Penny, Louise «La nature de la bête» (2016)

Penny, Louise «La nature de la bête» (2016)

La série des enquêtes de l’inspecteur Armand Gamache

Tome 11 : La nature de la bête  ( paru au Canada en septembre 2016)

Résumé : Chaque jour, ou presque, le jeune Laurent Lepage invente une catastrophe : des dinosaures dans le village, des arbres qui marchent, un débarquement d’extraterrestres. Le garçon de neuf ans à l’imagination si fertile que plus personne ne le croit. Pas même Armand Gamache et Reine-Marie, qui ont pris leur retraite à Three Pines. Cependant, quand l’enfant disparaît, il faut bien envisager que l’une de ses histoires puisse être vraie. Une traque effrénée se met en branle pour le retrouver. Au fin fond de la forêt, Gamache et ses anciens lieutenants de la SQ, Jean-Guy Beauvoir et Isabelle Lacoste, déterrent de sombres secrets qui mènent à un meurtre, à une trahison et à Ruth Zardo, la vieille poète excentrique. Un monstre est autrefois venu à Three Pines, il y a semé le malheur, et le voilà de retour. En refusant de prêter foi à un enfant, l’ex-inspecteur-chef n’a-t-il pas joué un rôle funeste dans ce qui est arrivé ?

Mon avis : Armand Gamache en retraite anticipée… Vous y croyez, vous ? Pénard, tranquillou en train de couler des jours heureux avec sa femme et son chien … Faites confiance à Louise Penny, ça ne va pas durer ! J’ai beaucoup aimé cette enquête « passation de jalon » entre lui et Isabelle Lacoste. N’étant pas canadienne j’ai appris des choses sur la justice de ce pays qui peut demander des procès à huis clos en cas de crimes atroces. J’ai également fait la connaissance de l’ingénieur canadien Gerald Bull, assassiné le 22 mars 1990 à Uccle (Bruxelles) ; une enquête passionnante où j’ai retrouvé avec plaisir Gamache et son clan, les habitants de Three Pines. Attention si l’idée est inspirée d’un fait réel cela demeure un roman et ce n’est pas l’histoire de ce fait divers. J’ai aussi aimé les sujets abordés : la retraite, la relation entre le concepteur et l’objet, entre le créateur et la création, et comme toujours les analyses de caractères et la psychologie des personnages. Le côté obscur des gens, les failles, la lumière, les remords, les regrets, le poids du passé … un tout bon Gamache donc !

Extraits :

Il reste la partie amusante. Rebâtir.

Mais ils savaient l’un et l’autre que les mots sont des armes, eux aussi. Quand ils forment un récit, leur pouvoir est presque sans limites.

Ce mot incongru s’était échoué sur son rivage et y avait planté des racines, des vrilles. Mot liseron.
Après.

Elle était encore étonnée et ravie par l’existence d’un maintenant.
Et voilà que l’après avait envahi le maintenant.

À vrai dire, elle savourait encore l’ici et maintenant. Mais, sur la ligne d’horizon, l’après s’approchait lentement.

Quand elle était bouleversée, Reine-Marie aimait hacher, mesurer, touiller. Suivre une recette. En cuisine, tout est en ordre. Pas d’approximations. Pas de surprises.
C’était à la fois créatif et apaisant, le résultat, réconfortant et prévisible.

BIEN voulait dire bête, inquiet, emmerdeur, névrosé.

Des livres d’histoire. Des ouvrages de référence. Des biographies. Des romans, des essais. Des récits s’alignaient sur les murs, les isolaient du monde extérieur en même temps qu’ils les raccordaient à lui.

— Chhh ? fit Myrna. C’est le bruit que font les secrets qui s’échappent de toi ?

La création est-elle indissociable de son créateur ? Est-ce important de faire la différence ?

Savoir ne rimait pas toujours avec pouvoir. Savoir était parfois paralysant.

Et voilà que, du fond de son cachot, il avait réussi à s’évader. À se faufiler entre les barreaux. Par le verbe.

La nature, elle le savait, a horreur du vide, et les villageois, face à un vide d’information, y engouffraient leurs propres peurs. La ligne de démarcation entre les faits et l’invention, le réel et l’imaginaire, devenait floue. Les amarres qui retenaient chacun aux bonnes manières s’effritaient. On les voyait, les entendait, les sentait se désagréger.

Pour un tueur, le chaos est un refuge.

Il aperçut la vieille gare, les volets clos. Le lien ferroviaire avait été sectionné, à la façon d’une artère, et le village, naguère dynamique, avait dépéri. À petit feu.

Au cas où vous ne l’auriez pas remarqué, il s’agit d’une représentation assez fidèle d’une enquête pour meurtre. Toutes sortes de fragments à première vue sans lien et insignifiants qui, une fois réunis, forment un tout mortel.

Tout ce que je veux dire, c’est que certains camouflent leur côté sombre et d’autres leur lumière. Quant à toi, mon ami, c’est un croissant que tu as à l’intérieur.

Penny, Louise : La série des enquêtes de l’inspecteur Armand Gamache

Photo : Neil Young (Montreux 2016)

One Reply to “Penny, Louise «La nature de la bête» (2016)”

  1. Comme souvent, je n’ai rien à ajouter à ton excellent commentaire ! Moi aussi, j’apprécie vraiment cette série qui me rend curieuse des événements ou descriptions des lieux, même imaginaires comme Three Pines mais qui sont quand-même inspirés de vrais endroits.
    Au premier abord, cette histoire de super canon m’a parue un peu bizarre mais grâce à mes recherches, j’ai comme toi trouvé l’existence réelle de Gérald Bull et de ces études sur le super canon
    Je vais de ce pas me plonger dans le roman suivant

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