Ishiguro, Kazuo « Klara et le soleil » (RL2021)

Ishiguro, Kazuo « Klara et le soleil » (RL2021)

Auteur : Né  à Nagasaki le 8 novembre 1954 (Japon) Kazuo Ishiguro est le fils de Shizuo Ishiguro (océanographe) et de  Shizuko. D’origine japonaise et naturalisé britannique en 1983 il est à la fois écrivain, romancier, musicien et scénariste . Ishiguro suit ses études de littérature et de philosophie dans les universités du Kent et d’East Anglia, et est employé comme travailleur social à Glasgow et à Londres. Le 5 octobre 2017, il obtient le prix Nobel de littérature car « il a révélé, dans des romans d’une grande force émotionnelle, l’abîme sous l’illusion que nous avons de notre relation au monde », selon l’explication de l’Académie suédoise.

Kazuo Ishiguro écrit tous ses livres en langue anglaise, bien qu’il ait été élevé par des parents japonais, dans un foyer où l’on parlait cette langue. À l’exception du Géant enfoui (2015), tous ses romans sont rédigés à la première personne.
Gallimard – Collection Du monde entier – 19.08.2021 – 383 pages – Anne Rabinovitch (Traducteur)

Résumé :

Klara est une AA, une Amie Artificielle, un robot de pointe ultraperformant créé spécialement pour tenir compagnie aux enfants et aux adolescents. Klara est dotée d’un extraordinaire talent d’observation, et derrière la vitrine du magasin où elle se trouve, elle profite des rayons bienfaisants du Soleil et étudie le comportement des passants, ceux qui s’attardent pour jeter un coup d’oeil depuis la rue ou qui poursuivent leur chemin sans s’arrêter.
Elle nourrit l’espoir qu’un jour quelqu’un entre et vienne la choisir. Lorsque l’occasion se présente enfin, Klara est toutefois mise en garde : mieux vaut ne pas accorder trop de crédit aux promesses des humains…
Après l’obtention du prix Nobel de littérature, Kazuo Ishiguro nous offre un nouveau chef-d’œuvre qui met en scène avec virtuosité la façon dont nous apprenons à aimer. Ce roman, qui nous parle d’amitié, d’éthique, d’altruisme et de ce qu’être humain signifie, pose une question à l’évidence troublante : à quel point sommes-nous irremplaçables ?

Mon avis :
Toujours un peu hors de ma zone de confort de lire des romans d’anticipation et pourtant j’y prends de plus en plus de plaisir. Mais ici l’action se passe dans un futur proche car les anciens se souviennent de notre monde, ou il y avait davantage d’humanité.
Bienvenue dans le monde de l’Amitié Artificielle. Une jeune fille malade choisit une jeune Robot pour devenir son amie. Elle aurait pu choisir un robot de la nouvelle génération B23ème série mais son choix se porte sur Klara, de type AA. La mère accepte ce choix mais on verra au fil de l’histoire qu’elle attend autre chose de Klara.
Ce roman est un roman sur l’amitié sur l’amour, sur les relations mère-fille, sur l’ombre et la lumière, sur les dégâts de la pollution. On y vénère en quelque sorte le Dieu Soleil, l’énergie solaire qui recharge les organismes.
C’est aussi un roman sur les inégalités sociales, sur la différence de traitement entre les gens, sur le remplacement des intelligences humaines par des robots, le danger de la méritocratie, sur la solitude, sur l’égoïsme, sur l’obsolescence.
Klara est un robot et son rôle est de protéger Josy. Et elle va le faire jusqu’à se sacrifier pour elle. C’est surtout un robot qui observe, analyse mais ressent les gens, et est en cela bien plus humaine que les humains. Elle est de fait la narratrice du roman, toujours en retrait, prête à se plier aux exigences des humains.
Je regrette toutefois que sa façon de s’exprimer fasse qu’elle est toujours restée trop dans son rôle de robot et pas assez dans celui d’amie, de fait elle reste un objet utilitaire au lieu d’être une personne à part entière dans la famille dont elle partage pourtant la vie.

Mais, comme c’est souvent le cas quand je lis des auteurs asiatiques – je pense que c’est aussi par manque de connaissance de leur culture et de leurs habitudes – je ressens toujours une froideur, un manque de chaleur humaine, un net déficit d’empathie envers les personnages … et c’est toujours une mini frustration pour moi.

 

Extraits :

Ce doit être merveilleux. De n’avoir rien à regretter. De ne pas avoir envie de revenir en arrière. De ne pas songer sans cesse au passé.

Quelquefois, dit-elle, à des moments particuliers comme celui-ci, les gens ressentent une douleur dans leur joie.

Je suis surprise qu’une personne souhaite avec autant de vigueur suivre une voie qui la plongera dans la solitude.
-Est c’est ce qui vous surprend ?
-Oui. Jusqu’à ces derniers temps, je ne pensais pas que les humains pouvaient choisir la solitude. Que le désir de ne pas être seul pouvait être balayé par une force plus puissante.

Notre génération reste attachée aux sentiments d’avant. Une partie de nous-mêmes refuse de lâcher. C’est la partie qui s’obstine à croire qu’il y a quelque chose d’inatteignable au fond de chacun d’entre nous. Quelque chose d’unique, qu’il est impossible de transférer.

Croyez-vous au cœur humain ? Je ne me réfère pas simplement à l’organe, bien sûr. Je parle dans le sens poétique. Le cœur humain. Pensez-vous qu’une telle chose existe ? Cette chose qui rend chacun de nous spécial et unique ? Et à supposer que ce soit le cas. Ne croyez-vous pas que pour apprendre Josie comme il faut, vous devrez étudier non seulement ses traits particuliers, mais ce qui est enfoui en elle ? Ne devrez-vous pas apprendre son cœur ?

« Le cœur dont vous parlez, dis-je. Il est possible que ce soit la partie de Josie la plus difficile à apprendre. Comme une maison avec beaucoup de pièces. Même ainsi, une AA dévouée, si elle dispose d’un certain temps, pourrait visiter chacune de ces pièces, les étudier tour à tour avec soin, et finir par les habiter comme sa propre maison. »

One Reply to “Ishiguro, Kazuo « Klara et le soleil » (RL2021)”

  1. La froideur est peut-être une apparence qui correspond à la réserve nippone et, si c’est le cas, Klara serait une humaine ressemblante en tout point, y compris la difficulté d’exprimer ses émotions qui demeurent enfouies au fond d’elle-même.
    Et si c’était pour dire qu’à défaut de montrer des robots humains, ce sont les humains qui se déshumanisent ?

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