Lenormand, Fréderic «Le château du lac Tchou-An» (2004)

Lenormand, Fréderic «Le château du lac Tchou-An» (2004)

Auteur : Couronné par les prix Historia et Arsène Lupin, Frédéric Lenormand est auteur de nombreux romans historiques. Pour en savoir davantage, je vous invite à aller sur la page de mon blog « Auteurs E-L »

«Série Les Nouvelles Enquêtes du juge Ti»
Personnage historique du VIIe siècle, le juge Ti fut aussi le magistrat le plus populaire du roman chinois.
En inconditionnel inspiré, Frédéric Lenormand reprend à son compte le héros qui fit le succès de la série de Robert Van Gulik, et le ressuscite dans son humour décalé et son intelligence hors du commun. (Source Editions Fayard)

Tome 1 : «Le château du lac Tchou-An»
Fayard, 2004, 214 p / Points poche – 2006, 217 p /– 2.1.2014 – 222 pages

Résumé : En l’an 668, surpris par une inondation spectaculaire, le juge Ti se réfugie dans une auberge de province. Le lendemain, un des hôtes est assassiné. D’autres cadavres flottent bientôt sur les eaux d’une crue toujours plus menaçante. Accompagné de son fidèle Hong, Ti se rend dans un splendide château aux occupants étranges et inquiétants. Quel secret protègent-ils si farouchement ?

Mon avis :
L’Asie n’est pas mon continent de prédilection mais je suis dans ma période littérature asiatique. Toujours adepte des romans historiques, j’ai commencé par chercher où se déroulait l’action. C’est grand la Chine. Il me semble avoir trouvé : dans le Sichuan qui possède un climat subtropical humide chaud sans saison sèche.
Le moins qu’on puisse dire c’est que dans ce roman, le climat est à la pluie et pas au soleil ! Entre épidémie et inondations, le voyage du Juge Ti et de son accompagnant est loin d’être de tout repos. J’ai donc fait connaissance du Juge Ti, poussée par le fait que je trouve toujours du plaisir à lire Frédéric Lenormand. J’ai passé un moment très plaisant en compagnie du Juge Ti. Comme à l’accoutumé l’écriture de l’auteur est pleine d’humour. Découverte des aventures du Juge Ti, car je n’ai jamais lu Robert Van Gulik.
En route pour sa nouvelle affectation, le juge Ti doit se réfugier dans une auberge. L’endroit est tellement minable que quand il entend parler d’un château dans les environs, occupé par une riche famille, il profite de sa qualité de fonctionnaire impérial pour se faire inviter. Il ne tarde pas à découvrir que la famille qui habite le domaine n’a qu’une seule envie : le voir tourner les talons.
Si le cadre est somptueux, les habitants ont leur part de mystère et d’attitudes étranges et les morts par noyade se multiplient… Le Juge Ti décide de profiter de ce séjour impromptu pour enquêter sur enquêter pour ces meurtres. Peu importe si on se doute relativement rapidement de l’identité du meurtrier car l’important est le contexte, les personnages étranges, l’environnement dans lequel ils évoluent, les légendes et croyances qui entourent le lac …
Et moi les légendes et les créatures issues des différents folklores, j’adore ça… alors j’ai passé un bon moment dans la Chine du VIIème siècle.

Extraits :

Il lui était toujours pénible de constater que le confucianisme à l’honneur chez les lettrés ne dépassait guère les frontières des administrations et des cénacles érudits. Le petit peuple s’obstinait à s’embourber dans un obscurantisme lamentable, mêlant allègrement folklore local, imagination débridée et prédictions farfelues, fondées sur une analyse erronée des vérités universelles. Il n’était tout de même pas nécessaire d’avoir fait dix ans d’études classiques pour savoir que le monde était gouverné par des forces immuables, intemporelles, et non par des demi-poissons en quête d’affection et de courbettes ! « Quand comprendront-ils que la réussite n’est fondée que sur les vertus et le travail ? », se demanda le juge qui, pour sa part, était issu d’un père préfet et d’un grand-père ministre.

Le sergent loua cette tranquillité d’esprit que seules pouvaient apporter de longues études littéraires.

Ils sont comme l’arbre dont le tronc solide finit en de fragiles branchettes. Quand les racines sont bonnes, tout végétal peut se permettre de donner quelques rameaux débiles. Le plus grand luxe des rejetons de vieilles fortunes est de ne pas se montrer à la hauteur de l’héritage.

Il existait dans l’Empire du Milieu un principe impossible à transgresser, malgré le crime, le vol, le mensonge et l’ignominie : c’était le sens des convenances et de la hiérarchie.

Le juge Ti s’étonna qu’une femme habituée à cultiver les orchidées pût encore s’étonner de leur absence de senteur.

Quant à sa vertu, lorsqu’on savait ce qu’elle était capable d’en faire dans sa chambre, on était en droit de se demander ce qu’il en resterait dans la chambre des autres !

Il était devant un beau paysage de collines et de forêts au feuillage noir. Les feuilles n’en étaient pas : c’étaient des idéogrammes tracés à l’encre et pendus aux branches, que le vent agitait doucement. Au lieu de bruire, ce curieux feuillage émettait le son correspondant à chaque idéogramme, dans une cacophonie sans queue ni tête. Les troncs eux-mêmes étaient des rouleaux de papier serrés par un cordon de soie. Puis le panorama rétrécit, comme si le rêveur s’en était éloigné à reculons. Le juge vit alors que le décor entier était posé sur un livre ouvert.

Sans doute n’avait-il pas toujours été un alcoolique invétéré. Cette bouteille vivante recelait un vieux fond de culture insoupçonné.

Il y avait dans cet affolement quelque chose d’irrationnel, d’incontrôlé, qui déplaisait fortement à son esprit confucéen et même, pour tout dire, à sa conception de la bienséance.

On aurait dit un meurtre rituel. C’était comme si le cadavre et le trésor avaient formé une seule offrande à l’intention de la déesse. Cette dernière avait visiblement décliné l’hommage : elle avait restitué le cadeau.

Il avait reçu dans sa jeunesse une formation aux arts martiaux. Ses enquêtes musclées dans les bas-fonds lui avaient permis de se conserver et d’appliquer ses connaissances dans ce domaine. Il prit la position dite du « tigre furieux » pour s’élancer sur son adversaire. Celui-ci lui envoya son pied dans l’estomac. Le juge Ti adopta la position dite de « l’escargot dans sa coquille » et se recroquevilla en geignant.

 

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