Manzini, Antonio «Maudit printemps» (2017)

Manzini, Antonio «Maudit printemps» (2017)

Série : Commissaire Rocco Schiavone – tome 3

Auteur : né le 7 août 1964 à Rome, est un acteur, un réalisateur, un scénariste et un écrivain italien. Comme auteur de roman policier, il est notamment connu pour sa série de romans consacrés au commissaire Rocco Schiavone. Antonio Manzini grandit à Rome. Il suit les cours de l’Académie nationale d’art dramatique de la ville et débute comme acteur au théâtre.

À la fin des années 1990, après s’être essayé à la réalisation, il prolonge sa carrière d’acteur à la télévision et au cinéma, s’imposant notamment dans plusieurs séries télévisées à succès en Italie. En 2004, il écrit avec Niccolò Ammaniti le scénario du giallo Il siero della vanità d’Alex Infascelli, travail qui marque le début de sa carrière d’écrivain et de scénariste.

Il publie en 2005 son premier roman, Sangue marcio. En 2008, il collabore à nouveau avec Ammaniti pour l’adaptation de son roman Comme Dieu le veut (Come Dio comanda) pour le cinéma qui devient sous la caméra de Gabriele Salvatores le film Come Dio comanda (film) (it). En 2013, il participe à l’écriture du scénario de la comédie I 2 soliti idioti (it) d’Enrico Lando (it). Il signe également plusieurs épisodes de séries télévisées

La même année, il imagine le personnage de Rocco Schiavone dans le roman policier Piste noire (Pista nera). Commissaire (ou sous-préfet) de police à Rome, il est sanctionné et muté à Champoluc, un village de montagne situé dans la vallée d’Aoste. Pour sa première enquête, il doit résoudre le meurtre d’un homme inconnu retrouvé écrasé sous une dameuse. Succès critique et public en Italie, ce livre marque le début de plusieurs romans consacrés aux aventures de Schiavone.

En France, ce premier titre est traduit par les éditions Denoël dans la collection Sueurs froides en 2015.

 

Série : Commissaire Rocco Schiavone

Tome 1 « Piste noire » (Pista nera ) (Folio policier n° 792- 2016 304 pages) – Tome 2  : « Froid comme la mort » (La costola di Adamo )(Folio policier 832, 2017, 304 pages ) – Tome 3  : «Maudit printemps» (Non è stagione ) – Tome 4  «Un homme seul » (Era di maggio) – Tome 5  «07-07-07» (07-07-07) – Non traduit Pulvis et umbra (2017)

Résumé : Chiara Breguet, héritière d’une riche famille d’industriels du Val d’Aoste, étudiante brillante admirée de ses pairs, n’a plus donné de ses nouvelles depuis plusieurs jours. Persuadé que cette disparition est inquiétante, Rocco Schiavone se lance dans une course contre la montre pour sauver la jeune femme et découvrir ce que dissimule la façade impeccable de ce milieu nanti. Pendant ce temps, la neige tombe sur Aoste en plein mois de mai, et cette météo détraquée ne fait qu’exacerber la mauvaise humeur légendaire de Rocco.

Mon avis : Schiavone s’humanise de plus en plus et devient de plus en plus attachant malgré son sale caractère. Un cœur d’or sous une carapace de brute. De fait son sale caractère s’affine et son intuition est de plus en plus affutée. Il cible les idiots qu’il ne supporte pas avec méchanceté et ne leur en passe pas une. J’ai bien aimé ce troisième opus. Pas de temps morts, des relations qui se stabilisent avec les collègues, une mauvaise foi délicieuse, une description de la météo qui me plait de plus en plus. Humour, ironie et mordant. J’adhère… Les dialogues, les images, les petits phrases assassines… et cette violence qui cache un désespoir abyssal. A travers les flics de sa brigade, on explore aussi les différentes provinces de l’Italie, avec leurs spécificités et leurs spécialités. Il est toujours aussi border-line; sa fidélité en amitié se confirme, ses combines, ces coups pas trop nets et ses coups de main sans en avoir l’air… Merci mon ami K ne m’avoir permis de lire ces trois premières enquêtes de ce flic Romain paumé dans le Val d’Aoste… Maintenant il va falloir attendre l’an prochain (ou les lire en italien 😉)

Extraits :

En mai, le monde est beau. Les premières marguerites éclosent, pointillant les prés de blanc et de jaune, et sur les balcons les fleurs vomissent leurs couleurs tels des tubes de peinture écrasés.

une larme coula d’un œil et se glissa dans une ride comme dans le lit asséché d’un fleuve

Pourquoi ne le laissait-on pas mal vivre les années qui lui restaient avant sa vieillesse esseulée, dans le vide qu’il avait créé autour de lui et que rien n’aurait pu remplir ?

rien n’est plus ridicule que le malheur des autres.

À une fréquence bihebdomadaire, il devait supporter la sérénade de Rocco Schiavone pour voix et nostalgie.

— Article 3 de la Constitution ? Mais qu’est-ce que tu racontes ?
— La Constitution romaine. Tu veux que je te dise les deux premiers ? Le premier dit : ne pas casser les couilles. Le deuxième : ne jamais passer en voiture sur le Lungotevere le samedi soir. Et le troisième : le tramezzino repose sous un torchon humide.

La poêle frémit. J’y jette le contenu du sachet. La fumée s’élève. Avec le parfum chimique de la carbonara. Même si ce truc jaunâtre est à la carbonara ce qu’un tracteur est à une Ferrari. Je la fais bien, la carbonara.

C’est l’absence qui fait mal ? Non. C’est la perte qui fait mal. C’est autre chose que l’absence. La perte sait ce qu’elle a perdu. L’absence, ça peut être une sensation vague, une émotion sans corps et sans son de quelque chose qui me manque, que je n’ai pas, mais je ne sais pas ce que c’est. La perte, c’est ce que j’éprouve, parce que je sais. Et c’est pire que l’absence.

Qu’est-ce que vous faites au bureau à cette heure-là ? Vous n’arrivez pas à dormir ?
— Non. Et comme je ne dors pas, personne d’autre ne dort.

une femme de première classe. Avec la douceur d’une mère et la perfidie d’une grande sœur.

Mais là, il ressemblait à un chiffon à poussière.

Il voulait sonner menaçant. Et menaçant il sonna.

Puis-je vous offrir un café, de l’eau…
— De l’eau, non merci, celle qui tombe dehors me suffit.

la femme d’un ami devenait automatiquement un homme.

On a réfléchi.
— Ça, c’est la grande nouvelle de la journée,

On ne montre pas les couleurs des fleurs, l’herbe verte. On n’envoie pas les parfums dans l’air pour ensuite refermer la boîte avec des nuages et revenir en arrière. Ça ne se fait pas.

Et que vas-tu faire de beau ?
— Du yoga.
— Ce truc où tu te fais des nœuds et après il faut la scientifique pour te décoincer ?
— Quand on sera vieux, que je serai agile et huilé et que tu ne pourras même pas te baisser pour ramasser tes clés, on en reparlera.

Je ne deviendrai pas vieux.
— Sombre et solitaire. Comme il sied à un véritable policier.

Dans les villages, on ne dit jamais le nom des rues. On dit : j’habite à côté du glacier, après la banque, ou à côté de chez Mimì. On ne dit pas comme à Rome : j’habite au 15, via Treviso.

« Comment ronflent les marins soviétiques ? demanda Rocco, amusé.
— Comme des URSS ! » Et elle se mit à rire.

Comment viennent les intuitions ? Souvent à l’improviste. Souvent, ce sont des choses que l’on sait déjà qui apparaissent soudain, comme les lucioles en juin. Parfois, elles peuvent ressembler à des ampoules que l’on croyait grillées mais qui se rallument par miracle.

Quand un chien te trouve, tu dois le garder. On n’en croise jamais un par hasard dans la vie.

« Les souvenirs s’en vont, mon amour. Jour après jour. Tu ne t’en aperçois peut-être pas, mais ils s’en vont. Les beaux comme les terribles. La nuit les avale, et ils vont se mélanger aux souvenirs des autres. Tu ne les retrouves plus, même si tu essaies. Jusqu’à ce que tu deviennes toi-même un souvenir. 

image : Un « raccard » de la Vallée d’Aoste

3 Replies to “Manzini, Antonio «Maudit printemps» (2017)”

  1. Sympa, le clin d’œil.
    M. K.

    Tellement aussi de choses à citer, comme ses problèmes de chaussures :

    — Il y a un magasin qui vend des Clarks ici à Aoste ? Celui où je me fournissais a fait faillite.
    — Tu les as toutes finies ? »
    Schiavone hocha la tête.
    « Onze paires ? »
    Schiavone hocha encore la tête.
    « Mais pourquoi tu ne t’achètes pas d’autres chaussures ?
    — Mais pourquoi tu ne t’occupes pas de tes fesses ? Alors, il y en a un ou pas ?
    — Ben non, je sais pas…
    — Si tu en trouves un, tu m’en achètes une paire ? Quarante-quatre.
    — Reçu… »

  2. Ça donne envie. J’espère que maître K entendra ma prière murmurée sous d’autres cieux.
    Et les clarks ! J’en ai usé des paires au lycée. Et j’ai en mémoire leur aspect casse-gueule sur les passages protégés détrempés par le pluie (j’avais récolté un gros bleu sur le postérieur mais il est parti depuis le temps).

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