Manzini, Antonio «Froid comme la mort» (2016)

Manzini, Antonio «Froid comme la mort» (2016)

 

Série : Commissaire Rocco Schiavone – tome 2

Auteur : né le 7 août 1964 à Rome, est un acteur, un réalisateur, un scénariste et un écrivain italien. Comme auteur de roman policier, il est notamment connu pour sa série de romans consacrés au commissaire Rocco Schiavone. Antonio Manzini grandit à Rome. Il suit les cours de l’Académie nationale d’art dramatique de la ville et débute comme acteur au théâtre.

À la fin des années 1990, après s’être essayé à la réalisation, il prolonge sa carrière d’acteur à la télévision et au cinéma, s’imposant notamment dans plusieurs séries télévisées à succès en Italie. En 2004, il écrit avec Niccolò Ammaniti le scénario du giallo Il siero della vanità d’Alex Infascelli, travail qui marque le début de sa carrière d’écrivain et de scénariste.

Il publie en 2005 son premier roman, Sangue marcio. En 2008, il collabore à nouveau avec Ammaniti pour l’adaptation de son roman Comme Dieu le veut (Come Dio comanda) pour le cinéma qui devient sous la caméra de Gabriele Salvatores le film Come Dio comanda (film) (it). En 2013, il participe à l’écriture du scénario de la comédie I 2 soliti idioti (it) d’Enrico Lando (it). Il signe également plusieurs épisodes de séries télévisées

La même année, il imagine le personnage de Rocco Schiavone dans le roman policier Piste noire (Pista nera). Commissaire (ou sous-préfet) de police à Rome, il est sanctionné et muté à Champoluc, un village de montagne situé dans la vallée d’Aoste. Pour sa première enquête, il doit résoudre le meurtre d’un homme inconnu retrouvé écrasé sous une dameuse. Succès critique et public en Italie, ce livre marque le début de plusieurs romans consacrés aux aventures de Schiavone.

En France, le premier titre est traduit par les éditions Denoël dans la collection Sueurs froides en 2015.

 

Série : Commissaire Rocco Schiavone

Tome 1 « Piste noire » (Pista nera ) (Folio policier n° 792- 2016 304 pages) – Tome 2  : « Froid comme la mort » (La costola di Adamo )(Folio policier 832, 2017, 304 pages ) – Tome 3  : «Maudit printemps» (Non è stagione ) – Tome 4  «Un homme seul » (Era di maggio) – Tome 5  «07-07-07» (07-07-07) – Non traduit Pulvis et umbra (2017)

Cette deuxième enquête de Rocco Schiavone, vice-préfet râleur, macho et doté d’un humour cinglant, ravira les amoureux du commissaire Montalbano, de l’Italie et des polars à l’humour grinçant.

Résumé : Rocco Schiavone a une nouvelle affaire sur les bras, et il est bien décidé à la régler presto. Beaucoup de choses irritent le vice-préfet Rocco Schiavone dans la vie : sa mutation à Aoste un an plus tôt, le ciel gris, la neige qui s’insinue dans ses Clarks, la bêtise de ses agents, la fête d’anniversaire de sa maîtresse, la course cycliste du préfet, sans parler des inspecteurs qui entrent dans son bureau quand il fume son joint matinal… Mais le comble des emmerdes, c’est une affaire de meurtre. Lorsque le corps d’Ester Baudo est retrouvé pendu dans son salon par sa femme de ménage, Rocco comprend vite qu’il ne s’agit pas d’un suicide mais d’une mise en scène. Et donc qu’il en est quitte pour une sacrée quantité d’ennuis. Or, quand Rocco Schiavone est de mauvaise humeur, ses méthodes deviennent pour le moins expéditives…

Avec son humour noir ravageur, ses dialogues cinglants et une vraie sensibilité en prime, cette nouvelle enquête de Rocco Schiavone est un bonheur pour les amateurs de polar à l’italienne.

Mon avis : Bien fait de continuer à découvrir Aoste en compagnie de Rocco Schiavone. Le deuxième est nettement supérieur au premier à mon avis. Toujours aussi politiquement incorrect, Rocco devient un peu plus attachant, toujours fâché contre le monde entier, et avec lui en premier lieu. De fait il est révolté et malheureux, et vivre dans le froid et la neige a tout pour le rendre encore plus irascible et désagréable. Il est caricatural des Romains magouilleurs, violents, grandes gueules. De plus l’intrigue est nettement mieux ficelée et le dénouement totalement inattendu. On en apprend aussi un peu plus sur son passé et sur ses fréquentations. Le binôme avec son collègue Italo se consolide et les autres policiers sont de plus en plus hallucinants. J’aime bien cette manie de Schiavone de trouver des correspondances entre les visages et les animaux. Au niveau des qualités : la fidélité en amitié, l’intelligence, instinct.

Extraits :

Un homme a beaucoup de saisons
tandis qu’une femme a seulement
droit au printemps.
Jane FONDA

À Rome deux flocons et ça y est, il y a plus de morts que lors d’un exode de la mi-août.

Juste au moment où le vent cessa et où une petite pluie fine, aussi froide que la main d’un mort, se mit à marteler l’asphalte,

Son humeur avait changé aussi vite que le vent d’altitude, qui apporte sans prévenir des nuages noirs gorgés de pluie là où juste avant le soleil brillait

Les doigts glaciaux du vent lui frictionnaient le crâne. Il le paierait sûrement d’une sinusite et d’une douleur aux cervicales.

Qu’il est pesant d’entretenir des relations humaines. Il faut de l’implication, de l’application, être disponible et surtout sourire à la vie.

Rocco avait le vice de comparer les visages des hommes aux traits de certains animaux. Cela remontait à son enfance. À un cadeau que lui avait offert son père pour ses huit ans : une encyclopédie des animaux enrichie d’une section de splendides dessins datant de la fin du dix-neuvième siècle représentant de nombreux oiseaux, poissons et mammifères.

Il cachait derrière les mots la douleur qui n’était pas encore arrivée clairement dans sa tête et dans son cœur.

— J’ai beaucoup entendu parler de vous, lui dit-il avec emphase.
— Et vous me serrez quand même la main ?

Elle disait que quand les seins ne pointent plus vers les étoiles mais vers les pieds, il faut pouvoir se payer des chaussures très coûteuses !

C’était sans doute l’habitude du froid et de ces températures qui modelait l’estomac des habitants du lieu, qui de toute évidence brûlaient les calories comme des cheminées.

je parlais de Hegel, le philosophe. Mais bon, qu’est-ce que tu en sais, toi ? Bref, ce type disait que le journal était la prière laïque du matin.

Quand on se met au lit le soir, elle est froide et moi je suis chaud. Ensuite, pendant la nuit, elle me vole toute la chaleur et elle me laisse dans ma moitié de lit, seul et congelé. Le matin elle est chaude et pas moi.

 Au lieu de laisser la relation s’éteindre par euthanasie douce et silencieuse, il lui faudrait affronter un combat dont jamais personne ne sort gagnant ni perdant.

C’est terrible, la vieillesse. La vieillesse, c’est la vengeance des moches. C’est un vernis qui tue toute la beauté et anéantit les différences.

Dès qu’il fermait la porte, le passé refaisait surface. L’appartement se peuplait de pensées aussi denses que de l’huile, qui ne lui laissaient aucune possibilité ni de lire un livre ni de voir un film à la trame trop compliquée. La nostalgie, le passé, la vie qui n’était plus prenaient le dessus et les livres restaient sur la table de nuit, dans la bibliothèque, intacts, et il les regardait se couvrir de poussière de jour en jour.

je lis beaucoup. Et j’observe.
— C’est un club de lecture ou un salon de coiffure, que tu tiens ?
— Tous les aspirants écrivains, dans le fond, sont des commères.
— À Rome on les appelle autrement.
— Des fouille-merde ?

On dit qu’en général, avec le temps, les visages de nos proches se cachent peu à peu dans la brume des souvenirs. Qu’on confond les traits, la couleur des yeux et des cheveux, la taille et surtout le son de la voix.

Mais une mère et un père qui perdent leur enfant ont plus droit à la douleur qu’un mari qui perd sa femme. Ils ont la priorité.

Le pardon ne sert à rien, parce que quand l’espoir meurt rien ne sert plus.

La vengeance est un plat qui se mange froid, se dit-il, et même congelé, quand on vit à Aoste.

 

Info : Les Erinyes ou Erinnyes : divinités très anciennes, déesses chthoniennes de la Vengeance du crime. Elles ne reconnaissaient pas l’autorité des dieux de la nouvelle génération et n’avaient d’autre lois que les leurs. Elles furent identifiées plus tard aux Furies (ou Dirae) chez les Romains.

En savoir plus : https://mythologica.fr/grec/erinnyes.htm

 

 

 

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