Panassenko Polina « Tenir sa langue » (RL2022) 192 pages

Panassenko Polina « Tenir sa langue » (RL2022) 192 pages

Autrice: née le 3 mars 1989 à Moscou (URSS), est une écrivaine, traductrice et comédienne franco-russe. En 1993, sa famille émigre en France, à  Saint-Etienne, son père Grigory Panassenko mathématicien ayant obtenu un poste à l’université. Elle est naturalisée française sous le nom de Pauline Panassenko.

Editions de L’Olivier – 19.08.2022 – 192 pages – Prix Fémina des Lycéens – Prix littéraire de la Porte Dorée

Résumé : 

« Ce que je veux moi, c’est porter le prénom que j’ai reçu à la naissance. Sans le cacher, sans le maquiller, sans le modifier. Sans en avoir peur. »
Elle est née Polina, en France elle devient Pauline. Quelques lettres et tout change.
À son arrivée, enfant, à Saint-Étienne, au lendemain de la chute de l’URSS, elle se dédouble : Polina à la maison, Pauline à l’école. Vingt ans plus tard, elle vit à Montreuil. Elle a rendez-vous au tribunal de Bobigny pour tenter de récupérer son prénom.
Ce premier roman est construit autour d’une vie entre deux langues et deux pays. D’un côté, la Russie de l’enfance, celle de la datcha, de l’appartement communautaire où les générations se mélangent, celle des grands-parents inoubliables et de Tiotia Nina. De l’autre, la France, celle de la materneltchik, des mots qu’il faut conquérir et des Minikeums.
Drôle, tendre, frondeur, Tenir sa langue révèle une voix hors du commun.

Mon avis :

Suis ressortie mitigée de cette lecture.  De fait le résumé m’a fait de l’oeil … mais il aurait presque suffi…
Je n’ai pas adhéré au style, j’ai lu son histoire mais je n’ai rien ressenti… Très factuel et cela n’a pas frappé à la porte de l’émotionnel, ce qui pour moi pose problème. Trop document, trop narratif et pas assez humain… et pourtant… elle raconte des épisodes qui doivent frapper au coeur…
Certes il y a des passages qui m’ont intéressé, certains m’ont fait penser « mais c’est pas possible de penser comme ça! » mais jamais je n’ai vibré. Et pourtant la vie de la jeune Polina/Pauline est révélatrice du décalage entre deux vies, deux cultures, des questions qui se posent en matière d’intégration.. Au final ce fut une déception et je ne vais pas m’attarder.. 

(Décidemment les autrices russes contemporaines et moi… ça le fait pas… entre Yana Vagner, Julia Leonidovna Latynina et elle… )

Extraits:

Je veux croire qu’en France je suis libre de porter mon prénom de naissance.
Je veux prendre ce risque-là.

Ma tante a le judaïsme clignotant. Chez elle  » le peuple juif  » oscille entre le  » nous » et le « ils « .Elle est juive sans l’être .On dirait que c’est au cas où. Au cas où quoi je ne sais pas mais si je pose une question sur le  » nous « , il faut y aller mollo sinon on a vite fait de rater l’embranchement et on se retrouve en plein « ils « .

En français je sais qu’on crie « aïe » mais le problème c’est qu’en russe on crie « aïe » aussi. Comment être sûre de crier « aïe » en russe et pas en français. Et si je crie « aïe » en russe mais qu’on croit que j’ai crié « aïe » en français, comment prouver ensuite que c’était bien un « aïe » russe.

Ma mère aussi veille sur mon russe comme sur le dernier œuf du coucou migrateur. Ma langue est son nid. Ma bouche, la cavité qui l’abrite. Plusieurs fois par semaine, ma mère m’amène de nouveaux mots, vérifie l’état de ceux qui sont déjà là, s’assure qu’on n’en perd pas en route. Elle surveille l’équilibre de la population globale. Le flux migratoire : les entrées et sorties des mots russes et français. Gardienne d’un vaste territoire dont les frontières sont en pourparlers. Russe. Français. Russe. Français. Sentinelle de la langue, elle veille au poste-frontière. Pas de mélange. Elle traque les fugitifs français hébergés par mon russe. Ils passent dos courbé, tête dans les épaules, se glissent sous la barrière. Ils s’installent avec les russes, parfois même copulent, jusqu’à ce que ma mère les attrape.

Russe à l’intérieur, français à l’extérieur. C’est pas compliqué. Quand on sort on met son français. Quand on rentre à la maison, on l’enlève. On peut même commencer à se déshabiller dans l’ascenseur. Sauf s’il y a des voisins. 

« Autorisée à » c’est une formule de politesse juridique, ça veut dire « obligée de » s’appeler Pauline et « interdit » de s’appeler Polina.

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