Veasna So, Anthony « Nous aurions pu être des princes » RLH2023 – 321 pages

Veasna So, Anthony « Nous aurions pu être des princes » RLH2023 – 321 pages

Auteur: Né le 20.02 1992 à Stockton, Californie et décédé accidentellement le 08.12. 2020 à San-Francisco à l’âge de vingt-huit ans suite à une overdose.

Albin-Michel Collection Terres d’Amérique – 08.02.2023 – 321 pages – traduit par Héloïse Esquié (Afterparties: Stories 2021) – Prix Ferro-Grumley 2022 (littérature LGBTQ) 

Résumé:

À Stockton, Californie, les temples bouddhistes et les épiceries cambodgiennes ont fleuri depuis l’arrivée massive de familles ayant fui leur pays et le régime génocidaire des Khmers rouges. Dans cette ville entre Asie et Amérique, on croise ainsi des bonzes, de vieilles tantes intrusives et des adolescents mortifiés par l’ennui, tout un monde d’histoires passées sous silence, de désirs naissants, de tiraillements identitaires et sexuels, où l’avenir tente de se construire sur les fondations d’un traumatisme profond et en dépit du poids des traditions.

Anthony Veasna So révélait avec ce recueil doux-amer, encensé par la presse américaine, une voix résolument moderne et audacieuse dans la lignée d’Ocean Vuong.

«Ce jeune écrivain aborde les tragédies de la génération passée avec un humour et une irrévérence délicieusement transgressifs. Un livre remarquable et extraordinairement maîtrisé. » The New Yorker 

Mon avis :

Neuf nouvelles qui vous font plonger dans la communauté cambodgienne des Etats-Unis, et plus particulièrement dans sa jeunesse.

Une écriture percutante, dérangeante, qui met en lumière la vie des cambodgiens qui se sont retrouvés en Californie pour fuir le génocide et la manière dont les anciennes générations ont tout fait pour leurs jeunes, avec un résultat qui a fait perdre le ciment des racines et des origines. Un gouffre générationnel. Des vieux qui triment, des jeunes qui se perdent… A trop vouloir oublier le passé et les racines, la destruction n’est pas loin… Et la jeunesse se détruit, la confrontation entre le mode de vie des survivants du génocide khmer et les jeunes nés sur le sol américain… la perte des traditions…  Révélateur et révélé sans fioritures par ce jeune auteur, malheureusement victime des excès révélé, une immersion dans la culture cambodgienne. J’ai beaucoup apprécié cette lecture même si pour une fois, cela n’a pas été vraiment le coup de coeur espéré.

Je dois avouer que j’ai dû m’accrocher. J’ai été confrontée à un univers tellement dur, tellement glauque et déprimant ( j’avoue que le coté humoristique du livre m’a quelque peu échappé…) Trop de souffrance, de maltraitance et de traumatismes ce qui n’altère en rien l’intérêt certain de ces nouvelles qui m’en ont beaucoup appris sur l’intégration/non-intégration des cambodgiens aux Etats-Unis quand ils ont fui le régime de Pol-Pot.
L’auteur aborde de nombreux thèmes, le sexe, la différence, l’homosexualité, la drogue, les vidéos pornos, les rapports entre cambodgiens et non cambodgiens, la différence entre les générations, la difficulté d’intégration, le racisme, les relations avec la famille, les différences de point de vue entre les générations, la perte et la recherche d’identité.
J’ai trouvé interessant que même publié sous forme de nouvelles, il y ait une continuité de personnages tout au long du livre.
Comment ces personnages ont ils rebondi après le traumatisme de leur passé au Cambodge et les difficultés à l’arrivée sur le sol américain…
Comment ont-ils géré leur « Khmeritude », leur héritage cambodgien? On vit également la Cambodgitude à travers les traditions et la nourriture. A quoi sert de se référer à un passé au Cambodge alors qu’on est maintenant des américains? Pourquoi des prénoms khmers? Que penser des excès des nouvelles générations? De l’Influence de la religion, du traditionalisme, de l’importance d’honorer les disparus? 

La Nouvelle 9 « Différences de Générations » est – avec la première – celle que j’ai préférée. La nouvelle est inspirée de la vie de la mère, et en particulier le récit d’une rencontre avec Michael Jackson venu dans une école  élémentaire de Cleveland en 1989 dans laquelle elle était professeur après une terrible fusillade au cours de laquelle quatre enfants khmers avaient trouvé la mort suite au geste d’un homme qui avait peur des réfugiés. Un événement qui avait provoqué un déménagement et une coupure avec leurs semblables et leurs racines khmères.

Un grand merci aux Editions Albin-Michel pour la découverte.

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