Claudel, Philippe « La petit fille de Monsieur Linh » (2005) – 183 pages

Claudel, Philippe « La petit fille de Monsieur Linh » (2005) – 183 pages

Auteur: écrivain et réalisateur français, né le 2 février 1962 à Dombasle-sur-Meurthe (Meurthe-et-Moselle). Prix Renaudot en 2003 pour son roman « Les Âmes grises ».

Stock – 24.08.2005 – 159 pages / Livre de poche – 29.08.2007 – 183 pages

Résumé:
 » C’est un vieil homme debout à l’arrière d’un bateau. Il serre dans ses bras une valise légère et un nouveau-né, plus léger encore que la valise. Le vieil homme se nomme Monsieur Linh. Il est seul désormais à savoir qu’il s’appelle ainsi. Debout à la poupe du bateau, il voit s’éloigner son pays, celui de ses ancêtres et de ses morts, tandis que dans ses bras l’enfant dort. Le pays s’éloigne, devient infiniment petit, et Monsieur Linh le regarde disparaître à l’horizon, pendant des heures, malgré le vent qui souffle et le chahute comme une marionnette.  »

Mon avis:
J’ai fait connaissance avec une fillette – ou devrais-je dire un bébé –  qui a pour nom « Sang Diû », qui se traduit par « Matin calme »  et un vieux Monsieur qui fuit son pays après que toute sa famille ait été tuée. Il a pour tout bagage une photo et un peu de terre, et une petite fille qu’il a toujours tout contre lui.
J’ai également fait la connaissance de Monsieur Back, un gros homme veuf qui fume beaucoup…
Ces deux personnages vont se rencontrer sur un banc et se lier d’amitié et se reconnaitre dans leur besoin de chaleur humaine. Ils ne parlent pas la même langue, ils n’ont pas la même culture, mais ils communiquent par le regard, les émotions.
Tous deux sont seuls et désemparés face à la solitude et au bouleversement de leur vie. Monsieur Linh est déraciné, il a perdu toute sa famille, ses repères et se raccroche à sa petite Sang Diû qui est tout pour lui. Après un voyage en bateau, il arrive en terre inconnue, totalement déboussolé et se retrouve dans un dortoir pour réfugiés avant d’être transféré dans un endroit qui est à mi-chemin entre un home pour personnes âgées et un mouroir. Monsieur Back a perdu sa femme et est lui aussi à la dérive.
C’est un livre sur la solitude, le deuil, l’exil, mais aussi sur l’amitié, l’attachement aux choses et aux êtres, la communication entre les êtres.
Tao-laï signifie « Bonjour » en vietnamien… et ce simple mot va lier deux êtres…
J’ai communié avec la musique des mots, avec la musique tout court, avec les parfums et odeurs qui font revivre les souvenirs… Un livre tout en finesse et en délicatesse qui démontre que le langage du coeur va bien au-delà des mots et des provenances.

J’avais vu cet auteur à La grande Librairie et j’avais toujours pensé que je devrais lire un de ses livres. C’est chose faite. Ce n’est pas un de ses derniers mais j’ai beaucoup apprécié cette lecture et cela m’a donné envie d’en lire d’autres.

Extraits: 

Quitter le bateau, c’est quitter vraiment ce qui le rattache encore à sa terre.

Il n’aime pas les fantômes. Il y en a déjà trop qui viennent le tourmenter dans ses nuits.

Il repense à son village comme on pense à un songe qu’on a fait et dont on ne sait plus très bien s’il est vraiment songe ou réalité perdue.

Sans qu’il sache le sens des mots de cet homme qui est à côté de lui depuis quelques minutes, il se rend compte qu’il aime entendre sa voix, la profondeur de cette voix, sa force grave. Peut-être d’ailleurs aime-t-il entendre cette voix parce que précisément il ne peut comprendre les mots qu’elle prononce, et qu’ainsi il est sûr qu’ils ne le blesseront pas, qu’ils ne lui diront pas ce qu’il ne veut pas entendre, qu’ils ne poseront pas de questions douloureuses, qu’ils ne viendront pas dans le passé pour l’exhumer avec violence et le jeter à ses pieds comme une dépouille sanglante.

Assis sur ce banc qui est devenu, en l’espace de deux jours seulement, un petit endroit familier, un morceau de bois flotté auquel il se serait accroché au beau milieu d’un large torrent, tourbillonnant et bizarre. Et il tient au chaud contre lui la dernière branche du rameau, qui pour l’instant dort de son sommeil sans peur, sans mélancolie ni tristesse, de ce sommeil de nourrisson repu, heureux de trouver la chaleur de la peau aimée, son onctuosité tiède et la caresse d’une voix aimante.

Il se dit qu’un pays où les prénoms ne signifient rien est un bien curieux pays.

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