Black, Benjamin «Les disparus de Dublin» (2011)

Black, Benjamin «Les disparus de Dublin» (2011)

Quand un grand écrivain (John Banville, Booker Prize 2005 pour La Mer) se lance dans le roman noir sous le nom de Benjamin Black, cela donne un des policiers les plus excitants de ces dernières années.

Editions 10/18 Domaine policier

SERIE : QUIRKE, médecin légiste

Quirke 01 – Les disparus de Dublin

Résumé : Dublin, années 1950. Quirke, médecin légiste et handicapé du coeur qui noie ses questionnements dans la bière et le whisky, découvre un soir son beau-frère assis à son bureau, à la morgue. Ce dernier, surpris et visiblement gêné, dissimule à la hâte un dossier ? en réalité l’acte de décès d’une jeune femme qu’il était en train de falsifier. Quirke entr’aperçoit le cadavre. Le lendemain, quand il revient à son bureau, le dossier a disparu, le corps s’est envolé… Et voilà Quirke embarqué dans une enquête qui va dynamiter la haute société catholique de Dublin. Et gangrener l’âme de sa propre famille, réveillant ses tourments les plus enfouis…

Mon avis : Ah que j’ai aimé ! Je vais enchainer sur la suite. J’ai dévoré le premier volet de cette série mettant en scène le médecin légiste Quirke et sa famille. J’ai fait connaissance avec un personnage atypique mais terriblement irlandais si on se fie aux clichés (il boit, il fume… je ne me souviens pas si il est roux ?…) et avec sa famille.. loin d’être une gentille petite famille unie. Une famille mêlant des Irlandais à des Américains, et qui se passe à cheval entre l’Irlande et l’Amérique (Boston) où les irlandais catholiques ont débarqué en masse pour fuir la répression anglicane il y a longtemps. L’histoire se situe dans le Dublin des années 50. Quirke est un personnage qui est entré par adoption dans une famille riche et reconnue mais qui vit en marge de la bonne société ; personnage torturé, il va mettre les pieds là où il ne fallait pas… et cela ne va pas plaire du tout à sa famille… Il va s’obstiner à élucider les raisons pour lesquelles le dossier d’une jeune femme décédée a été falsifié par son frère… et cela va l’entrainer à fourrer son nez dans des affaires pas jolies jolies.

Comme j’avais beaucoup aimé l’écriture de John Banville, je suis ravie de la retrouver dans les descriptions sous la plume de Benjamin Blake.

 

Extraits :

un nuage bleu foncé à l’aspect malveillant grimpait furtivement dans le ciel et bridait la lumière d’un soleil encore invisible.

Il éclata de rire et se rejeta encore plus en arrière si bien que la petite chaise poussa un cri de protestation.

Oui, il était fasciné par le mystère muet des défunts. Chaque corps véhiculait son secret unique – la cause précise de son décès –, secret qu’il lui incombait de découvrir. Pour lui, l’étincelle de mort était largement aussi vitale que l’étincelle de vie.

Le vieux serveur dans son queue-de-pie lustré s’occupa d’eux avec la solennité onctueuse d’un placeur à un service funèbre.

ses pensées lui donnaient la sensation de voler en éclats telles les pièces d’une machine qui cède sous l’effort.

Il avait la sensation d’entamer une partie d’échecs dans laquelle il serait à la fois joueur et pion.

Dehors, le brouillard givrant obscurcissait l’après-midi déjà sombre, les jardins ornementaux disparaissaient sous la neige et l’océan dessinait une ligne de plomb à l’avant-plan d’un front de brouillard lavande. Par moments, un carré de neige de la taille d’un bout de vitre glissait du toit et se pulvérisait ou bien cascadait dans un silence spectral le long de la verrière avant de se perdre dans les congères qui s’amoncelaient déjà au bord de la pelouse, blanc sur blanc.

Il lui restait si peu d’avenir que désormais ses préoccupations se focalisaient principalement sur le passé.

Il avait eu peur mais de manière distanciée, comme si sa peur avait généré une autre version de lui-même dans laquelle elle se serait installée et que lui, le lui d’origine, était contraint de veiller sur cet autre moi, celui qui avait peur, de s’inquiéter pour lui, comme il l’aurait fait, présumait-il, pour un jumeau ou un fils adulte.

La mort représentait son domaine professionnel, pourtant qu’en connaissait-il au juste ? Eh bien, apparemment il allait maintenant recevoir des informations de première main sur ce sombre chapitre.

Le Seigneur appose son sceau sur chaque âme – il lâcha un rire haché –, même si elle est noire comme la tienne.
— J’ai disséqué beaucoup de cadavres dans ma vie mais je n’ai jamais trouvé l’endroit susceptible d’abriter l’âme en question.

Pour lui, la mort avait subitement perdu son prestige terrifiant et ne se résumait plus qu’à un autre élément, le dernier certes, de cette banale affaire qu’était la vie. Pour lui, la mort avait subitement perdu son prestige terrifiant et ne se résumait plus qu’à un autre élément, le dernier certes, de cette banale affaire qu’était la vie.

Je suis un planteur. Il y a des gens qui plantent des graines, d’autres des arbres… moi, je plante des âmes. »

« J’étais mal au pays, c’est d’ailleurs pour ça que je suis partie. »
Regardant droit devant elle, elle ne voyait pas ce lieu-ci mais l’autre ailleurs, de même qu’elle ne voyait pas le présent mais le passé.

Ça va produire beaucoup de poussière, si on abat ces piliers de la société. Beaucoup de poussière, de briques, de gravats. Il serait sage de se tenir à distance.

 

Info : Immigration irlandaise: https://www.guide-irlande.com/culture/emigration-irlandaise-etats-unis/    – http://www.maxicours.com/se/fiche/7/6/276076.html

 

 

Série : Quirke

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