Brooks-Dalton, Lily « Pirate de lumière » (2024) 400 pages

Brooks-Dalton, Lily « Pirate de lumière » (2024) 400 pages

Autrice: née le 18.08.1987 dans le Vermont.
Elle est l’autrice du récit « Motocycles I’ve Loved », des mémoires.
« Minuit dans l’univers », son premier roman, a été traduit en dix-sept langues et adapté à l’écran.
Best-seller USA Today, « Pirate de lumière » a été distingué par le Good Morning America Book Club, le Books We Love de NPR et le choix des éditeurs du New York Times. Elle vit à Los Angeles.

Gallmeister – 02.05.2024 – 400 pages ( The light pirate 2022 – Traduit de l‘américain par Juliane Nivelt) 

Résumé: 

Née pendant le pire ouragan que la Floride ait connu, Wanda en porte le nom et les stigmates. Dans cet avenir proche, la hausse du niveau des océans, les canicules, mais surtout des tempêtes dantesques rendent une grande partie du monde inhabitable. Le père de Wanda, Kirby, un « lignard » qui répare les lignes électriques constamment endommagées, refuse d’émigrer vers le nord. Alors, au fil des années, Wanda grandit en s’adaptant au remodelage de son environnement. Sa voisine Phyllis, une scientifique, lui apprend à survivre et à déceler les prémices de ce que leur réserve l’avenir. Mais partout autour d’eux, la civilisation se replie vers des territoires moins exposés et ceux qui s’obstinent à rester sont confrontés à la sauvagerie de la Nature comme à celle de leurs semblables.
Un roman poignant et élégant. Une ode à la résilience.

Dans les remerciements cette information:
ce roman a pour décor la ville imaginaire de Rudder, en Floride du Sud-Est, un endroit bien réel, brutalement arraché aux tribus indigènes qui vivaient là depuis des milliers d’années. Le roman se déroule sur la terre natale non cédée des peuples Séminoles et Miccosukee, qui l’occupent encore à ce jour. Ces terres étaient également la demeure ancestrale des Tequesta, des Calusa et des Jeaga. 

Mon avis:

Je dois dire que j’ai été attirée par la couverture que je trouve magnifique qui m’a donnée envie de faire connaissance avec Wanda, qui nait pendant l’ouragan alors que sa mère décède.
Il m’a fallu arriver à la deuxième partie du roman pour commencer à accrocher . La première partie, en gros tout ce qui concerne l’ouragan, est certes impressionnante mais pas mieux évoquée que l’arrivée d’autres ouragans traités dans mes lectures (Sara Gran «La ville des morts» – Laurent Gaudé «Ouragan»- Dolores Redondo «La face nord du cœur» – ) C’est dramatique mais c’est un peu un de plus… Ce n’est pas que la lecture m’a laissée indifférente, c’est bien écrit, mais j’ai eu une impression de déjà-vu… Il faut dire que malheureusement le téléjournal nous présente régulièrement des images et des reportages sur le sujet…
La deuxième partie m’a fait penser parfois à «Là où chantent les écrevisses» de Delia Owens.
Vous me direz que j’exagère avec mes « me fait penser »… je confirme mais voilà.. Notez que j’avais eu le coup de coeur pour les écrevisses ce qui est plutôt bon signe…  mais qui ôte en quelque sorte une partie de personnalité propre au roman… un petit peu de celui-ci, et un peu de l’autre sans personnage marquant… J’ai beaucoup apprécié le personnage de Phyllis et sa relation avec Wanda. Phyllis est une scientifique,  biologiste de formation et a un projet d’observation de la faune et de la flore locale qui va passionner Wanda. Pour le reste les personnages ne m’ont pas touché outre mesure même si les circonstances sont difficiles.

La Floride – et le reste des Etats Unis va suivre – est synonyme de pauvreté, de malheur, d’effondrement, de désespoir, la fin du monde est proche. La faute au réchauffement climatique et au pouvoir qui n’a rien anticipé. Les ouragans qui déferlent et la côte qui disparait à chaque coup de boutoir des vagues. Il n’y a plus de routes, les arbres sont arrachés, les maisons détruites… et les habitants désertent… Et comme cela coute cher, on privilégie les grandes agglomérations et on abandonne les petites localités à leur triste sort.
Pourquoi dès que le bouleversement climatique touche la Floride cela devrait m’interpeller davantage? Certes la mer monte, le climat change, des zones entières vont être submergées et personne ne s’en préoccupe. Alors oui le constat est terrifiant mais j’ai eu l’impression de voir le X-ième reportage catastrophe du journal télévisé. L’ouragan est passé, tout est détruit… Il y a ceux qui partent et ceux qui restent… La vie se réorganise.. ou pas…
Quand les personnages ne me touchent pas, je passe à coté de l’histoire… Je trouve juste que ça colle malheureusement trop à la réalité et que les personnages sont pour ainsi dire au second plan et je ne m’y attache pas .. mais c’est pas une mauvaise lecture.
La fin du roman, une fois Phyllis disparue et Bird Dog ayant fait son apparition m’a bien plu.
Et la bioluminescence et sa transmission a éclairé la fin du roman.
Ce ne fut pas un coup de coeur mais je ne regrette pas cette lecture. Je ne pense pas que je vais m’en souvenir longtemps…

Extraits: 

Une surstimulation. Une hypervigilance. De l’anxiété déguisée en intuition. Quoique – et si c’était le contraire ? Une prémonition palpitante qu’elle s’efforce d’étouffer ? 

L’amour dans cette maison est une denrée rare. Sous tension. Transactionnelle.

Le moment le plus significatif de sa vie est indissociable du sifflement d’un ouragan, un entonnoir sombre de chagrin surplombé d’un œil éclatant 

Ensemble, ils préparent la maison, ferment ses yeux brillants en prévision de l’orage, abaissant chacune de ses paupières en contreplaqué.

Les scénarios environnementaux les plus catastrophiques sont en train de se réaliser. Chaque recoin du globe est affecté par des bouleversements politiques et des crises humanitaires. Ce ne sont plus seulement les nouvelles du soir qui lui serrent le cœur. C’est la sonnerie du réveil au matin. Le passage du temps et l’érosion que celui-ci entraîne.

Ils ont beau être assis l’un près de l’autre et vivre le même enfer, ils sont seuls.

En à peine une décennie, leurs propriétés sont passées de front de plage à front de mer à englouties par les vagues. 

Le mot “terrain” peut signifier beaucoup de choses, poursuit-elle. C’est un de ces termes qui a plusieurs vies. Un terrain peut être une étendue de terre. Ou se référer à un champ d’expertise. On parle aussi d’occuper le terrain, de terrains de sport et parfois, le mot terrain désigne l’endroit où les gens se battent, quand ils sont en guerre. En écologie, le terrain, c’est là où on rassemble des données. Dans la nature.

Au moment de sa mort, il avait l’impression de la connaître à peine. Après avoir vécu avec son fantôme pendant dix ans, il est devenu un expert.

Parce qu’elle a tout de suite compris que tu étais une fille puissante, alors elle a voulu te donner un nom puissant, dit Lucas. Et Wanda est le nom le plus puissant qui soit.

Elle voulait que tu saches d’où tu viens. Et tu viens d’un ouragan. Les ouragans peuvent être difficiles et les gens ne les apprécient pas toujours, mais ils sont importants. Ils font partie de la nature. Tu viens de… Euh… (Il lance un coup d’œil à son fils, perdu.) De…
— Des éléments, dit Lucas. Tu es sauvage.

Les humains ont généré beaucoup de chaos, heureusement la nature est pleine de ressources.

N’oublie pas, l’adaptation, c’est toujours une histoire de survie : soit celle de l’individu, soit celle de l’espèce.

Il est épuisé. Pourtant si habitué aux efforts physiques, son corps ignore comment canaliser ces tourbillons émotionnels. Son cœur est endolori, pareil à un muscle trop sollicité.

Un mensonge. Un scientifique sait que rien n’est jamais certain.

Qu’était la magie, sinon un phénomène scientifique pas encore compris ? Qu’était la science, sinon un tour de magie doté d’une explication ?

Le chat. Elle ne saurait dire s’il la suit ou s’il la fuit. Les deux, probablement. C’est une des raisons pour lesquelles elle comprend si bien ces créatures. La peur et le désir, inextricablement liés, comme les pièges qu’elle se refuse à poser.

Avant, la dissolution de la société leur donnait l’impression d’être libérées d’une structure qui n’avait plus de sens. Elles éprouvaient du soulagement, et de l’excitation, aussi. Dès que le dernier lien avec la civilisation extérieure fut rompu, cependant, l’isolement commença à leur peser.

Ainsi va la survie. Le corps protège l’esprit, l’esprit protège le cœur et le cœur oublie que sa vocation est d’être vulnérable, qu’il faut être brisé pour rester entier.

Les souvenirs d’enfance se déposaient sur sa peau comme du pollen. Il suffisait d’une bourrasque pour tout envoyer balader.

Certaines paroles n’ont pas besoin d’être prononcées lorsque deux corps sont devenus une seule et même forme.

Elles connaissent toutes deux la forme ondoyante de la souffrance, qui mute et s’estompe sans jamais s’éteindre. Cette constance est la source d’un étrange réconfort. Se rappeler ce qu’on a perdu, c’est aussi se rappeler ce qu’on a eu.

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