Quirós, Mariano « Rio Negro » (2014)
Résumé : Le río Negro, dont les flots autrefois sauvages inspiraient toutes sortes de légendes, n’est plus à présent que l’ombre de lui-même : ses eaux polluées se contentent de charrier péniblement déchets et cadavres. Un couple d’intellectuels reconnus est pourtant parvenu, durant une vingtaine d’années, à vivre paisiblement aux abords de cette rivière encombrée de secrets. Mais un jour, à vouloir « faire l’éducation » de leur fils, un adolescent aussi apathique qu’introverti, le père de cette petite famille sans histoire découvre que la mort peut surgir de sources étonnamment proches… Les deux hommes se trouvent alors pris dans un engrenage sanglant digne d’un film noir des frères Coen. Macabre et burlesque.
Mon avis : Dès le début, l’auteur pose la non relation entre le père et le fils. Mais quand la mère décide de les laisser seuls les deux une semaine, il faut bien tenter le rapprochement ! Déjà que la vie n’était pas géniale avant, il suffira qu’elle les laisse seuls pour que cela tourne au cauchemar. Une relation père-fils sous tension. Le père, un écrivain de 55 ans et le fils, un adolescent apathique qui n’a envie de rien et que rien n’intéresse. Conflit de génération. Le père voudrait faire bouger le gosse… un vrai désastre.. De plus, ni le père ni le fils ne sont des personnages sympathiques et aucun des deux n’est doué pour la communication. Chacun son monde et tout rapprochement est utopique ; un monde les sépare.. Le récit établit un parallèle nostalgique entre la vie du père et le fleuve. Avec les années, tout le charme a disparu, les rives du fleuve et l’esprit et la vie du personnage ont été pollués, l’espoir et le charme ont disparu. Le refus de prendre les choses en main et l’indécision fait que les choses s’enchainent très très mal… au gré des renoncements et des fuites..
En rentrant d’Argentine, j’ai eu envie de lire ce livre, car j’avais vu le « Rio Negro ».. Mais pas celui-là.. Moi j’ai vu le beau Rio Negro celui de Patagonie : pas celui-ci, du Nord du pays.
Je ne peux pas dire que c’est une lecture que j’ai aimée. Trop défaitiste et trop désenchanté pour moi.. Même si je ne déconseille pas le bain dans les eaux noires du fleuve..
Extraits :
On n’espérait rien, ni l’un ni l’autre ; et on ne s’est jamais déçus. Bref, on savait exactement ce qu’on pouvait attendre l’un de l’autre.
Parler avec mon fils, c’est marcher sur un fil de fer barbelé.
Ce qui me sauve, dans ces cas-là, c’est ma profession : être écrivain permet de se montrer impoli, d’afficher soudain un air méditatif ou de froncer les sourcils comme quand on cherche la solution d’une énigme.
L’unique ambition de ces jeunes, c’est la survie et cette survie implique de pourrir la vie des autres.
D’habitude, le silence qui règne à l’intérieur de la maison est agréable, mais là, c’est différent : on dirait qu’un ennemi, caché dans un coin, est prêt à me sauter dessus. C’est en partie à cause de ça que je marche sur la pointe des pieds, ou presque, et que je guette tout ce qui pourrait arriver d’un côté comme de l’autre.
Avant de me rouler un joint, je réfléchis aux avantages et aux inconvénients de le fumer maintenant : d’un côté, ça m’apaisera, mais d’un autre, ça me rendra plus lent et peut-être aussi plus maladroit. La seule chose de sûre, c’est que je vais le fumer quoi qu’il arrive, alors autant s’appliquer à se le rouler correctement, ce joint.
Nous raccrochons et mon thorax se contracte de douleur, comme si un vide me comprimait de l’intérieur.
Mon vieux a raison de dire que ceux qui se donnent des airs d’artiste sont tous les mêmes : quand il s’agit de jacasser, c’est à gauche mais dès qu’il faut palper du fric, ça vire à droite.
Il n’était pas plus de six heures du soir, mais il faisait déjà sombre, en partie à cause des arbres qui, de chaque côté de l’avenue, formaient une sorte de galerie gothique.
Ce qu’il y a de bien avec les motos, c’est qu’elles vous donnent la sensation d’être un homme libre, vous savez, un peu comme Che Guevara, James Dean ou Dennis Hopper, tous en quête de leur destinée.