Walker, Alice « La couleur pourpre » (1983) 252 pages

Walker, Alice « La couleur pourpre » (1983) 252 pages

Autrice : née le 9 février 1944 à Eatonton (État de Géorgie), est une écrivaine et militante féministe américaine. Son activisme concerne à la fois le féminisme, la lutte pour les droits des Noirs et l’antisionisme.
Alice Walker écrit des romans, des nouvelles, des essais et des poèmes. Ces écrits mettent en valeur la lutte des femmes de couleur contre le racisme, le sexisme, l’inégalité sociale et la violence répandus dans la société américaine.

La Couleur pourpre reçoit le Prix Pulitzer de la Fiction et l’American Book Award en 1983.

Robert Laffont – Pavillons – 01.04.1984 – 261 pages/ J’ai lu 06.1999 – 252 pages – 27.10.2022 – Pavillons poche – 394 pages

Résumé:
Depuis leur séparation, depuis des années, Nettie et Celie, deux jeunes Noires, soeurs tendrement unies, n’ont cessé de s’écrire. Mais aucune missive, jamais, n’est parvenue ni à l’une ni à l’autre. C’est que Celie, restée là-bas, près de Memphis, subit la loi d’un mari cruel qui déchire toutes les lettres venues d’Afrique – où Nettie est missionnaire. Alors Celie, la femme-enfant, écrira via le bon Dieu, qui, lui, sait tout… Pourquoi, entre elles, cette correspondance déchirante et sans fin, obstinée, presque immatérielle ? Steven Spielberg a écrit : `Je suis passé de la colère au rire et du rire aux larmes; enfin, j’ai éprouvé tous ces sentiments en même temps. Il y a des années que je n’avais lu un livre qui ait suscité en moi pareille émotion. »

« Une célébration éclatante de ce que signifie être une femme noire. La Couleur pourpre n’essaie pas d’adoucir la réalité mais s’accroche, courageusement, à une foi magnifique et revendiquée en l’avenir, le pardon, la bonté et l’espoir », Chimamanda Ngozi Adichie. ( citation de l’édition 2022)

Mon avis

Un petit chef d’oeuvre ( comme bien souvent le Prix Pulitzer)

Plongée dans le Sud ségrégationniste au début du XXème siècle. L’histoire de deux soeurs qui vont connaitre deux destins bien différents. Nettie est jolie et Celie est moche. Mais surtout Celie va courber l’échine, subir sa condition et Nettie va s’enfuir. Celie nous accompagne tout au long du roman et ce depuis le début. En effet c’est elle qui commence par prendre la plume dans ce roman épistolaire. Elle écrit à Dieu car elle ne voit pas à qui elle pourrait écrire d’autre et nous somme les témoins de sa vie misérable : elle est mariée sans qu’on lui demande son avis à Mr.  qui la traite comme une esclave, après avoir été engrossée par celui qui lui sert de père et qu’on lui ait volé ses deux enfants. Elle est pour ainsi dire analphabète. Ce n’est pas pour autant qu’elle est geignarde. Elle accepte sans se révolter toute la maltraitance dont elle est l’objet, comme si c’était le sort qui lui était réservé et que la voie était toute tracée. Un jour, elle va faire connaissance de la maitresse de son mari, Shug, une chanteuse qu’elle admire, et qui s’installe dans la maison alors qu’elle est malade et qui semble sur le point de mourir. Une relation forte va lier les deux femmes, et Celie en tombe passionnément amoureuse. Shug a un caractère fort, n’accepte pas la maltraitance et entend mener sa vie comme elle l’entend, femme ou pas femme… Elle va devenir l’alliée de Celie.
Dans ce roman on parle de l’esclavage, mais pas que… la condition féminine, la religion, le mariage forcé, le sexe, l’homosexualité, l’oppression de la femme mais aussi l’importance de la couleur de peau.
Puis c’est Nettie qui prend la plume; elle a traversé les mers et est partie en Afrique. Et elle raconte sa vie à sa soeur, sans jamais savoir si cette dernière lira ses lettres. Elle fait partie de ces missionnaires noirs qui partent et tentent d’évangéliser leurs « frères de couleur «  et se rendre comptent que noir et noir ne recouvrent pas la même réalité. Et elle va nous parler de la différence entre les noirs américains et les noirs d’Afrique et de leur relation aux Blancs.
Un magnifique et poignant voyage vers la libération de la jeune Celie qui va s’affranchir de sa vie toute tracée pour tracer sa vie et vivre enfin. 

C’est à la fois effrayant et plein d’espoir, cela parle d’amitié, de sonorité, d’amour… et de l’émergence des femmes dans un monde d’hommes. Et il y a une belle brochette de femmes fortes dans le roman, qui est à bla gloire des femmes et fait passer les hommes pour des ordures…

Extraits

Tant que je peux parler au bon Dieu j’ai de la compagnie.

Savais-tu qu’il existait de très grandes villes en Afrique il y a des milliers d’années de cela, des villes plus grandes que Milledgeville et même Atlanta ? Que les Égyptiens, qui ont construit les pyramides et réduit les Israélites en esclavage, étaient des gens de couleur ? Que l’Égypte est en Afrique ? Et que l’Éthiopie, dont la Bible nous parle, représentait en réalité toute l’Afrique ?

J’ai lu et lu encore jusqu’à m’en user les yeux. J’ai appris comment les Africains nous ont vendus, parce qu’ils aimaient l’argent plus encore que leurs propres frères et sœurs de race. Comment nous sommes venus en Amérique sur des bateaux. Et comment on nous a forcés à travailler pour des maîtres.

Tous les Éthiopiens de la Bible étaient noirs. Cela ne m’était jamais venu à l’idée. Pourtant, à la lecture de la Bible c’est absolument évident si l’on s’en tient uniquement au texte. Ce sont les images qui sont trompeuses, celles qui illustrent le texte, car tous les personnages sont des Blancs et on en vient à penser que tout le monde est ainsi dans la Bible. Mais les Blancs vraiment blancs vivaient dans d’autres régions à l’époque.

Les Blancs ils écoutent jamais les Noirs, point final. Ou alors juste le temps de penser aux ordres à leur donner.

L’homme il se met partout et il pourrit tout. Il est sur ta boîte de céréales, dans ta tête, sur toutes les radios. Il veut te faire croire qu’y a que lui partout. Et quand tu le crois, alors tu penses que Dieu c’est lui. Mais c’est pas vrai. Donc quand t’as envie de prier et que l’homme se met devant toi comme si que c’était pour lui, envoie-le balader. Pense aux petites fleurs, au vent, à l’eau, à un gros caillou.

Une femme c’est fragile. Ça a le droit de pleurer. Mais pas de prendre les choses en main.

Si elle a pas compris qu’il faut savoir faire front toute seule, c’est pas la peine d’avoir vécu.

2 Replies to “Walker, Alice « La couleur pourpre » (1983) 252 pages”

    1. Ah… je dois dire que j’ai beaucoup apprécié ce livre… Faut le faire remonter dans la pile, il ne faut pas hésiter… Même si le style épistolaire de Celie – la petite analphabète – au début peut surprendre.. c’est étudié pour…

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