Martin, Guillaume « Socrate à vélo » 2020 (207 pages)
Auteur: Cycliste professionnel et diplômé d’un master en philosophie
né le 9 juin 1993 à Paris, coureur cycliste français, professionnel depuis 2016, membre de l’équipe Cofidis. Il a notamment été meilleur grimpeur du Tour d’Espagne 2020, troisième du Critérium du Dauphiné la même année, ainsi que huitième du Tour de France 2021., Guillaume Martin est arrivé 21ème au classement général du Tour de France en 2018.
Il est l’auteur de trois ouvrages traitant de la philosophie et de son application au sport.
Ouvrages:
Platon Vs. Platoche, Éditions L’Harmattan, 2019 – Socrate à vélo (2020) – La société du peloton (2012)
Grasset – 24.06.2020 – 203 pages / Mon poche – 09.06.2022 – 207 pages
Résumé:
» Imaginez Socrate, Aristote, Pascal, Nietzsche et consorts sur la ligne de départ. Suivez leur préparation pour le Tour de France, la plus prestigieuse épreuve cycliste au monde, à laquelle ils ont été conviés. Partagez leurs doutes, leurs idées. Réfléchissez à leurs côtés. Pédalez avec ces drôles de sportifs, ces coureurs philosophes, ces » vélosophes « , comme la presse s’amuse à les appeler. On dit qu’ils seraient dotés d’une potion magique : leur intelligence.
Celle-ci leur permettra-t-elle de conquérir le maillot jaune tant convoité ? » G. M.
Ici l’essai se mêle à la fiction, la fable aux méditations les plus profondes. On voit Nietzsche s’entraîner courageusement en écoutant » Les Chemins de la philosophie » sur France Culture, d’illustres philosophes grimper les cols aux côtés des plus grands champions, Heidegger tomber dans un fossé, Socrate prendre la tête du peloton ou encore Sartre coacher l’équipe de France…
Le but de cette fantaisie philosophique ? Montrer que l’effort physique de haut niveau n’est pas l’ennemi de l’activité intellectuelle, que la tête et les jambes n’ont aucunement lieu d’être distinguées. Car, comme le rappelait Bergson : » Il faut penser en homme d’action et agir en homme de pensée. «
Mon avis:
Alors c’est quand même le sommet ! Moi qui ne touche pas un vélo… lire un livre sur les cyclistes et le tour de France… Un gag ! Mais dans le titre, il y a Socrate.. et là ça change tout! J’étais trop curieuse de voir le résultat de l’amalgame Socrate-Vélo !
Au début, j’ai eu très peur… les quelques premières pages.. je me suis dit « Aie »…. ça parle de vélo.. normal me direz-vous !!! Et puis ouf… les roues ont tourné… les « vélosophes » sont entrés en piste et j’ai beaucoup apprécié ce petit livre. L’auteur écrit « Pourquoi ai-je voulu écrire Socrate à vélo ? Pour jouer, rien de plus. Ce qui est déjà beaucoup. » et il l’a fait avec intelligence, et humour. Et comme il a un master en philosophie, les petites phrase de référence tombent juste, et au bon moment.
Inutile de vous dire que je n’avais jamais entendu parler du coureur cycliste Guillaume Martin… (désolée Monsieur le champion…) mais ma culture cycliste s’arrête à deux trois incontournables du style Anquetil, Poulidor, Gimondi, Merckx..
Alors on va déjà balayer les idées idiotes , du style sportif et intelligence ne vont pas ensemble. C’est soit l’un soit l’autre… Non qui dit vélo ne dit pas crétin! Et oui, il semblerait qu’il soit possible de penser en pédalant ! Incroyable non ? Faire deux choses en même temps ! Etudes ou sport, il faut choisir ! Et pourquoi ??
Mais il ne faut pas oublier que les sportifs sont caricaturés dans notre société. Et pourtant l’intelligence est reconnue dans certains sports ( on pense au « génie » de certains joueurs de tennis), on compare la boxe à un art… mais pas le vélo…
Et puis, le cycliste il n’est pas que cycliste.. il doit avoir des connaissances dans d’autres domaines… Notre cycliste préféré, Guillaume Martin, se cultive en écoutant des podcasts en s’entrainant…
Et si l’on s’en réfère à Descartes, l’intelligence du corps existe…il y a même union corps/âme…
On en veut pour preuve la manière dont ce corps humain réagit face aux virus…
Dans la Grèce antique perfection esthétique allait de pair avec finesse intellectuelle…
Sport et Philo se rejoignent dans leurs attentes : l’envie de gagner, ce que « veut et peut l’humain » , lutter pour s’améliorer, sortir du lot, ne pas renoncer, repousser les limites, faire du développement de soi un but dans l’existence.
Il est indispensable dans la vie de faire travailler le mental et le physique, le manuel et l’intellectuel… il faut pouvoir s’évader, par une activité annexe, l’écriture, la lecture, les arts, le sport..
Ce livre est sur le cyclisme, certes, mais aussi sur la façon de vivre, et les prises dites par les philosophes ou empruntées aux « vélosophes » sont interessantes et tout à fait adaptées à qui veut aller de l’avant, en pédalant … ou pas…
Il est temps de faire connaissance de nos « vélosophes » et la rencontre va être originale, savoureuse et instructive.. Socrate, Aristote, Platon, Diogène, Héraclite, Marc-Aurèle, Machiavel, Plotin, Épictète
Nietzsche , Kant, (et sa « critique de la raison vélocipédique »), Schopenhauer, Hegel, Husserl, Leibniz, Marx, Heidegger, Einstein, Freud
Flaubert, Pascal, Bergson, Jean-Paul Sartre,
C’est parti pour un tour, LE Tour … La technique, la tactique, le brin de folie, l’intelligence, le plan de course, la condition physique… qui va gagner le Tour de France?
Extraits:
Socrate s’interroge. La philosophie n’est pas une activité pour laquelle « on trouve le temps », se dit-il… Penser ne se décrète pas. La philosophie surgit. C’est un art de vivre, un mode de pensée plus qu’un contenu de pensée. Pourquoi ce mode de pensée serait-il inconciliable avec une vie de cycliste ?
Quand on dit de telle personne : « elle est ceci ou cela », il faut pouvoir reconnaître que cette caractérisation n’est qu’une façon de parler. Cet « être » que nous attribuons n’est qu’une facilité de langage. Car, contrairement aux choses, l’humain n’est pas, il a à être. Son identité est toujours floue, instable, changeante. On ne peut parler d’être authentiquement qu’une fois la mort advenue. On ne naît pas cycliste ou philosophe, ou cycliste-philosophe ; on le devient.
Ce préalable étant admis, il devient possible de s’amuser avec les identités. Il devient possible de jouer au cycliste-philosophe. Il devient possible de jongler avec les généralisations, les réifications, les clichés. Quelque chose en ressortira nécessairement : une vérité, une question, un éclaircissement, un moment de drôlerie…
« Je ne vous conseille pas la paix, mais la victoire. » NIETZSCHE
Marx se manifesta :
— Moi je… je crois énormément en la… en la force du collectif ! Sans… union… point de lutte… possible !
Einstein comprenait maintenant qu’à trop vouloir objectiver les choses, à vouloir transformer le cyclisme en science, on en perdait l’essentiel : pédaler, avancer. Or, se dit-il, « la vie c’est comme la bicyclette : il faut avancer pour ne pas perdre l’équilibre ». Analyser, découper, disséquer – tout cela a un sens, à condition que l’on s’en serve pour construire. Que permettent de construire esprit critique, interrogations existentielles, discours incompréhensibles – toutes ces choses que l’on appelle philosophie ?
« Ce qui ne me tue pas me rend plus fort » : cette formule aussi est à la mode. Peu de gens savent qu’elle est de Nietzsche, et qu’elle ne relève pas du psychologique, mais bel et bien du physiologique, éclairant parfaitement ce qui se joue dans l’entraînement sportif.
D’où vient ce miracle physiologique ? Comment expliquer ce paradoxe qui fait que d’un mal peut advenir un mieux ? Je mettrais encore en avant l’intelligence du corps, capable de se prémunir de futures récidives après une agression. Voyez plutôt : un os fracturé ne recassera jamais au même endroit, car le corps aura renforcé la zone endommagée ; de même, un organisme victime d’une petite infection virale se montrera par la suite plus résistant, comme après une vaccination.
Et rappelle-toi, touriste : il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant !
Ainsi parla Zarathustra, qui derechef se mit en danseuse et déposa Pascal.
être ou ne pas être, telle est la question. L’unique véritable question.
Et à cette question, je réponds qu’il faut être, malgré tout. Non pas parce qu’un être supérieur me le commande. Non pas parce que mon existence répond à un dessein caché. Je ne crois pas à un destin préétabli. S’il faut être, c’est parce que je suis, j’existe – aussi absurde cette sentence puisse-t-elle sonner. Je suis engagé dans cette existence, sans savoir pourquoi, et même plus : en sachant que je ne connaîtrai jamais les raisons de ce pourquoi. Alors autant poursuivre cet engagement. Renoncer serait encore vouloir donner un sens à ce qui n’en a pas.
Faisons comme si la vie avait un but, en lui donnant nous-même ce but.
le contre-la-montre est une épreuve où l’on est son propre adversaire. Ce qui importe, c’est donc de bien se connaître soi-même. Il faut être le plus régulier possible et, pour cela, contrôler parfaitement ses limites en ne partant ni trop lentement – car le temps perdu ne se rattrape plus –, ni trop vite – sous peine de s’écrouler.
Plutôt que de subir, je préfère tenter. Tenter l’impossible ? Peut-être, mais vous savez : comme disait un camarade, ‘‘entre possible et impossible il n’y a que deux lettres, et un état d’esprit
One Reply to “Martin, Guillaume « Socrate à vélo » 2020 (207 pages) ”
Oh moi, le seul coureur cycliste que je connaisse, c’est Eddy Merckx. Je connais (un peu) mieux les philosophes. Alors, pourquoi pas ? Je me laisserais peut-être tenter . Pourtant , j’avoue que si je n’avais pas lu ton avis, je ne me serais jamais arrêtée sur ce livre.