Bertholon, Delphine « Dahlia » (2021)
Autrice : Delphine Bertholon, née en 1976 à Lyon, est une romancière et scénariste française. Elle vit à Paris dans le 11e arrondissement. Après des études de lettres, elle se destine au professorat, mais y renonce pour se consacrer à l’écriture.
Romans : Les Dentelles Mortes, 1998 (Prix du roman de la Ville de Villeurbanne) – Cabine commune, 2007 – Twist, 2008 – L’Effet Larsen, 2010 – Ma vie en noir et blanc, 2011 – Grâce, 2012 – Le Soleil à mes pieds, 2013 – Les Corps inutiles, 2015 – Cœur-Naufrage, 2017 – Celle qui marche la nuit, 2019 – Dahlia, 2021
Flammarion, 17.03.2021 – 231 pages
Résumé : Début des années 1990, dans le sud de la France. Lettie, quatorze ans, vit avec sa mère dans un mobile home et brûle secrètement d’être quelqu’un d’autre. Quand survient Dahlia, une fille un peu étrange, une ardente amitié se noue entre ces adolescentes que tout semble opposer. Dahlia a deux jeunes frères, des parents généreux, et Lettie voit dans le père de son amie l’homme idéal, celui qui lui a toujours manqué.
Chacune envie l’autre ; qui sa tranquillité, qui sa famille joyeuse. Mais le jour où Dahlia lui confie un secret inavouable, Lettie ne parvient pas à le garder. La famille de son amie vole en éclats. Au milieu du chaos, le doute : et si Dahlia avait menti ? Delphine Bertholon explore le lien ambigu entre adolescence et vérité, et les frontières floues qui nous séparent du passé.
Mon avis : Alors ce n’est pas le coup de foudre espéré. C’est un livre qui traite de sujets importants, comme le viol, l’absence d’un père, l’arrivée de frères et sœurs dans une famille, l’injustice, la vérité et le mensonge, les relations entre adolescents, les problèmes engendrés par les différences sociales, la jalousie, les amitiés exclusives, la confiance, les relations familiales, l’impact du vécu dans les décisions que l’on prend, la trahison, le doute, la culpabilité, mais je n’ai pas ressenti d’émotions en lisant ce livre, car je n’ai pas réussi à ressentir d’empathie ou d’amitié pour les personnages. C’est resté au niveau factuel. Et pourtant le sujet est brûlant.
J’ai beaucoup aimé les titres donnés aux parties du roman – Etincelle, Embrasement, Combustion – qui reflètent exactement les trois états d’esprit. J’ai bien aimé mis il m’a manqué un petit quelque chose.
Je suis aussi allée voir la signification du Dahlia dans le langage des fleurs :
Le dahlia, une des fleurs à la double symbolique
Son nom fait hommage au botaniste suédois Anders Dahl. Provenant des régions chaudes du continent américain, le dahlia débarque en France au XIXe siècle. Au départ, on voulait l’utiliser comme denrée alimentaire, car son goût se rapprocherait de celui de l’artichaut. Mais sa grande beauté en a rapidement fait une fleur d’ornement. La symbolique de cette fleur est très large et dépend du contexte dans lequel elle est offerte. En effet, elle peut aussi bien être l’avertissement d’un danger ou d’une trahison que le souhait d’un mariage heureux. À l’époque victorienne, le dahlia était l’incarnation de l’élégance.
Extraits :
Même pour les mots, nous étions du genre anorexique. Sauf, bien sûr, quand elle était grise. De ce point de vue, je lui ressemble beaucoup : de taiseuse à fontaine, si le vin coule à flots. Une histoire de lâcher-prise, j’imagine.
Je pourrais dire, peut-être, qu’elle ne ressemblait pas à son prénom. Dahlia était sèche et brune, toute en angles et vêtue de noir.
J’avais été fascinée par ce bazar organisé, par la douceur de Francesca, par l’énergie des jumeaux, par cette vie qui suintait par tous les pores, comme si cette maison était une peau, une peau souple, à la fois tendre et tendue.
« J’ai une famille entière, mais je n’ai rien à moi. » Elle avait l’air si triste quand elle disait cela, semblait porter en elle toute l’injustice du monde.
Je savais que les gens n’étaient pas toujours ce dont ils avaient l’air.
Le chagrin, quand ça vient, faut le laisser sortir. Mais dans ces cas-là, c’est mieux de pas être seul. Crois-en mon expérience.
Parfois, on se trompe, riposta froidement ma mère. Y compris avec les gens qu’on connaît le mieux. Surtout, même, avec les gens qu’on connaît le mieux.
Je dois l’avouer, jamais je n’aurais pensé que cette gamine fascinée par ses ongles ferait une telle carrière. Elle aura finalement quitté le tunnel pour ne garder que la vue mer. Je ne peux pas en dire autant.
« Je voulais qu’à moi aussi, il arrive quelque chose. Il ne m’arrive jamais rien. »
Sa voix s’était cassée, la détresse enroulée autour des cordes vocales.
Toutes les victimes savent l’odieux paradoxe : elles devront prouver ce qui leur est arrivé. On mettra leur récit en doute, on pointera leurs faiblesses, on exhumera leur passé. Aux violeurs et aux casseurs de femmes, on cherchera des « circonstances atténuantes » : sa robe était trop courte, elle avait trop bu, elle rentrait de boîte par une ruelle sombre, elle avait poussé son compagnon à bout, elle était infernale ou de mœurs légères – de quoi décourager les plus vaillantes.
Plus jeune, j’ai passionnément aimé Paris ; mais je suis trop vieille maintenant. Trop pauvre aussi. La bohème, passé trente ans, devient beaucoup moins romantique.
J’ai grandi en herbe folle, dans un jardin bien entretenu
je souligne cette phrase de Joyce Carol Oates, à la fin de Viol, une histoire d’amour : « La vérité n’est qu’une attirance parmi d’autres, et pas toujours la plus puissante. »