Raufast, Pierre «La variante chilienne» (08. 2015)

Raufast, Pierre «La variante chilienne» (08. 2015)

Auteur : Pierre Raufast est né à Marseille en 1973. –  Il est ingénieur diplômé de l’Ecole des Mines de Nancy. Il vit et travaille à Clermont-Ferrand. Après «La fractale des raviolis» il publie en 2015 «La variante chilienne» en 2017 «La baleine thébaïde» (qui figure parmi les trois finalistes du Prix du Public du Salon de Genève 2017) , « Habemus piratam » en 2018 , « Le cerbère blanc » chez Stock en 2020.

Alma Editions – RL 2015 – 264 p.

Résumé : Il était une fois un homme qui rangeait ses souvenirs dans des bocaux.

Chaque caillou qu’il y dépose correspond à un évènement de sa vie. Deux vacanciers, réfugiés pour l’été au fond d’une vallée, le rencontrent par hasard. Rapidement des liens d’amitiés se tissent au fur et à mesure que Florin puise ses petits cailloux dans les bocaux. À Margaux, l’adolescente éprise de poésie et à Pascal le professeur revenu de tout, il raconte. L’histoire du village noyé de pluie pendant des années, celle du potier qui voulait retrouver la voix de Clovis dans un vase, celle de la piscine transformée en potager ou encore des pieds nickelés qui se servaient d’un cimetière pour trafiquer.

Mon avis : Encore une fois, après « La fractale des raviolis » je viens de passer un moment de lecture magnifique. Mis à part le fait que j’adore ranger aussi mes souvenirs dans des bocaux (mais pas que des cailloux, aussi les sables des lieux visités) : trois vies, trois personnages atypiques – Un vieux sans mémoire, un jeune professeur, une mineure – et si attachants ; trois solitudes qui vont se rencontrer et s’apprivoiser… Beaucoup d’émotion, de tendresse… Raufast est un romancier mais c’est aussi et surtout un conteur ; au travers de ce roman on apprend aussi… Tout comme dans fractales, on vit des aventures extraordinaires, au gré des chapitres. Le diamant, le village sous la pluie, le chat roux et le cimetière… On s’évade, on rêve, on rit aussi …. en visualisant par exemple la scène des lucioles, on est émus des conséquences de la voiture qui s’encastre… Encore un jolie pépite que je vous conseille vivement. Emotion, fantaisie, humour, créativité, humanité, poésie : tout est au rendez-vous pour vous mettre des étoiles dans les yeux…

 

Extraits :

Je survis avec des gamins nés au XXIème siècle, du genre à confondre Russell Crowe et Bertrand Russell !

Petit carnet, je viens d’avoir mon bac avec mention bien. Je devrais être satisfaite, mais je n’y arrive pas. D’ailleurs, serai-je un jour contente de moi ? Ai-je le gène du bonheur ? J’en doute.

Je continue à lire. À chercher. J’ai lu des dizaines de livres sans me trouver.

Je sens que nous allons faire une cure de lecture : côté livres, il est encore pire que moi ! Sa vie est un gigantesque patchwork de ses lectures. Impossible pour lui de lever le petit doigt sans ressusciter des mots et des phrases. Sa culture fait écran entre lui et le monde réel.

Je ne suis qu’un modeste fumeur de pipe. Il y a belle lurette, ma fiancée m’en offrait une à chaque anniversaire, jusqu’à ce qu’elle comprenne que fumer est un plaisir solitaire, incompatible avec les babillages. Vexée, elle m’acheta des pulls.

Le choix ! Vivre, c’est choisir.

– Désolé, ma cave est très modeste. Le vin, je le bois. C’est dans mes globules qu’il se conserve le mieux.

Il bourra une belle pipe à fourneau rond (certainement une Ramsès) et lentement commença son récit.

Il voguait sur la vie par mer d’huile, insensible à l’hystérie des cours de récréation.

Là, dans cette bibliothèque, il apprit donc le monde des adultes. À la manière des livres.

Nous avions en commun l’amour du tabac, du vin et de la littérature. Certaines amitiés sont moins charnues.

Sans émotion, pas de souvenir. La mémoire obéit à cet implacable mécanisme.

Du coup, comme la pellicule photosensible abîmée d’un appareil photo, il n’y a plus d’émotions pour imprimer vos souvenirs.

Il m’avait raconté l’histoire d’Orion, ce chasseur extraordinaire, capable de tuer toutes les bêtes légendaires et qui mourut piqué par un petit scorpion… Je m’en souviens très bien. Des fois, je me dis qu’il y a beaucoup trop de scorpions dans ce monde et cela me rend triste.

C’était comme avoir un 357 Magnum sans les balles. Frustrant.

Les si sont des carrefours invisibles dont l’importance se manifeste trop tard.

Dehors, la voûte est pleine d’étoiles, mais aucune n’est là pour m’indiquer la bonne direction.

D’habitude, nos souvenirs sont invisibles, nos secrets bien gardés au fond de notre cerveau.

– J’ai pas envie de sécher et de ressembler à pépé !

Un jour, je partirai très loin et j’irai dans un monde coloré. Ici, tout est gris ou vert. J’irai dans un endroit avec du rouge, du jaune, du bleu.
– Si tu trouves un arbre bleu, tu m’apporteras une feuille ?

l’ascenseur social de l’école de la République était un idéal humain à la mode qui flattait sa grandeur d’âme.

Rien ne raye le diamant, rien ne peut le détruire. C’est bien la preuve que la richesse et le beau ne font qu’un !

– Comment écrire de la poésie si l’on n’est pas contrarié ?

Quand un corps est mis en bière, on enterre surtout des secrets inavouables, des anecdotes savoureuses, des drames personnels, des passions fugaces, bref toute une vie. Depuis, quand je visite un cimetière, je ne peux m’empêcher de penser à toutes ces histoires enfouies et oubliées.

Dans une voiture, l’important est la ceinture de sécurité. Elle se porte en bandoulière comme les cartouchières des pistoleros mexicains,

Je vis au jour le jour dans une grande sérénité : sans regret ni remord. Je vis ici et maintenant : les deux pieds bien au sol.

 

 

 

 

3 Replies to “Raufast, Pierre «La variante chilienne» (08. 2015)”

  1. Coucou Cathy, nul besoin pour moi de revenir étoffer cet avis, moi qui les aime concis, savoureux et qui ne dévoile pas tout, je suis comblée pour partir vers cette découverte.

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