Johnson, Jocelyn Nicole « Mon nom dans le noir » (RLH2024) 224 pages

Johnson, Jocelyn Nicole « Mon nom dans le noir » (RLH2024) 224 pages

Autrice: Autrice américaine née à Reston (Virginie) Elle enseigne l’art à Charlottesville (Virginie) où elle vit. Ses textes ont été publiés dans de nombreux magazines, revues littéraires et anthologies, dont Best American Short Stories. Son premier roman, Mon nom dans le noir, a été couronné par plusieurs prix, dont le Library of Virginia Award et été finaliste de plusieurs autres dont le National Book Critics Circle Award et le prix du Los Angeles Times.

Albin-Michel – Collection Terres d’Amérique – 03.01.2024 – 224 pages – (« My Monticello » traduit par Sikh Fakambi) 

Résumé:

Alors que l’Amérique est en proie au chaos, aux catastrophes climatiques et à des pannes massives, le quartier de First Street, à Charlottesville (Virginie), est attaqué par des suprémacistes blancs. Un petit groupe hétéroclite parvient à fuir les enragés à bord d’un bus abandonné.
Avec à sa tête une jeune femme noire, Da’Naisha Love, il trouve refuge à Monticello, la plantation historique de Thomas Jefferson, une terre désertée de tous, sauf de ses fantômes.
Malgré la violence alentour, la vie s’organise au cœur de cette petite communauté naissante, par-delà les barrières sociales et raciales. Mais après dix-neuf jours d’une paix fragile, la terreur se rapproche. Da’Naisha glisse alors le récit de leurs journées de lutte entre les pages d’un livre de la bibliothèque…
S’inspirant des émeutes de Charlottesville et de l’assaut du Capitole, Jocelyn Nicole Johnson porte un regard lucide sur notre époque troublée. La fulgurance de sa narration donne à ce livre la puissance d’une prophétie politique.

Dans la lignée de Toni Morrison et de Colson Whitehead, une nouvelle voix électrisante !

Mon avis:

Au centre du roman le racisme, les suprémacistes, le chaos dans lequel sont en train de sombrer les Etats-Unis ( le reste du monde glisse aussi…)
On se souviendra qu’en aout 2017, à Charlottesville une voiture fonce dans la foule, tue une jeune femme et fait plusieurs blessés suite à une manifestation qui oppose l’extrême-droite aux anti-racistes. C’est cet affrontement qui servira de point de départ à la réflexion de l’autrice, en pointant du doigt l’atmosphère électrique qui règne dans la ville (le pays). L’autrice y rajoute des problèmes environnementaux, des pannes d’électricité, mais l’affrontement racial est le coeur du problème. L’esclavage a beau avoir été aboli, les relents du passé sont toujours bien présents.
Des suprémacistes mènent une attaque dans un quartier de Charlottesville. Dix-neuf personnes réussissent à s’échapper à bord d’un minibus sous le feu des assaillants ( des blancs, des noirs, des jeunes, des vieux) et se réfugient à Monticello, la demeure de Thomas Jefferson ( aujourd’hui transformée en musée). C’est Da’Naisha Love, une jeune noire, qui décide de quitter la ville en se dirigeant vers les collines et qui décide de s’arrêter à Monticello. Elle y a déjà travaillé pendant l’été et surtout elle est l’une des descendantes de Jefferson (mais rares sont les personnes qui sont au courant; parmi elles sa grand-mère Ma Violet et son petit ami, Knox, un blanc ; tous deux sont dans le petit groupe de fuyards). Knox qui se sent mal dans sa peau de blanc dans ce pays qui se déchaine contre les non-blancs. A ce moment il faut dire que le pays étant en ébullition, Monticello est fermé au public et il ne reste que quelques gardiens.
Le souci c’est qu’une fois arrivés à Monticello, ils ne savent pas ce qu’il se passe ailleurs ni combien de temps ils seront en sécurité. Ils s’inquiètent pour ceux qui sont restés à « First Street », ils ne savent pas si le seul quartier de First Street a été attaqué, si leurs maisons ont été pillées, brûlées… De plus, leur seul point commun est qu’ils habitent le même quartier et ils ont du mal à s’entendre… Mais il le faudra bien ! C’est le seul moyen de survivre… Et survivre est le mot juste; ils manquent de beaucoup de choses et principalement de nourriture et de médicaments . Et ce n’est pas parce qu’ils sont à Monticello que Monticello ne va pas être attaqué. Alors qu’ils s’installent dans l’ancienne résidence de Jefferson, certains secrets vont être dévoilés dont le fait que Ma Violet et Da’Naisha Love sont des descendantes de l’ancien propriétaire de la Séquence…
D’autres fugitifs rejoignent le petit groupe, la résistance s’organise, le groupe se soude pour faire face au monde extérieur, se battre, défendre son territoire et sa vie. 

Un petit roman qui prend aux tripes, qui dénonce les agissements des suprémacistes, la violence, le racisme. N’oublions pas le récent épisode de l’attaque du Capitole qui démontre à quel point une partie du peuple américain veut assurer la suprématie blanche, les émeutes racistes, le comportement de la police et des milices de citoyens, la fracture sociale, la question raciale… Le passé n’est pas mort, et rien n’est acquis. C’est le message qui passe dans ce livre qui raconte la poussée des incontrôlables. Si la haine est vivace, ce petit roman démontre que la résistance est là aussi. Un roman coup de poing, des personnages attachants. Ce roman est présenté comme une dystopie, cela fait froid dans le dos de se dire que le futur sera haine et violence, mais c’est malheureusement très réaliste…

Quand j’avais visité Monticello il y a bien des années, jamais je ne l’aurais imaginé en camp retranché…

Un grand merci aux Editions Albin-Michel – Terres d’Amérique pour ce roman.

Monticello :
Monticello fut la principale plantation et la maison de Thomas Jefferson (qui dressa lui-même les plans de la demeure) près de Charlottesville, en Virginie, à l’est des États-Unis. Monticello est aujourd’hui un musée et accueille les touristes et les écoles. Les visiteurs peuvent accéder à toutes les pièces de la maison sauf le dernier étage. Elle a été inscrite en 1987 sur la liste du patrimoine mondial de l’Humanité par l’UNESCO.
En 2017, des fouilles ont permis de retrouver la chambre cachée de Sally Hemings, maîtresse et esclave de Thomas Jefferson.

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