Musso, Valentin « Qu’à jamais j’oublie » (2021) 312 pages

Auteur : né le 19 août 1977, à Antibes, est un écrivain français, auteur de romans policiers. Il est le frère de Guillaume Musso. Agrégé de lettres, il enseigne la littérature dans les Alpes-Maritimes. Son premier roman, « La Ronde des innocents » (2010), a été remarqué et défendu par le chroniqueur Gérard Collard qui a contribué à le faire connaître du grand public. Depuis, il a publié « Les Cendres froides » (2011) , « Le Murmure de l’ogre » (2012), « Sans faille » (2014) , « Une vraie famille » (2015), « La Femme à droite sur la photo » (2017), « Dernier été pour Lisa » (2018), « Un autre jour » (2019), « Qu’à jamais j’oublie » (2021) , « L’Homme du Grand Hôtel » (2022), « Dans mon obscurité » (2023), « Le Mystère de la maison aux trois ormes » (2024)
Seuil – 06.05.2021 – 312 pages /Point poche 06.05. 2022 – 312 pages
Résumé:
Et si votre famille n’était pas celle qu’elle prétendait être ? Nina Kircher, une sexagénaire, veuve d’un photographe mondialement célèbre, passe quelques jours dans un hôtel de luxe dans le sud de la France. Soudain, elle quitte la piscine où elle vient de se baigner pour suivre un homme jusqu’à son bungalow puis, sans raisons apparentes, elle le poignarde dans un enchaînement inouï de violence, avant de s’enfermer dans un mutisme complet.
Pour tenter de comprendre cet acte insensé, son fils Théo, avec lequel elle a toujours entretenu des relations difficiles, n’a d’autre choix que de plonger dans le passé d’une mère dont il ne sait presque rien. De Paris à la Suisse en passant par la Côte d’Azur, il va mener sa propre enquête, jusqu’à découvrir des secrets inavouables et voir toute sa vie remise en question… L’histoire bouleversante d’une femme décidée à prendre en main son destin.
Un suspense redoutable qui vous manipule jusqu’à la dernière page. Avec des succès comme « Une vraie famille », « Dernier été pour Lisa » ou « Un autre jour », Valentin Musso s’est imposé comme l’un des meilleurs auteurs de thriller psychologique de sa génération. « Qu’à jamais j’oublie » est son neuvième roman.
Mon avis:
Mais pourquoi cette femme a-t-elle suivi cet homme quand il a quitté la piscine? Une seule certitude, c’est qu’elle l’a reconnu, qu’il faisait partie de son passé, et qu’elle l’a lardé de coups de couteau…
Son fils Théo est totalement effondré quand il reçoit un message de la police lui annonçant les faits et en apprenant dans le même temps que sa mère a été hospitalisée dans le Sud de la France avant d’être déferrée à la justice. De plus, elle semble tétanisée, elle ne prononce plus un mot, comme sous l’effet d’un stress post-traumatique.
Mais c’est là que les choses se corsent ! Il se rend compte qu’il ignore tout du passé de sa mère; il va donc enquêter, demander à sa tante et à son demi-frère s’ils sont au courant de quelque-chose, commencer à fouiller dans son passé. Il tombe sur une vieille photo… Ses recherches vont le diriger vers la Suisse, pays de résidence de l’homme qu’elle a agressé.
Un roman glaçant qui parle des ravages que peuvent engendrer l’occultation de la vérité. Et qui révèle tout un pan de réalité historique sur la maltraitance et les violences faites aux jeunes filles au XXème siècle dans un pays en théorie civilisé, la Suisse…
Deuxième roman thriller historique psychologique que je lis de cet auteur et une nouvelle fois j’ai beaucoup aimé. Comme quoi il ne faut pas prêter attention au préjugé anti-Musso ( mais là il s’agit de son frère) . Très documenté, et un sujet intéressant – en plus cela concerne la Suisse et des faits peu reluisants . Le scandale des internements administratifs, des internements abusifs, de la détention administrative, la violence sur mineurs dans des établissements cantonaux au cousu XXème siècle.
Des personnages attachants… et comme dans « Les Cendres froides « un lourd passé, nos racines…
Note de l’auteur
Jusqu’en 1981, au moins soixante mille personnes ont été internées administrativement en Suisse, sans avoir jamais commis aucun délit, au seul motif qu’elles étaient pauvres, mendiantes, alcooliques, réfugiées, mères illégitimes, ou jugées dépravées, rebelles ou fainéantes. Ce phénomène de très grande ampleur n’a offert que peu de résistance et a longtemps été entouré d’un silence assourdissant.
Extraits:
Je ne suis même pas déçu. Quand on n’espère rien, on ne l’est jamais.
Une situation du quotidien rappelant directement ou symboliquement un incident datant parfois de plusieurs années peut provoquer des crises et libérer sa charge traumatique. L’événement déclencheur peut être mineur, mais il fait passer la victime au-delà de son seuil de tolérance.
On ne peut pas rayer son enfance de sa vie. Le passé finit toujours par vous revenir en pleine figure.
Je n’imaginais pas l’avenir comme ça, tu sais. C’est comme si j’avais passé la moitié de ma vie à me bâtir des rêves, et l’autre moitié à les enterrer.
– Nous sommes face à un véritable scandale d’État, qui s’étale sur des décennies. La façon dont les autorités ont traité ces personnes va au-delà de ce que nous imaginions jusqu’à présent. Si ce que je vous raconte s’était produit uniquement avant guerre, on pourrait encore le comprendre, mais cette réalité a perduré dans tous les cantons jusqu’en 1981, date à laquelle la détention administrative a été abolie.
L’être humain est semblable à une jeune pousse : au sauvageon il faut un tuteur ; si la plante génère des bourgeons parasites qui l’affaiblissent, on les lui retire. La nature seule ne produit que le chaos, elle a besoin de la main de l’homme. Comprenez-vous ? Nous sommes cette main et vous êtes la jeune pousse.
– Nous payons tous les dettes du passé : il est difficile de vivre sa propre existence et non celle de ses parents.
Les secrets ne sont pas destructeurs par ce qu’ils cachent, mais par l’angoisse qu’ils provoquent chez les parents. Et cette angoisse peut se transmettre au fil des générations, comme un fantôme qui resurgirait et agirait en nous sans qu’on s’en rende compte.
– Je crois que ce qu’on appelle « destin » n’est en fait qu’une série d’événements qui sont intimement liés les uns aux autres, de manière logique.
– J’ai eu une enfance sans être un enfant, confia-t-elle.
Je ne sais pas comment fonctionnent les souvenirs, pourquoi on se rappelle certaines choses et pourquoi on en oublie d’autres.
C’est étrange, cette impression de sentir le monde s’effriter autour de soi, de comprendre que ce sur quoi on a bâti une existence n’était que mensonge.
Qu’est-ce qu’une famille si ce n’est ce qu’on décide qu’elle soit ?
La seule vertu de la douleur, c’est qu’elle vous permet parfois d’y voir clair.
j’ai pensé à cette phrase de Picasso : « Tout acte de création est d’abord un acte de destruction. »
2 Replies to “Musso, Valentin « Qu’à jamais j’oublie » (2021) 312 pages”
Toujours satisfaite de suivre tes recommandations : intrigue bien ficelée où les sentiments prennent une place prépondérante devant l’action et dont le suspense va crescendo.
Les chapitres s’alternent entre l’enquête sur l’agression commise par Nina et le milieu des établissements d’internement administratif suisses. Je ne connaissais absolument pas l’existence de ces endroits, surtout à une époque vraiment pas lointaine !!!
Moi aussi je suis tombée de haut ! Plus ça va et plus on découvre des choses ignobles dans bien des pays !!!