Hardy, Thomas « Sous la verte feuillée » (Quatre Saisons à Mellstock) (1872) 249 pages

Hardy, Thomas « Sous la verte feuillée » (Quatre Saisons à Mellstock) (1872) 249 pages

Auteur : Thomas Hardy, né le 2 juin 1840, mort le 11 janvier 1928, est un poète et écrivain britannique appartenant au courant naturaliste. Auteur devenu aujourd’hui classique, il a tout particulièrement influencé D. H. Lawrence. Il a reçu l’ordre du Mérite en 1910.
Fils aîné d’un maçon – tailleur de pierres  et d’une mère ambitieuse avec un goût pour la poésie latine assurant son éducation, Thomas Hardy devient apprenti chez un architecte avant de s’installer à Londres où, en 1874, il épouse Emma Gifford dont la mort en 1912 le marquera profondément. Il est représentatif du courant naturaliste dans le roman britannique. Son premier roman ne sera jamais publié, les deux prochains seront publiés anonymement.
Il se considérait lui-même d’abord comme un poète, n’écrivant des romans que pour gagner sa vie. La majorité de son œuvre, qui se déroule essentiellement dans la région fictive du Wessex, dépeint des personnages en lutte contre leurs passions et les circonstances. Sa poésie, publiée après ses cinquante ans, est jugée d’une qualité égale à ses romans, surtout depuis sa relecture par un groupe d’écrivains anglais, The Movement, dans les années 1950 et 1960. De 1871 à 1896, il écrit quinze romans et quatre recueils de nouvelles. Le Trompette-major (1880), Remèdes désespérés (1871) Loin de la foule déchaînée (1874), Le Retour au pays natal (1878), Le Maire de Casterbridge (1886), Les Forestiers (1887), Tess d’Urberville (1891), Jude l’Obscur (1896), À la lumière des étoiles (1882), La Bien-aimée (1897), Les Yeux bleus (1873), Sous la verte feuillée (1872), S’il avait insisté (The Hand of Ethelberta 1876)  (source Wikipedia)
Tous les romans sans exception se déroulent dans le sud-ouest de l’Angleterre. Le Dorset et les comtés voisins se trouvent transmués en royaume littéraire que Hardy appelle le Wessex, du nom de l’ancien royaume des Saxons de l’Ouest. Le Wessex apparaît comme une province de l’imagination.

Editions du Devin (sous le titre Quatre Saisons à Mellstock) 10.2011 – 288 pages (traduit par Bernard Tourrès) /  Archipoche – 07.02.2018 – 249 pages (Nouvelle traduction : par Eve Paul-Marguerite) – Titre original « Under the greenwood tree » paru en 1872. 

Résumé: 

Dans le paisible village de Mellstock arrive une nouvelle institutrice, Fancy Day. Immédiatement, la jeune femme fait tourner les têtes des célibataires du comté.
Dick Dewey, un jeune fermier, est le premier à lui faire des avances. Tombé fou amoureux d’elle au premier regard, il la demande en mariage dans le plus grand secret.
Mais un autre homme n’est pas indifférent aux charmes de Fancy : le vicaire du village, M. Maybold, qui invite la jeune femme à se joindre à la chorale de la paroisse, comme organiste, afin de la courtiser. À son tour, Maybold décide de demander sa main et, bien que déjà fiancée, Fancy accepte de nouveau.

Ce roman et sa galerie de personnages pittoresques font revivre, avec truculence, l’Angleterre rurale du début du 19ème siècle. Au travers de l’histoire d’une chorale de village ils mettent en évidence les bouleversements qui se font jour dans une société traditionnelle à l’aube de l’ère industrielle. Le ton en est léger et drôle mais laisse poindre la nostalgie d’une époque et de moeurs révolues. De cette histoire ne resteront qu’un mariage et un secret, que Fancy emmènera dans sa tombe.
Dans un labyrinthe de passions, Sous la verte feuillée, paru anonymement en 1872, dresse un portrait plein d’ironie et de mélancolie du monde rural cher à Thomas Hardy.

Mon avis: 

J’avais lu Desperate Remedies (1871) Far from the Madding Crowd (1874) Tess of the Urbervilles (1891), Jude the Obscure (1896) et A Pair of Blue Eyes (1873), en anglais. Puis récemment Le Maire de Casterbridge en français.  Et c’est avec toujours autant de plaisir que je me plonge dans les écrits de cet auteur.
Alors c’est celui que j’ai le moins apprécié pour le moment mais la plume de l’auteur est toujours aussi poétique, même dans ce roman qui est l’un de ses tout premiers.
Il dépeint comme personne l’Angleterre rurale du XIXème siècle, il nous fait côtoyer des personnages irrésistibles dans son Wessex fictif qui ressemble furieusement à la région de Dorchester… Hardy est pour moi l’un des grands spécialistes des descriptions, que ce soit en matière de personnages , d’ambiances, de paysages … Il nous berce de lumières et de sentiments, ici les sentiments qui vont lier Fancy et Dick. Dans ce roman pastoral il nous parle musique, passage des saisons, du temps qui passe, de la ruralité, des coutumes campagnardes, de la place de la femme dans  l’Angleterre victorienne, de la nature,  de la modernité qui arrive…
Les personnages sont nettement moins sombres que dans les romans qu’il écrira par la suite, mais on retrouve déjà celui qui deviendra pour moi l’auteur romantique anglais par excellence.
Je vous laisse découvrir les personnages, en particulier Fancy et ses deux soupirants, Dick et le vicaire, Maybold.
Ah .. si vous n’aimez pas les descriptions de la vie dans les campagnes anglaises et le romantisme, passez votre chemin… 

Extraits:

Pour ceux qui habitent les bois, chaque arbre a sa voix et sa physionomie. Au passage de la brise, les sapins gémissent en se balançant tristement ; le houx, en heurtant ses feuilles, siffle bizarrement ; le frêne fait entendre un bruissement léger et le hêtre frémit de toutes ses branches.

L’hiver, qui modifie le chant de ces arbres en les dépouillant de leurs feuilles, ne détruit pas leur individualité.

Un soir de Noël, il y a des années de cela, je partis à la ronde avec le chœur Dibbeach. Il gelait à pierre fendre. Les clefs de toutes les clarinettes se mettent à geler. Mais à geler !… Chaque fois qu’on ouvrait une clef, c’était comme si on tirait un bouchon ; les joueurs de clarinette devaient par instants entrer chez un tailleur de haies ou chez un cantonnier pour dégeler leur instrument devant le feu. Si bien qu’à la fin un glaçon, long d’un empan, pendait à l’extrémité de chaque clarinette, et quant à nos doigts, vous me croirez si vous voulez, j’vous réponds que nous ne les sentions plus.

— Vous ne saurez jamais ce que pense cet homme au juste. Silencieux, ah, il l’est ! C’est étonnant d’écouter le silence de cet homme.
— Son silence déborde de sous-entendus.
— Oui, il a un silence intelligent, très intelligent, fit Leaf en écho. I’ semble lire vos pensées à travers vot’ front comme on regarde marcher les aiguilles d’une horloge à travers un verre.
— Nous conviendrons tous que les silences de Day, longs ou courts, sont intelligents. Et,bien que nous ne puissions espérer que sa fille ait hérité de son silence, peut-être lui a-t-il légué quelques bribes de son bon sens.

— Oui, les femmes sont une engeance irritante : bien qu’elles n’aient jamais raison, elles n’ont jamais tout à fait tort non plus.

Il était de coutume à Mellstock et dans les environs de discuter les questions d’agrément et les affaires courantes dans la maison et de réserver le jardin pour les discussions sérieuses.
Cette coutume datait sans doute de l’époque où les maisons n’avaient qu’une pièce commune et qu’on voulait s’éloigner à ces moments-là des autres membres de la famille. Même ceux qui avaient maintenant plusieurs pièces continuaient à mettre en vigueur la vieille pratique.

Un gros nuage gris obscurcit toute la campagne. Une pluie fine et un brouillard léger tombent en écharpes onduleuses. Les arbres du bois se tordent comme de misérables humains, tandis que le vent tourbillonne au milieu d’eux. La partie inférieure de leurs troncs, que l’on ne voit presque jamais bouger, est visiblement ébranlée par les rafales violentes et ce spectacle inaccoutumé vous serre le cœur, comme la vue d’un homme fort répandant des larmes.
Les branches basses montent et descendent, les branches hautes et droites vont et viennent, les rafales sont si irrégulières et se divisent en une si grande quantité de courants contraires que les branches environnantes du même arbre balaient les nuages en mouvements indépendants, s’entrecroisent, se rencontrent et se mêlent.

 

Image : site : Victorian Web 

One Reply to “Hardy, Thomas « Sous la verte feuillée » (Quatre Saisons à Mellstock) (1872) 249 pages”

  1. Thomas Hardy me fait penser au film Tamara Drewe, film de Stephen Frears, dont un des pensionnaires écrit un bouquin sur cet auteur. Le film est basé sur un roman graphique lui-même reprenant en partie le roman de Hardy « Loin de la foule déchaînée ».

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