Sardou, Romain «América : Un homme averti ne vaut rien» (2020)

Sardou, Romain «América : Un homme averti ne vaut rien» (2020)

Auteur : Romain Sardou est un écrivain français, né le 6 janvier 1974 à Boulogne-Billancourt. Il écrit pour les adultes et la jeunesse. Il est le fils du chanteur Michel Sardou et d’Élisabeth Haas (dite Babette) ; le petit-fils de Fernand et Jackie Sardou et l’arrière-petit-fils de Valentin Sardou. Il est également le filleul d’Alain Delon et Mireille Darc. Marié le 16 octobre 1999 à Francesca Gobbi, avec qui il a trois enfants (Aliénor, Gabriel et Victor-Scott), il divorce vingt ans plus tard. Sa nouvelle compagne est Kym Thiriot. Son frère cadet est le comédien Davy Sardou.
Il a également été scénariste pour Disney pendant deux ans

Romans : L’Éclat de Dieu (2004) – Personne n’y échappera (2006) – Quitte Rome ou meurs (2009) – Fräulein France (2014),
Série Notre Père : Pardonnez nos offenses (2002) – Délivrez-nous du mal (2008)
Série America : La Treizième Colonie, 2010 – La Main rouge, 2012 – Un homme averti ne vaut rien (2020)
Contes : Une seconde avant Noël
 (2005) – Sauver Noël (2006) – L’Arche de Noël et autres contes (2008)

Série America : tome 3

XO Editions – 24.06.2020 – 345 pages/

Résumé :   » Derrière toutes les grandes richesses se cache un grand crime.  » Ils ne se connaissent pas. Michael Monroe a grandi à Londres, orphelin et pauvre. Mathilde Bateman est issue d’une famille richissime de New York. L’un n’a rien, l’autre a tout. L’un veut changer de vie, l’autre veut changer le monde. Ils n’auraient jamais dû se croiser. Mais autour d’eux, assassinats et disparitions se multiplient.
Au nom de quelle malédiction ? Des bords de la Tamise aux ports du Savannah, de Londres à Boston, Michael et Mathilde traquent la vérité sans idée de ce qu’ils vont découvrir. Sur leurs familles, sur leur passé, et donc sur eux-mêmes. Il est des crimes dont on hérite… Guerres de pouvoir au sein d’un clan mafieux, secrets de famille, ambitions folles, amours contrariées, avec Un homme averti ne vaut rien, Romain Sardou signe un thriller palpitant et une saga familiale poignante.
Un roman de l’amour fou et de la vengeance totale

Mon avis : Après avoir dévoré les tomes 1 et 2, impossible de m’arrêter en si bon chemin… Comme je venais de lire les tomes 1 et 2 (j’ai préféré attendre pour lire la trilogie d’un coup) il y a eu le côté rappel des tomes précédents qui a pris beaucoup de place – depuis 1690…)
Mais là, on fait un bond dans le temps… et pas si petit que ça… 200 ans… mais on retrouve les mêmes familles…et on replonge dans les racines des deux familles et de ce qu’on appelait alors le nouveau monde, plein de promesses et d’idéaux… Alors j’ai un peu moins aimé ce dernier tome car je suis toujours davantage intéressée par l’histoire plus ancienne que par celle du XX et XXIème siècle…
Mais je me suis une nouvelle fois laissée embarquer par la plume fluide de Romain Sardou. C’est l’aventure, les secrets de famille, le côté important des racines et de l’histoire familiale, l’histoire de l’intégration irlandaise et l’importance de la Mafia Irlandaise encore actuellement, l’histoire des séparatistes irlandais. C’est aussi la vision d’un monde qui change, les mentalités différentes entre générations, le poids du passé, les trahisons, la force de l’amitié, des personnages attachants, une épopée menée tambour battant, alliant une partie suspense/thriller avec une magnifique histoire d’amour impossible… quoique…
Bref, j’ai aimé.

 

Extraits :

En ce jour de la Saint-Patrick 2007, le quartier de Georgiana, à Philadelphie, avait été bouclé par la police. Les rues y étaient rendues aux piétons, certains costumés comme au temps des colonies, d’autres habillés de vert et le visage peinturluré aux couleurs de la fête nationale irlandaise. La capitale de Pennsylvanie s’honorait d’avoir reçu sur son sol les premiers Irlandais du Nouveau Monde.

— Vous savez ce qu’on raconte… C’est même passé en proverbe : « Derrière les grandes richesses, il y a toujours un grand crime… »

Depuis Charles Dickens, on sait qu’il ne fait pas toujours bon être un enfant en Grande-Bretagne.

Tu es malheureuse ?… C’est cela ?… Le malheur, c’est un choix, ma chérie ! Ça se décide ! Ça s’invente même !…

Il se sentit écrasé par les portraits en pied d’ancêtres accrochés aux murs et par les lourds rayons de volumes de la bibliothèque.

[…] il se braquait sitôt qu’il sentait naître chez lui le moindre sentiment. Il le réprimait, décidé à ne plus aimer personne. Jamais. Il se retenait même de regretter les siens. « Heureusement que je suis mort intérieurement… » avait-il fini par se dire. « Je ne souffre plus parce que je ne sens plus… » Il restait vigilant. Dans le moindre commencement, il devinait la fin. Derrière toutes les joies offertes, il redoutait les peines qui leur succéderaient. Il voyait partout, et chez tout le monde, une promesse de chagrin…

— Je n’ai rien contre les amours impossibles, dit-il un peu plus tard. Après tout, elles ne trompent jamais.

Ils pensaient tout ce qu’ils se disaient. Ils avaient ce que seuls ont ceux qui ont approché la mort de très près : ils ne trichaient plus. Ils ne savaient plus tricher. Ils ne tricheraient plus jamais.

— L’éternité n’existe pas. Il n’y a que des moments d’éternité. Et celui-là en est un. Regarde !

Il avait l’impression surtout, autour de cette table, d’être en présence de dieux. Non pas des dieux de la mythologie, avec leur immortalité et leurs pouvoirs surnaturels, mais des dieux bien d’aujourd’hui, avec un pouvoir bien d’Amérique : l’Argent.

L’aventure américaine, telle que mes ancêtres l’ont connue, n’existe plus. Notre démocratie ne fait plus rêver personne et l’American way of life a pollué la planète… L’Amérique n’a plus rien à conquérir qui puisse l’élever au-dessus d’elle-même, comme cela a été le cas pendant des générations… Elle va seulement concentrer l’intégralité de ses puissants efforts à… ne pas disparaître.

Ils étaient pourtant très différents. Lui, il voulait que tout ce qu’il touche se transforme en or. Elle, elle voulait que tout ce qu’elle touche se transforme en art.

— Moi, ce qui m’a le plus gêné à l’enterrement, ç’a été l’âge moyen autour de nous, dit L’Ardoise. Quand tout le monde est plus vieux que le prêtre, c’est jamais bon signe…

On n’employait jamais le mot de gangster au sujet des Bateman, car ils étaient là depuis toujours et que tout le monde leur devait quelque chose, mais leurs activités étaient strictement d’ordre mafieux. Se mettre sous la protection de la famille Bateman, c’était, comme on le disait en gaélique, « avoir un toit ».

C’est comme avec la corruption et le clientélisme en politique : ce qui passait hier ne passe plus aujourd’hui.

— Celui qui se veut complètement sans attaches et sans passé fait semblant d’être libre et indépendant, dit-il. Il s’invente une liberté qui n’existe pas. C’est une illusion. Qui ne tient jamais le temps de toute une vie. Tôt ou tard, on est rattrapés par nos ancêtres, par nos origines. On n’efface jamais ce qui est écrit en nous. Je vous le répète : c’est un compte à rebours.

En histoire, la seule période qui compte pour les Américains, c’est l’époque contemporaine. Le passé n’a d’intérêt que dans la mesure où il peut leur être utile au présent. Nous avons toujours fait la promotion de nos idéaux.

Les familles mafieuses irlandaises n’avaient rien en commun avec les italiennes : tout le monde s’y détestait.

Il n’ignorait pourtant pas cette réplique de Beckett, un autre grand Irlandais, qui devrait désavouer un jour ses espérances :
« La fin est dans le commencement, et c’est pour cela que tout continue. »

Image : Port de Savannah

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