) – “Le regard du sphinx” (2002) – “Cap Malabata” (2003) – “Le roman de Jeanne” (2003) – “Et tout me parle de vous” (2004) – “Mes nuits ne sont pas les vôtres”(2005) – “Jouez coeur et gagnez” (2006) – “Du côté de Bombay” (2007) – “Les fous de lumière : Hortense” (2008) – “Les fous de lumière : Gabrielle” (2008)- Il nous reste si peu de temps, Presses de la Cité, 2009 – La Conquérante, Presses de la Cité, 2010 (nouvelle édition) – J’ai cherché celui que mon cœur aime ( 2011)  – Crystal Palace(2012) – Les Pêcheurs de lune  (2014) – Jeux de clés (2016) – « Quai de la perle » (2019)

Presses de la Cité – 16.05.2019 – 380 pages

Résumé : 1925. Dinard, sa vie balnéaire, ses casinos, sa végétation luxuriante et ses régates… Un cadre enchanteur et cosmopolite qu’affectionne Alice, qui, en quête de beauté et de modernité, décide de créer sa marque de papiers peints. Au coeur des Années folles, ne doit-elle pas croire en sa bonne étoile ? Stimulée par diverses rencontres artistiques, de durables amitiés et de tumultueuses amours, elle forgera son destin dans un monde où se profileront bientôt des menaces.
Dominant la mer, la villa Margarita sera son plus sûr refuge en cas de fortes tempêtes. A travers les engagements et les choix d’Alice se révèlent le charme, la notoriété et les fastes de Dinard, perle de la côte d’Emeraude…

Mon avis : J’aime bien lire de temps en temps ces romans « de filles » romanesques, romantiques ; on se laisse porter par l’histoire, dans un joli cadre avec des descriptions précises et qui nous transportent dans un autre monde, un autre cadre…Je visite la Bretagne dans les années 20 et 30 : Saint Malo, Dinard. L’histoire d’une femme qui souhaite travailler, l’émancipation de la femme, les années folles, la vie dans les stations balnéaires.  Le contexte historique est aussi intéressant : une époque charnière marquée par la crise de 29, la Guerre d’Espagne, les signes avant coureurs et la plongée dans la IIème Guerre Mondiale. C’est de la jolie romance, avec de l’amour, des passions, des héroïnes pleines de charme.

Extraits :

Il y avait des habitations bénéfiques, d’autres pas. A plusieurs reprises, elle avait ressenti un malaise diffus lorsqu’elle s’était rendue chez des connaissances. Les murs gardaient-ils en mémoire des événements néfastes ? Leurs habitants les polluaient-ils avec leurs propres tourments ? Etait-elle plus sensible que d’autres aux atmosphères ?

— On ne choisit pas sa famille. Chez nous, c’est un naufrage !

Avant le repas, Alice avait rangé ses effets dans l’armoire et la commode, disposé ses brosses et peignes en écaille sur la coiffeuse… ainsi que son vaporisateur de voyage qui contenait Shalimar, le nouveau parfum de Guerlain. Accrochés aux murs vert d’eau, plusieurs tableaux offraient des scènes de plage qui rappelaient l’univers de Raoul Dufy.

Dans un mélange de bois, de céramiques, de fer forgé et de verre, les volumes épurés de l’Art déco enterraient la Belle Epoque.

Lorsque son fils rentrerait pour de brèves escales, elle chercherait sur ses traits ce qu’il avait vécu loin d’elle : le bon et le mauvais, les joies simples et l’inattendu, le désir d’un ailleurs jamais assouvi.

Pragmatique, il profitait pleinement de ce qui lui était donné. La vie sur terre débouchant sur le néant, il fallait la mener comme on l’entendait, loin des préceptes religieux et des diktats de la société. Comment faisait-il pour ne pas être contaminé par les esprits formatés ? Sans doute avait-il raison. Elle ne devait pas se morfondre ou perdre espoir…

Conscients de jouer avec le feu, ils savaient déjà qu’ils ne renonceraient pas à se brûler.

Alors que les minutes s’écoulaient, elle se sentait à l’aise avec lui dans ce lieu qui n’était pas lié à son passé. Loin de leurs histoires personnelles, ils foulaient une terre vierge.

Depuis son départ, elle avait l’impression de vivre au ralenti. Comme s’il avait tout emporté. Incapable de voir des amis, elle se promenait dans les endroits où ils étaient allés, s’installait aux mêmes tables de café, furetait chez les bouquinistes qui avaient attiré leur attention… Ce qu’elle traversait lui était inconnu. Etait-ce ce que l’on nommait la passion ? Cette sensation de manque qui la rongeait, ce besoin de se raccrocher à ce qu’ils avaient partagé, cette brûlure au ventre, cette stupide envie de pleurer qui la submergeait sans crier gare ?

Elle avait été trop longtemps naïve en pensant que les sentiments avaient une part d’immuabilité. Rien n’était écrit dans une relation. A l’impondérable s’ajoutaient les tracas de toutes sortes qui créaient les malentendus, égaraient, détruisaient.

Mieux que quiconque, il comprenait l’importance des mondes que l’on portait en soi. Les siens étaient constitués d’impressions plus ou moins tenaces ou fugaces, mais il ne savait pas les restituer.

L’année 1938 commença. Avec Nicole, elles se rendirent à la première Exposition internationale du surréalisme à Paris. Organisée par Paul Eluard, André Breton et Marcel Duchamp, elle se tenait à la Galerie des Beaux-Arts, rue du faubourg Saint-Honoré. Deux cent ving-neuf œuvres de soixante artistes y défiaient le rationalisme. Dans la cour d’entrée, elles furent surprises par le Taxi pluvieux de Salvador Dalí dont le chauffeur avait la tête recouverte d’une mâchoire de requin. Seize mannequins les accueillirent dans un corridor transformé en « rue surréaliste », chacun d’entre eux étant habillé par Jean Arp, Yves Tanguy, Man Ray, Miró, Max Ernst…

Image : Dinard – Le Casino et le Grand Hotel Royal  (Cote d’Emeraude autrefois)

3 Replies to “Marny, Dominique «Quai de la perle» (2019)”

  1. Une jolie histoire qui, pourtant, ne m’a pas fait vibrer. Probablement parce que certains des moments forts de la vie d’Alice n’ont pas été décrits, l’auteure préférant sauter plusieurs années entre deux chapitres. Pour ne pas les avoir vécues avec elle, je n’ai pas pu ressentir les joies et les douleurs d’Alice et je n’ai donc pas pu m’attacher à elle. Même le dénouement échappe à l’héroïne. J’ai donc refermé ce roman avec un petit goût de trop peu.

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