Kawamura, Genki «Et si les chats disparaissaient du monde…» (2018)

Kawamura, Genki «Et si les chats disparaissaient du monde…» (2018)

Auteur : Genki Kawamura est l’auteur de plusieurs textes de fiction, d’essais et d’interviews, qui ont tous été acclamés par la critique comme par le public. Il est aussi réalisateur de films, notamment Confessions (2010), Wolf Children (2012), Parasite (2014) et The Boy and the Beast (2015). Et si les chats disparaissaient du monde (paru chez Fleuve Éditions en 2017 sous le titre Deux milliards de battements de coeur) a été un phénomène dès sa parution. Il s’est vendu à 1,3 million d’exemplaires au Japon et est en cours de traduction dans plusieurs pays. Il a également fait l’objet d’une adaptation cinématographique.

Pocket 08.11.2018 – 166 pages – Diane Durocher (Traducteur) – paru aussi sous le titre « Deux milliards de battements de cœur »

Résumé : De quoi avons-nous réellement besoin pour vivre ?  » Il paraît que la durée de vie des mammifères est invariablement de deux milliards de battements de coeur, qu’ils soient très lents ou très rapides. Pour les éléphants, cela correspond à cinquante ans. Les chevaux, vingt. Les chats, dix. Les souris, deux. Pour les humains, le compte est bon aux alentours de soixante-dix années.  » Trente ans.
C’est l’âge du narrateur de cette histoire. Et son médecin est formel : il est atteint d’une maladie incurable, il ne lui reste plus que quelques semaines à vivre. D’émotion, il perd connaissance de retour chez lui. Au réveil, deux visages sont penchés au-dessus de sa tête : celui de son chat et celui de son sosie… version extravertie ! Cet homme haut en couleur est le Diable en personne. Et il lui propose un marché : chaque jour, supprimer quelque chose du monde réel pour gagner vingt-quatre heures de vie supplémentaires. Il accepte.
Quelques journées extraordinaires passent, où, confronté à des choix difficiles et à leurs conséquences pour ceux qu’il aime, il apprend à réévaluer son existence, son histoire, sa place dans le monde. Et puis, au cinquième jour, le Diable lui propose de supprimer les chats. La vie du narrateur va alors basculer une deuxième fois…

Mon avis : Alors bien sympa, passé un bon moment mais un peu (beaucoup) restée sur ma faim.  La réflexion sur les choses utiles et inutiles, sur l’importance de certaines choses dans notre vie, la place que des éléments qui sont tout sauf fondamentaux ont pris jusqu’à devenir essentiels, l’importance des rapports humains, l’égoïsme méritent qu’on relativise et qu’on rende leur juste place aux choses. C’est surtout une réflexion sur nos choix de vie, sur nos regrets et le regard sur notre vie passée, une analyse des bons moments, du deuil, sur le temps qui est passé, qui passe et qui nous es imparti, c’est une prise de conscience sur l’importance des objets et des choses.
Mais malheureusement il a manqué un petit quelque chose, une émotion pas assez palpable peut-être. Mais un joli moment de lecture qui genère des sourires, des interrogations, et quand même une petite touche d’émotion…  Alors ? le chat ? disparaitra ? disparaitra pas ? je vous laisse le découvrir. Joli moment mais légère déception quand même.
(Petite réflexion marketing : sous le titre Deux milliards de battements de cœur jamais je n’aurais acheté le livre)

Extraits :

Un objet rond et dense, noir et blanc, se trouvait juste sous mes yeux. L’objet faisait « Miaou ». J’ai effectué la mise au point. C’était un chat.
Mon chat, d’ailleurs, qui vit avec moi depuis maintenant quatre ans.

C’était terrible. J’ai compulsé la liste de mes contacts. Les noms défilaient à toute allure sur l’écran de mon portable. Aucun ne m’inspirait ; finalement, ils n’étaient rien de plus, pour moi, que des numéros. D’innombrables personnes avec lesquelles j’avais l’impression d’avoir un lien, mais ce lien s’évaporait aussitôt que j’y pensais.
J’étais sur le point de mourir, et je n’avais personne à appeler. Je vivais dans un réseau de liens sociaux tissé d’apparences.

En vingt ans d’existence, les portables avaient réussi à asseoir leur domination sur nous. Alors qu’ils ne manquaient à personne avant leur invention, désormais, on ne pouvait plus s’en passer. En créant les téléphones portables, les humains avaient créé par la même occasion le manque et l’angoisse de ne pas l’avoir en permanence sous la main.

Et aussi, tu avais beau parler des heures et des heures au téléphone, lorsqu’on se rencontrait, tu ne faisais jamais l’effort d’aligner trois phrases.

En échange de pouvoir joindre son interlocuteur à tout moment, le téléphone nous avait dérobé le temps de rêver, d’imaginer l’autre.

J’ai plongé la main dans ma poche, à la recherche de mon portable.
Ah mais non. Suis-je bête.
Quelle frustration… Je voulais lui annoncer sur-le-champ ma trouvaille. J’ai reculé pour mieux observer le cinéma.
J’ai alors compris que cette sensation était exactement la même que lorsque, étudiant, j’attendais ses coups de fil. C’est ça, penser à l’autre : c’est ce sentiment de ne pas pouvoir communiquer avec lui dans l’instant.

Les plus amers regrets sont ceux d’un futur que l’on ne connaîtra jamais. Les regrets ne s’appliquent pas qu’au passé… Dans ma tête, à chaque instant, j’entendais cette triste litanie : Si seulement je vivais ! Je ferais ceci, cela… On se rend compte à quel point toutes ces aspirations sont illusoires, contingentes. Qu’elles se réalisent ou non, qu’elles aient existé ou pas, c’est sans importance.

Finalement, plus les choses étaient « inutiles », plus il me semblait qu’on en avait « besoin ». Après tout, pour créer un être humain, il suffit d’assembler une multitude de composants futiles. Moi, par exemple : je suis façonné par les centaines de films que j’ai vus. Ils imprègnent ma mémoire.

Certains disent que les chats ne pensent qu’à dormir, c’est faux : en quatre ans, je n’ai pas réussi à faire une seule grasse matinée à cause de lui.

On n’a pas de famille. On fait une famille. Finalement, les liens du sang ne sont rien. Nous ne sommes que des individus. Nous n’avons pas fait d’efforts. Ça allait de pire en pire, et nous n’avons rien fait.

— Vivre n’est pas une fin en soi. C’est la façon dont nous vivons qui compte.

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