McCall Smith, Alexander «Amis, amants, chocolat» (2006)

McCall Smith, Alexander «Amis, amants, chocolat» (2006)

Auteur : Ressortissant britannique né au Zimbabwe en 1948, où il a grandi, Alexander McCall Smith vit aujourd’hui à Edimbourg. Il y exerce les fonctions de professeur de droit appliqué à la médecine et est parallèlement membre du comité international de bioéthique à l’UNESCO. Il a vécu quelques années au Botswana où il a contribué à l’organisation de la première école de droit et rédigé le code pénal. Il a écrit une cinquantaine d’ouvrages allant du manuel juridique au précis de grammaire portugaise et de nombreux ouvrages pour enfants dont des contes africains.

Séries :
Série Les enquêtes de Mma Ramotswe
 : Mma Ramotswe détective –  Les Larmes de la girafe- Vague à l’âme au Botswana –  Les Mots perdus du Kalahari –  La vie comme elle va – En charmante compagnie- 1 cobra, 2 souliers et beaucoup d’ennuis – Le Bon Mari de Zebra Drive-  – Miracle à Speedy Motors – Vérité et Feuilles de thé – Un safari tout confort – L’École de détectives privés du Limpopo – L’Institut de beauté des rectifications mineures – Le Café de luxe pour beaux messieurs – Les Vacances de Mma Ramotswe – Precious et Grace –

Série Isabel Dalhousie : Le Club des philosophes amateurs – Amis, Amants, Chocolat – Une question d’attitude – Le Bon Usage des compliments – La Douce Tranquillité des samedis – L’Importance d’être reconnaissant – Les Charmants Travers de nos semblables – Les Lointains Tourments de la jeunesse – L’air d’été est rempli de promesses – Les voies du bonheur sont imprévisibles – Un peu de recul chère Isabel !

Série Chroniques d’Édimbourg44 Scotland Street – Édimbourg Express – L’Amour en kilt –  Le Monde selon Bertie – L’Insoutenable Légèreté des scones – De l’importance d’avoir sept ans – Le Blues de Bertie

Série Isabel Dalhousie (rédactrice en chef d’une revue de philosophie et enquêtrice amateur.)
Tome 2

Editions Deux Terres – 05.10.2006 – 250 pages / 10/18 – oct 2007 – 256 pages / Masque poche – 10.10.2018 – 328 pages ( traduit par Martine Skopan ) Titre original : Friends, Lovers, Chocolate

Résumé :
Le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas. À Édimbourg, la rédactrice en chef de la Revue d’éthique appliquée, Isabel Dalhousie, a de bonnes raisons de méditer cette pensée… Un homme hanté par un visage inconnu, depuis qu’il a subi une greffe du coeur, est persuadé que la douleur que lui provoquent ses visions finira par le tuer si Isabel n’en découvre pas l’origine. Cartésienne convaincue, celle-ci préfère mettre de côté les théories sur la mémoire cellulaire et concentrer son enquête sur la mort suspecte du donneur. Par ailleurs, la vie amoureuse de sa nièce, si peu avisée en matière d’hommes, interfère de manière inattendue dans son travail. Isabel devra faire appel à tout son sens commun pour affronter les élans du coeur qui semblent secouer la capitale écossaise !

Mon avis : Première fois que je lis cet auteur dont j’ai entendu parler depuis longtemps. C’est à mon avis ce que l’on appelle maintenant un « cosy mystery » ou « cosy murder ».
Isabel Dalthousie est la rédactrice en chef de de la Revue d’Ethique appliquée et la tante de la jeune Cat. Quadragénaire, elle est amoureuse en secret de son ami Jamie (l’ex petit ami de sa nièce, qui est toujours amoureux de cette dernière) et Isabel est aussi enquêtrice amateur à ses heures perdues… Oh ce n’est pas une enquêtrice normale… comme elle s’intéresse aux gens qui l’entourent et pour qui elle a de l’affection, elle se sent concernée par ce qui pourrait les aider à aller mieux… et mène sa petite enquête, à sa manière…

Et quand elle rencontre Ian, un homme qui vit depuis peu avec le cœur d’un autre et qui est perturbé par des souvenirs qui ne lui appartiennent pas… elle décide d’en apprendre un peu plus sur l’identité du donneur…
Mis à part Isabel, Édimbourg est le deuxième personnage important de ce roman ( peut-être même le personnage principal ?) . Un avertissement : si c’est pour l’intrigue policière que vous voulez lire le roman, passez votre chemin … C’est un roman d’ambiance, qui vous fait entrer dans la vie d’une quadragénaire et partager sa vision de la vie, de l’amitié, ses joies et ses questionnements, ses doutes et ses erreurs…
Ce qui est étrange c’est que notre philosophe mélange allègrement des sujets qui sont d’ordre philosophique et des lieu communs du style (Italie du Sud = Mafia / Italien = romantique).

Au final, une lecture délassante, plaisante, une lecture parfaite après un livre coup de poing (surtout pour qui aime l’Ecosse – et le chocolat – comme c’est mon cas) ; léger, avec des références littéraires aux auteurs écossais, avec des points d’humour et beaucoup d’humanité.

Extraits :

Ils se trompaient bien sûr, comme souvent ceux qui ont tendance à voir le mal partout.

Si l’on traitait tout le monde avec la considération due à ceux qui n’ont plus que quelques heures à vivre, on manifesterait sans doute plus de générosité.

Nous ressentons cette solidarité particulière entre collègues de travail, se dit-elle. Nous sommes tous les deux embarqués dans le même bateau. Ce n’est pas de l’amitié, mais le sentiment d’être engagés dans une entreprise qui soude les hommes : le travail. Le fait de travailler ensemble crée des liens subtils d’aide mutuelle et de loyauté. Voilà pourquoi les syndicalistes utilisent le terme « camarades ». Notre servitude nous unit, chacun allège le poids de l’autre.

Quand on est amoureux, on veut toujours parler de ceux qu’on aime, on veut les exhiber comme les trophées des jeux de l’amour. On leur prête le même pouvoir sur les autres qu’ils ont sur nous, ce qui est une illusion : les amants des uns sont rarement intéressants pour les autres.

C’était là un exemple parfait d’akrasia, cette faiblesse de la volonté, qui nous fait céder à la tentation, tout en sachant pertinemment que nous devrions être en train de faire tout autre chose.

– Le chocolat pose de graves problèmes philosophiques : la tentation, le contrôle de soi.
Il y aurait des choses à dire sur le chocolat, songea-t-elle. Et après un instant de réflexion, elle ajouta :
– Oui, on peut dire que le chocolat, c’est l’épreuve suprême.

Quelle est la différence entre un visage intelligent et un visage qui ne l’est pas ? Et ne me dites pas qu’il n’y a pas de différence, car il y en a une.
– On a l’air animé, impliqué dans le monde. Un esprit vide ne montre rien du tout.

Selon la théorie de la mémoire cellulaire, si l’on peut l’appeler ainsi, il est tout à fait possible que le cœur soit un des sièges de la mémoire. En recevant le cœur d’un autre, j’ai donc pu acquérir certains de ses souvenirs.

Si les petites villes italiennes sont si agréables, c’est qu’on n’y est jamais anonyme.

Nous voilà donc dans le domaine des clichés.
[…] Mais les clichés ont une origine et possèdent toujours une part de vérité. Si l’Italie n’est pas romantique, alors aucun autre pays ne l’est.

Qu’il s’agisse de sorcellerie ou de harcèlement sexuel, la tactique des persécuteurs reste identique. On commence par identifier un ennemi haï, qu’on diabolise ensuite. Les mêmes émotions, la même énergie déployées autrefois contre ceux qu’on accusait de sorcellerie visent aujourd’hui de nouvelles victimes désignées.

Mais tu as l’air si… bon, arrêtons là. On est amis, non ? Les amis, c’est fait pour s’entraider. C’est comme ça. Parfois je préférerais que tu sois un peu différente, mais tu es comme tu es.

« Cette statue commémore la fidélité d’un chien qui resta quatorze ans sur la tombe de son maître, dans le cimetière de Greyfriars. Jamais il n’abandonna son poste. » Elle vit l’un des auditeurs se pencher en avant, secouant la tête en signe d’incrédulité. Pourtant, une telle fidélité est possible, et pas seulement chez les chiens. Les gens restent fidèles les uns aux autres pendant des années, en dépit de tous les obstacles. Devant une preuve de cette loyauté, ce n’est pas de l’incrédulité qu’on devrait ressentir, mais du réconfort.

C’est le pur effet du hasard. Mais le hasard, qui exclut l’existence même du paranormal, est une explication trop sage, et les gens n’aiment pas les explications trop sages. Si le mystère et l’inconnu ont tant d’attraits, c’est qu’ils donnent l’illusion que le monde est moins prosaïque que les apparences ne le laissent craindre. Et il faut résister à ces tentations, qui ne peuvent déboucher que sur un monde obscurantiste et dominé par la peur.

Il faudrait consacrer tout un article aux problèmes moraux liés au chocolat. Plus elle y pensait, plus la dimension philosophique du chocolat lui apparaissait évidente. Le chocolat permet de comprendre le phénomène de l’akrasia, cette paralysie de la volonté. Si on sait que le chocolat est mauvais pour la santé, et il l’est à certains égards, puisqu’il fait grossir, alors pourquoi en manger de telles quantités ? Cela suggère une faiblesse de la volonté. Mais d’un autre côté, si nous mangeons du chocolat, c’est aussi que nous y trouvons notre intérêt : la volonté nous guide vers ce que nous préférons. Il n’y a pas alors de faiblesse de la volonté, au contraire, c’est une force qui nous pousse à faire ce que nous désirons vraiment, c’est-à-dire manger du chocolat. Le chocolat, ce n’est pas simple.

Le monde était rempli d’injustices et d’épreuves innombrables. Mais des points de lumière, çà et là, repoussaient encore les ténèbres.

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