Viggers, Karen «La Maison des hautes falaises» (2016)

Viggers, Karen «La Maison des hautes falaises» (2016)

Auteur : Née à Melbourne, Karen Viggers est vétérinaire, spécialiste de la faune sauvage. Elle exerce dans divers milieux naturels, y compris l’Antarctique. Elle vit aujourd’hui à Canberra, où elle partage son temps entre son cabinet et l’écriture. «La Mémoire des embruns», son premier roman, a été numéro un des ventes du Livre de Poche durant l’été 2016. En 2016 elle publie «La Maison des hautes falaises» suivi en 2017 par « Le Murmure du vent» , en 2019 par « Le bruissement des feuilles»

Parution : 31 mars 2016 Les escales 304 pages / mars 2017 Le Livre de poche 512 pages

Résumé

Hanté par un passé douloureux, Lex Henderson part s’installer dans un petit village isolé, sur la côte australienne. Il tombe très vite sous le charme de cet endroit sauvage, où les journées sont rythmées par le sac et le ressac de l’océan. Au loin, il aperçoit parfois des baleines. Majestueuses, elles le fascinent.

Peu de temps après son arrivée, il rencontre Callista, artiste passionnée, mais dont le cœur est brisé. Attirés l’un par l’autre, ils ont pourtant du mal à laisser libre cours à leurs sentiments. Parviendront-ils à oublier leurs passés respectifs et à faire de nouveau confiance à la vie ?

Dans la lignée de La Mémoire des embruns, un roman tout en finesse, véritable ode à la nature et à son admirable pouvoir de guérison.

Un long et merveilleux roman d’amour. Nathalie Six, Avantages.

Une pure merveille. Gérard Collard, librairie La Griffe noire.

Mon avis : Tout comme j’avais beaucoup aimé « La Mémoire des embruns » j’ai « re-fondu » en lisant celui-ci. Paysages et des personnages qui se font écho ; un livre sur le deuil, sur la peur de l’autre. La perte de confiance en soi, le renoncement ; sur la décision de tout quitter pour se lancer dans une nouvelle vie. Un livre aussi sur le poids du passé et des racines, sur la transparence et le secret. Sur l’intégration d’un nouvel arrivant – de la ville en plus – dans un petit monde fermé. Des personnages écorchés, traumatisés, à fleur de peau, à vif, déchirés … qui ont peur de faire un pas vers l’autre… Des passions : la peinture, les baleines… L’évasion dans la lecture, la peinture..

Très humain, avec des descriptions de la nature et des animaux qui sont magnifiques, une grande sensibilité et beaucoup d’humanité. Tous les personnages sont touchants, et les personnages secondaires sont aussi bien présents… Un très bon livre de vacances ( je dirais plus pour un public romantique et féminin, bien que la partie « baleine » – chasse et sauvetage- bien documentée – l’auteur est vétérinaire, spécialiste de la faune sauvage- est intéressante pour tout le monde.

Belle analyse aussi des méfaits de la médiatisation des événements…

Extraits :

Il y avait un recoin sombre, trop sombre, en elle et, si elle s’y plongeait, elle savait qu’elle n’était pas certaine d’en ressortir.

Les marchés servaient autant à observer les gens et à entretenir un minimum de relations sociales qu’à vendre quoi que ce soit.

Il était habitué à vivre dans un monde où tous se battaient pour devenir autre chose, gagner plus d’argent, accumuler plus de possessions. Son attitude était différente. Plus simple.

La musique, c’était toujours mieux que les mots. Une façon confortable d’être simplement ensemble, sans avoir besoin de se dire quoi que ce soit.

l’histoire était une chose importante dans la famille. Grâce à elle, on apprenait à éviter de reproduire des erreurs passées et à mieux s’orienter dans la vie. Ses parents avaient beaucoup insisté là-dessus : il fallait s’arranger pour effacer les erreurs des générations précédentes. À croire parfois qu’ils portaient tous les problèmes du monde sur leurs épaules.

Je pense qu’il vaut mieux qu’on garde notre dignité. Qu’on évite de disséquer notre passé. Nous ne ferions que gâcher ce que nous avons vécu.

Elle était différente. À côté d’elle, les autres femmes ressemblaient à des feuilles d’automne.

il sentait qu’il était dans un de ces jours où son côté sombre prenait le dessus – des souvenirs noirs qui s’étiraient jusqu’à l’enfance, sans un seul rayon de soleil. Le vide béait en lui, montait comme des sables mouvants ténébreux qui tentaient de l’aspirer. Seul, tout était trop difficile.

Toi aussi, tu as du goût. Mais il faut toujours une touche féminine, n’est-ce pas, pour qu’une maison soit chaleureuse,

— Je n’ai pas du tout la bosse de l’art.
— La bosse de l’art ? reprit-elle dans un éclat de rire. L’art vient plutôt du cœur. Et de l’esprit. Ça se ressent.
— Je suis perdu pour la cause, dans ce cas. Je n’ai pas de cœur non plus.

Et elle se disait qu’une pointe de folie ne pourrait lui faire de mal. Tant qu’elle la gardait sous contrôle et qu’elle n’oubliait pas que la réalité n’accorde que rarement ce que promettent les rêves.

Ah, la chambre forte de la mémoire… elle avait la fâcheuse habitude de s’entrouvrir.

Un instant, il y avait un enfant, un avenir pour eux, l’autre il n’y avait plus qu’une place vide où résonnaient des espoirs trahis.

Je sais que c’est difficile mais, parfois, il faut juste ramasser son fardeau et continuer à avancer.

On pouvait faire ça, avec l’art : changer les règles, modifier l’horizon, embellir les couleurs. Dommage qu’il ne soit pas si facile de faire pareil dans la vraie vie.

On s’accroche tous à nos passions. Surtout si elles appartiennent à notre passé. Quand on perd quelque chose, les souvenirs, c’est tout ce qu’il nous reste.

L’eau était froide, furieuse, vivante, comme une bête. Elle s’enroulait autour de ses cuisses, le tirait vers le large, percutait son torse, le griffait pour le retenir.

Tout à coup, il entendit le rugissement terrible du vent au large, laid et sinistre, comme la mort. Il sentit le rouleau arriver, une masse d’eau gonflée par le vent.

Le monde se referma sur lui comme une couverture de silence.

le purgatoire, c’était ici, sur Terre, pour ceux qui restaient avec leur terreur et leur chagrin.

Elle avait découvert que la peine s’accumule. Qu’une peine toute fraîche peut rouvrir le caveau de celles passées et non guéries, et le tout s’entremêle pour former une nouvelle douleur complexe.

il se rendit compte que sa haine avait pour ainsi dire disparu. Dissoute. Il comprit que chaque individu devait accepter son histoire personnelle, que personne ne pouvait y échapper. Même ces hommes, avec leurs visages normaux, avaient dû porter comme un fardeau leur mode de vie passé.

Dans la vie, on n’est pas obligés de terminer tout ce qu’on entreprend. Parfois, il est acceptable de passer à autre chose. En fait, c’est une nécessité.

— Il faut bien se construire un visage public pour pouvoir se cacher derrière.

Tu ne peux pas laisser le passé se mettre en travers de ton chemin.

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