Rouchon-Borie, Dimitri « Le chien des étoiles » (RLE2023) 226 pages

Rouchon-Borie, Dimitri « Le chien des étoiles » (RLE2023) 226 pages

Auteur : Dimitri Rouchon-Borie grandit à Nantes, puis fait des études de philosophie et de sciences cognitives. Il devient journaliste dans la presse régionale, et notamment à La Presse d’Armor puis au Télégramme. En 2011, il débute dans ce cadre des chroniques judicaires. Il écrit un premier livre de chroniques judiciaires romancées en 2018, dénommé Au tribunal. En janvier 2021, il publie son premier roman, « Le Démon de la colline aux loups », très remarqué par la critique (lauréat de nombreux prix, dont le Prix des Inrockuptibles et le Prix Première de la RTBF, 2021), Ritournelle (2021), Fariboles (2022) et Le Chien des étoiles (2023).

Le Tripode – 17.08.2023 – 226 pages

Résumé :

Écoutez bien ce que je vais vous dire parce que dans l’instant c’est la nuit qui parle pas moi et c’est une voix pure, alors je serai pas capable de la refaire ensuite.
Gio a vingt ans, peut-être un peu plus. Sa vie n’est plus la même depuis qu’un lâche lui a planté un tournevis dans le crâne. Désormais, Gio voit ce que peu de gens devinent. La beauté de la nuit. L’appel des chouettes. La grandeur de ses amis Papillon et Dolores. Étonnant road movie gitan, Le Chien des étoiles est le roman de leur destin, un périple cruel et doux dans le monde des humains.

Mon avis:

J’avais été scotché par son premier roman, « Le Démon de la colline aux loups » et j’ai sauté sur l’occasion de lire celui-ci. Pas déçue! 

Gio le gitan rejoint les siens après plusieurs mois d’hospitalisation suite à une grave blessure due à un coup de tournevis dans la tête. Et la cicatrice n’est pas que physique. Elle s’est incrustée dans sa tête et il en a été transformé. Son père va se lancer dans une vengeance entre clans gitans, qui va obliger Gio à fuir en compagnie de deux gosses dont il a fait connaissance à son retour parmi les siens: « Papillon » un garçon muet qui parle avec les mains et une jeune fille « Dolorès » qui craint à la fois les hommes et les femmes. Trois éclopés de la vie. Ils s’enfuient en train, sous la protection de la vierge noire…

L’écriture de l’auteur est toujours aussi particulière, poétique et lyrique par moments, violente par d’autres. Et pour mon grand bonheur, le roman est moins dur que son premier, mais tout aussi émouvant. Je l’ai toutefois un peu moins apprécié que le précédent…

Gio est en osmose avec la nuit, les étoiles, il communique avec les animaux de l’obscurité. La nuit qui pénètre dans sa tête par l’ouverture créée par le tournevis et qui développe son instinct primaire qui le guide.

Le monde, la nature et les hommes se confrontent et le trio est à la poursuite d’un monde meilleur, plus humain, libéré des viles envies de pouvoir et de vengeance au profit de l’amour et la tolérance.
Un trio qui sera à la fois séparé et soudé par la mort, au travers d’une fresque… 

Un roman noir comme la nuit, mais avec les étoiles qui scintillent dans l’obscurité. Avec tout à la fin le petit clin d’oeil à la colline aux loups…

Je venais de terminer le livre magnifique de Charles Aubert «Danser encore » et je ne peux m’empêcher d’y penser en voyant ce personnage de Gio qui va devenir boxeur, ce personnage de gitan qui croit en l’humain et sera détruit par ceux qui se croient supérieurs aux gens du voyage..

Extraits:

le gros Nino Belco, dit Bel du Saigneur

Il avait ouvert les yeux sur une poignée d’étoiles, à travers la fenêtre de la chambre. C’est par là qu’il fallait aller. Sa ligne de vie s’était remise à osciller, un coup dans l’être, un coup dans le néant, bon Dieu ! C’est pas tant qu’il avait le choix, mais il n’était pas trop sûr d’avoir envie de revenir.

D’abord on guette, puis on imite dans sa tête, et après on sait faire.

Moi je suis fait pour les étapes, pas pour le chemin direct.

— Écoutez bien ce que je vais vous dire parce que dans l’instant c’est la nuit qui parle, pas moi, et c’est une voix pure, alors je serai pas capable de la refaire ensuite.

— On est du voyage.
— Du voyage pour aller quelque part ? Ou pour se faire oublier de votre chez-vous, parce qu’il aurait pas fait bon y rester ?
— Un voyage, c’est toujours un peu des deux.

— Je me suis laissé aller aux souvenirs.
— Ce que tu as laissé derrière, c’est derrière.

La vraie méchanceté qui te fait du tort sans raison, et qui coûte rien à celui qui t’en cafarde la journée. Là, c’était une méchanceté pour la vie. Une méchanceté pour toujours. 

La nuit tombe et ça met Gio dans un état second. Il sent revenir l’appel des chouettes et des ombres, les vols silencieux et les étoiles au-dessus des nuages. Il pince le fil imaginaire, et il se demande s’il peut s’enfuir par là.

Les soirs d’après, Gio attend la chouette, il espère mais elle ne vient pas. Tous les soirs, il file s’allonger, et en s’endormant, il laisse son esprit s’envoler et voler de plus en plus haut, jusqu’à planer sur la ville, de mieux en mieux. Il n’a qu’une seule volonté, et c’est de tourner la tête vers le ciel, et filer pour de bon,tout en haut. Et il verra bien s’il peut redescendre, ou si son esprit se perd à jamais dans les étoiles. Il a tellement fait le vagabond parmi les hommes, pourquoi n’aurait-il pas le droit de faire pareil dans les étoiles ?

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