Nimrod « Gens de brume » (2017)

Nimrod « Gens de brume » (2017)

Auteur : Poète, essayiste et romancier, Nimrod est né au Tchad et vit en France depuis plus de vingt ans. Après Les Jambes d’Alice (2001 ; Babel n° 864) Le Départ (2005), Le Bal des princes (2008), Un balcon sur l’Algérois (2013) est son quatrième roman de publié par Actes Sud.
Récemment chez Actes Sud : L’Or des rivières (recueil de récits poétiques, 2010).
Son oeuvre poétique est publiée aux éditions Obsidiane.

Paru dans La Collection « Essences » d’Actes Sud – Octobre 2017 – 64 pages

Résumé : Je suis seul avec la montagne, avec la vigne, avec le chemin, avec ce bleu, là-bas, qui ne demande qu’à être surpris. Je sais que les oliviers sont dans la même disposition. Les champs, les animaux, la Provence.
Ma maison se situe sur une petite colline au-dessus de Sauve. Sa pente est douce. La vigne la couvre entièrement. Sur sa face ouest, une forêt de chênes court à l’infini. C’est là que le crépuscule m’a surpris.

L’Afrique, encrage du poème, des réminiscences du temps fragile de l’enfance. Un temps retrouvé dans l’évocation des parfums, des odeurs de sucre et de peau, les odeurs du fleuve, celles de la boue. Entre le poème et la prose Nimrod ne choisit pas. Sa langue est une voie dérobée où marchent depuis trente ans ses Gens de brume aux lisières de l’aube.

Mon avis : Comme j’ai été contente de retrouver les senteurs de la collection Essence. Ce petit texte m’a permis de découvrir l’univers poétique et sensuel de Nimrod. Comme il le dit si joliment il a atteint le Sud de son être. Un parcours qui nous entraine de l’Afrique à la France, au gré des réminiscences olfactives et visuelles de Nimrod. Des bords du fleuve à la Provence, de l’odeur de la brume africaine à celle du coucher de soleil gardois… en passant par la magie des saveurs … Un petit bijou une fois de plus que le texte proposé par « Essences ».

Extraits :

Elle s’exhalait, tel un parfum de grand prix, pour ces lycéens qui à raison de cinq ou six heures par jour se trouvaient à l’abri de leurs langues maternelles, de leurs tribus, de leurs coutumes, pour vibrer aux délices d’une langue chère entre toutes : le français. Il explorait notre futur et, par là, nous enseignait les ressources de l’amour.

“Cette excroissance m’a rendu sensible aux belles-lettres. Je la bénis. Mes frères, ce n’est pas un nez, c’est un thermomètre. Je sens vos phrases avant que vous les formiez, je sens l’eau de leur gestation, je sens leur marinade, je sens leur montée en régime, je sens leur extase entre terre et ciel.”

L’accoutumance neutralise les sensibilités. C’est comme les étoiles. Nous oublions qu’elles sont en nous. Quand vient le soir, tels ceux des gosses, nos yeux errent à la face du ciel comme pour y fixer leur lumière.

L’or et les couleurs sont les seules matières dédiées aux mains artistes pour qu’elles traduisent pour nous le paradis qu’aucun dieu ne nous offrira jamais.

Je crois au Saint-Esprit tel que le représentent les peintres de la Renaissance dans les fresques des églises de Florence, de Sienne, d’Agrigente… J’aime les ciels d’orage, j’aime l’eau, j’aime la terre et les dieux.

Opium ou café, les parfumeurs nous proposent aujourd’hui des armures ou des prisons, comme si désormais ils avaient exclu de composer avec la fraîcheur. Passe encore que les fragrances deviennent des prisons.

 

La Collection « Essences » d’Actes Sud  (voir page sur le blog)

 

 

Photo : Sur le fleuve Chari vers N’Djaména, une horde de canards ne trouble pas les hippopotames. ( https://www.artmajeur.com/fr/art-gallery/katroz/299902/le-chari-vers-ndjamena-au-tchad-jpg/8643928 )

 

 

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