Kerr, Philip « La Dame de Zagreb » (2016)

Kerr, Philip « La Dame de Zagreb » (2016)

L’Auteur : Philip Ballantyne Kerr est un auteur écossais, né le 22 février 1956 à Edimbourg (Ecosse) et mort le 23 mars 2018 à Londres. Il a fait ses études de droit à l’université de Birmingham. Il a ensuite travaillé dans la publicité et comme journaliste free-lance, avant de remporter un succès mondial avec sa trilogie située dans le Berlin de la fin des années trente et de l’immédiat après-guerre (Un été de cristal, La Pâle Figure, Un requiem allemand), avec le détective privé Bernie Gunther, également présent dans The One From the Other (2006). Alors qu’il avait annoncé la fin de Gunther après la publication de la trilogie, il lui consacre de nouvelles aventures depuis 2006.

Lien vers la série Bernhard Gunther (Bernie)

Editions Du masque – 13.01.2016 – 450 pages/ Livre de poche 04.01.2017 – 576 pages – Traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Philippe Bonnet.

Tome 10 : The lady from Zagreb (2013) La Dame de Zagreb (en français 2016) – se déroule en été 1943

Résumé :  Été 1943. Il y a des endroits pires que Zurich, et Bernie Gunther est bien placé pour le savoir. Quand Joseph Goebbels, ministre en charge de la propagande, lui demande de retrouver l’éblouissante Dalia Dresner, étoile montante du cinéma allemand qui se cache d’après la rumeur à Zurich, il n’a d’autre choix que d’accepter. Mais, très vite, cette mission en apparence aussi aguichante que l’objet de la recherche, prend un tour bien plus sinistre. Car le père de Dalia Dresner est en fait un croate antisémite de la première heure, sadique notoire, qui dirige un tristement célèbre camp de concentration de la région. Et la police suisse exige au même moment que Gunther fasse la lumière sur une vieille affaire qui risque de compromettre des proches de Hitler.

Mon avis :

Toujours un plaisir de retrouver Bernie. Et un plaisir que je savoure en sachant qu’il n’y aura pas de suite après le 14ème tome.

Bernie est toujours aussi caustique, irrévérencieux, ironique, farouchement antinazi bien que membre des SS… et cette fois il est amoureux de la même femme que Goebbels… Femme qu’il a rencontrée alors que Goebbels lui avait donné pour mission de la convaincre de jouer dans un film, ce qui va l’entrainer en Croatie , en Yougoslavie, dans des endroits reculés où la guerre fait rage … la guerre mais aussi les exterminations de masse et où la violence raciale est à son comble. Certes le centre de l’action va se dérouler en Allemagne – à Berlin et environs – mais notre ami Bernie n’en finit pas de voyager. Bienvenue en Suisse également, « pays neutre aux mains sales », où l’on croise des espions, où tout n’est pas lisse. Neutralité et coopération semble faire bon ménage…
Et comme toujours on y croise les acteurs de l’Histoire … Ici Allen Dulles par exemple (voir la série des livres de Mark Zellweger commentée sur le blog) et comme toujours la grande Histoire se mêle aux aventures de Bernie, pour mon plus grand bonheur.

Extraits :

Vous savez, vous me faites penser à une de ces voitures du peuple conçues par le Dr Porsche. Un peu brusques, mais d’un fonctionnement peu coûteux et très performantes. Et construites pour durer, au point d’être quasiment indestructibles.

Ce qui arrive n’a aucune logique, Bernie. Parfois, je me dis que là réside votre problème. Vous ne cessez de chercher un sens profond aux choses, mais il n’y en a pas. Il n’y en a jamais eu. Tout ça n’est qu’une erreur de catégorie. Et essayer de résoudre les difficultés ne résout rien du tout.

Il esquissa un sourire tel que je n’en avais jamais vu, sauf dans un aquarium de reptiles

Je tirai une nouvelle bouffée de sa clope ; c’est ce qu’il y a de formidable avec une cigarette : il arrive que ça vous sauve la mise. La seule chose qui a besoin de sortir de votre bouche, c’est de la fumée, et on ne peut pas vous arrêter pour ça ; du moins, pas encore. Telles sont les libertés importantes.

À Berlin, l’humour subversif n’était jamais très loin sous le simulacre de patriotisme dans les gestes de la vie quotidienne.

Les nazis étaient comme la syphilis ; fermer les yeux en espérant que les choses s’arrangeraient toutes seules n’avait jamais été une option réaliste.

Les lames du parquet craquèrent comme un vieux manteau en cuir tandis que je me dirigeais, les jambes en coton, vers le pupitre, encore que c’était peut-être le bruit de mes nerfs tirant sur les muscles de mon cœur et de mes poumons.

Ce sont les moments sombres qui hantent tout enquêteur. Les ombres des ombres, comme je les qualifie parfois, quand on peut facilement confondre les choses entre elles. Que le mal se fait passer pour le bien et que le mensonge prend le visage de la vérité. Mais, de temps en temps, aux ombres succède la lumière.

Un bon détective doit toujours être honnête, mais pas trop. Pas trop pour son propre bien. Et pas trop curieux non plus. Il y a des choses qu’il vaut mieux ne pas savoir. De ça, je suis absolument convaincu.

— Et qu’est-ce que vous en pensez, d’être amoureux ?
— À mon avis, ça ressemble à une croisière. Ce n’est pas si mal quand on navigue sur une mer calme. Mais quand le temps se met à se gâter, on devient facilement nauséeux. En fait, c’est même étonnant à quel point ça peut se produire vite. »

— Vous n’avez pas l’air d’un détective. Plutôt d’un homme ayant perdu la foi. Rempli de doute sur tout.
—  C’est ce qui fait de moi un bon détective. Ça et un certain charme romantique qui me caractérise probablement.

—  Oui, mais pourquoi vous haïssez-vous les uns les autres ?
— L’histoire. C’est la principale raison pour laquelle un individu en déteste un autre, non ?

Que dit Nietzsche ? Un homme a beau penser qu’il peut regarder dans l’abîme sans tomber, l’abîme le regarde aussi. Il arrive que les abîmes aient un étrange effet sur notre sens de l’équilibre. Croyez-moi, j’en sais quelque chose. »

D’après ce que j’avais pu constater, les souverains yougoslaves étaient un peu comme les taxis ; il ne s’écoulait jamais longtemps avant qu’il n’en vienne un autre en tête de file.

Me faire sortir d’un pays enclavé – après tout, la Suisse était entourée de l’Allemagne, de l’Italie fasciste, de la France de Vichy et de l’Autriche nazie – représentait un défi de taille, même pour les Américains.

Parfois, le seul plaisir de venir d’une grande ville est de faire en sorte que les gens venant d’un endroit petit se sentent encore plus petits.

— Tuer un homme est un sacré truc. On a toujours l’impression que les balles traversent deux personnes : celle qui les reçoit et celle qui les tire. Je sais ce que tu ressens.

2 Replies to “Kerr, Philip « La Dame de Zagreb » (2016)”

  1. Toujours de bons moments ceux passés avec Bernie…
    J’avais noté cette citation:
    “Les bons ne sont jamais aussi bons qu’on le croit, et les méchants, aussi méchants. Loin de là. Certains jours, nous sommes tous bons. Et d’autres jours, méchants. Telle est l’histoire de ma vie. telle est l’histoire de la vie de chacun.“
    Je suis arrivée au bout des 14 tomes, hélas… plus que 3 fois hélas…

    1. Ah oui . Encore une belle citation. Faut dire qu’il y en a beaucoup chez lui…
      C’est toi qui m’a offert mon premier livre de cet auteur et tu avais tapé dans le mille!

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