Mottley, Leila « Arpenter la nuit » (RLE2022)

Mottley, Leila « Arpenter la nuit » (RLE2022)

Autrice : une autrice et poétesse américaine de dix-neuf ans, originaire d’Oakland en Californie. Désignée Oakland Youth Poet Laureate en 2018, elle a été reconnue en 2020 par le New York Times comme l’une des dix jeunes auteurs noirs américains les plus talentueux. Arpenter la nuit, qu’elle a écrit à l’âge de dix-sept ans, a suscité l’enthousiasme d’éditeurs du monde entier. Sa publication apparaît déjà comme un évènement et l’acte de naissance d’une formidable carrière d’écrivain.

Albin-Michel – 17.08.2022 – 416 pages   Night crawling – traduit par Pauline Loquin

Résumé : En Californie, une adolescente noire est décidée à survivre, coûte que coûte, dans un monde qui se refuse à la protéger. Un premier roman coup de poing.

Mon avis : Et dire que ce livre a été écrit par une jeune femme de 17 ans ! Un premier roman époustouflant. Roman noir de chez noir !
Kiara rejoint le petit groupe d’héroïnes qui marquent et qui resteront dans ma mémoire. L’autrice réussit à mettre de l’espoir et de la poésie dans un contexte qui est tout sauf porteur d’espoir !

Prostitution, corruption, Misère, Injustice, trafic d’êtres humains, abus de pouvoir et pressions de la part de personnes détentrices de l’autorité (la police) voilà une partie des sujets abordés dans le roman qui parle de la vie des femmes de couleur en Amérique et plus particulièrement à Oakland. Des femmes dont on ne parle pas ou pas assez. Des histoires enterrées, passées sous silence. Des femmes qui grandissent en essayant de sauver leur famille, qui font ce qu’elles peuvent, comme elles peuvent, qui sont confrontées à la violence, à la peur, à l’angoisse du jour qui vient et de la nuit qui approche. Et ce qui est magique dans cette noirceur, c’est que cette jeune autrice nous fait plonger dans l’horreur avec des étoiles dans les yeux et dans le ciel.
Prenons donc la direction Oakland, d’un quartier défavorisé. Kiara habite avec son frère et risque à tout moment de se faire expulser pour cause de loyers impayés. Il en est de même pour une de ses voisines, Dee qui y habite avec son petit garçon Trevor, âgé de neuf ans. Il ne fait pas bon être noire et pauvre en Amérique et plus particulièrement à Oakland dans le cas qui nous concerne… Et pour s’en sortir, car elle ne trouve pas de travail, Kiara, 17 ans, va se retrouver contrainte à vendre son corps. Il faut dire qu’elle doit se débrouiller toute seule, sa mère étant, tout comme la mère de Trevor, aux abonnées absentes, dans un centre de réinsertion ou dans l’enfer de la drogue … Il y a pourtant des hommes et des adultes dans l’entourage de Kiara… Il y a son frère Marcus mais lui veut percer dans la musique et Kiara ne pourra pas compter sur lui. Pire, il va encore lui compliquer la vie. Il y a aussi son oncle, qui a réussi dans la musique et qui a vite quitté Oakland pour la Californie, en coupant les ponts. Elle va tenter de s’appuyer sur quelques jeunes femmes de ses amies ou de son entourage mais elle va se retrouver seule à affronter sa vie. Elle qui, comme son amie Alé, rêve juste trop grand, veut conjurer le mauvais sort, veut croire en l’avenir. Elle va devoir faire face à la violence, à la misère, au viol…
Et elle va devoir affronter la peur… car il n’y a pas que le loyer, il y a les assistants sociaux, les flics, eux qui se servent sur son corps gratuitement en disant que le salaire, c’est leur protection… Et comme si cela ne suffisait pas, elle tente de protéger le petit Trevor et va se retrouver avec l’assistance sociale sur le dos…
Elle qui voulait juste une famille… voila que tout part en sucette autour d’elle… Kiara qui est juste à la recherche d’une raison de vivre, de survivre, une passion… un cri qui viendrait de l’intérieur…
Jusqu’à aller au procès… suite à un suicide qui la mettra directement en cause… Mais je ne vous en dis pas plus, j’ai dejà beaucoup parlé…

Un grand merci à la Collection « Terres d’Amérique » chez Albin-Michel et à Francis Geffard pour leur confiance.

Extraits :

J’ai rien à mettre sur un CV, du coup ça aurait aucun sens d’apporter une feuille blanche, vous croyez pas ?

Tous ces moments furtifs se solidifient dans ma cage thoracique et ça fait un peu comme un album photo à l’intérieur de mon corps :

J’ai l’impression d’être éclaboussée de souvenirs, que toutes les cellules de mon corps ses sont allumées et n’arrêtent pas de bouger.

Je sais ce que ça fait d’être attrapé par la rue mais je ne sais pas comment on s’en sort ni comment aider les autres […]

Et moi, je suis toujours là à attendre d’etre saisie par un amour capable de mettre l’univers sur pause, un amour qui me retournera de l’intérieur et qui retirera toutes les parties qui sont en train de pourrir en moi.

Je lui raconte comment le trottoir nous a déchirées en deux et nous a retiré cette partie qui méritait le plus d’être conservée : l’enfant qu’on garde à l’intérieur.

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