Viggers, Karen « Le Murmure du vent» (2017)
Auteur : Née à Melbourne, Karen Viggers est vétérinaire, spécialiste de la faune sauvage. Elle exerce dans divers milieux naturels, y compris l’Antarctique. Elle vit aujourd’hui à Canberra, où elle partage son temps entre son cabinet et l’écriture. «La Mémoire des embruns», son premier roman, a été numéro un des ventes du Livre de Poche durant l’été 2016. En 2016 elle publie «La Maison des hautes falaises» suivi en 2017 par « Le Murmure du vent», en 2019 par « Le bruissement des feuilles»
Parution : Les escales – 06.04.2017 – 395 pages / Le Livre de poche – 28.03.2018- 480 pages (traduit par Isabelle Chapman)
Résumé : Abby est une biologiste qui arpente seule la vallée des monts Brindabella, dans le Sud-Est australien, pour observer les kangourous. Quand elle rencontre Cameron, un jeune journaliste, tout en lui l’agace. Et lorsqu’il cherche à la revoir, elle fait tout pour l’éloigner. Pourquoi prendrait-elle le risque d’être à nouveau blessée par la vie ? Un jour, elle fait la connaissance d’une vieille dame, Daphne, qui a grandi dans ces montagnes et vient régulièrement s’y ressourcer.
Elle aussi porte le poids de douleurs secrètes. Malgré leur différence d’âge, les deux femmes se rapprochent. Avec délicatesse, Daphne essaye de sortir Abby de son marasme. Le lien qui les unit leur permettra-t-il, enfin, de se délivrer du passé et de regarder vers l’avenir avec confiance ?
Mon avis : J’avais eu un gros coup de cœur pour «La mémoire des embruns», beaucoup aimé «La Maison des hautes falaises» et passé un excellent moment en Tasmanie avec «Le bruissement des feuilles» mais cette fois ci je suis déçue.. C’est trop lent… et je n’ai pas accroché. Les personnages d’Abby et de Daphne sont des personnages intéressants mais je n’ai pas réussi à m’attacher à elles. Toutes deux ont un fort caractère et un passé difficile. Le seul personnage pour lequel j’ai ressenti quelque chose est finalement le jeune journaliste.
Certes le fond du roman est un problème de société qui est bien traité : les kangourous qui deviennent trop nombreux, menacent la survie des autres espèces pour finir par mourir de faim eux aussi. Il y a le débat entre les politiques et les défenseurs de la nature ; la manière dont les Blancs ont traité les Aborigènes. Mais au final même la problématique des kangourous n’a pas émergé… Je suis totalement passée à côté et rien ne m’a vraiment touché dans le livre. Pourtant je suis en général bon public pour ce genre de romans… Oui une jolie histoire d’amitié transgénérationnelle, la difficulté de vivre avec son passé, l’importance d’arriver à s’en libérer…
Ce que j’ai bien aimé : les excursions dans le Sud-Est australien … c’est maigre…
Extraits :
Le retour dans les lieux qui vous ont vu naître a toujours quelque chose de rassurant – une pincée douce-amère de nostalgie sur un bouquet de bons souvenirs. Votre esprit occulte les mauvais. Et c’est tout aussi bien.
sa mère était en communication avec la source même de la vie. Elle leur montrait le chemin d’une liberté enivrante où le danger n’existait pas. Mais cela ne durait jamais.
La vie n’était pas facile, elle ne ressemblait pas à celle que connaissaient les autres, mais l’amour était plus fort que tout, et la famille leur plus grande richesse. Ils découvraient tous les jours des façons de contourner la maladie de Grace, ils apprenaient la tolérance.
Si la disparition d’un aïeul s’inscrit dans l’ordre des choses, en revanche, vos parents devraient rester en vie jusqu’à ce que vous n’ayez plus besoin d’eux.
L’oisiveté n’est bonne pour personne et incite plutôt à se compliquer la vie.
Tout le monde a besoin d’une mère. Ceux qui en ont une ne se rendent pas compte de la chance qu’ils ont.
Le monde change tellement vite, les gens ne savent plus distinguer ce qui est important de ce qui ne l’est pas. Ils accordent autant d’attention aux bêtes qu’aux hommes.
Un journaliste doit avoir des connaissances sur tout, ou au moins avoir l’air de tout savoir.
Elle sait que c’est la meilleure stratégie : aller de l’avant, ne pas regarder en arrière.
Rien que de survivre était une gageure. Alors, parler… j’avais peur que des paroles fassent remonter tout ce à quoi j’essayais de ne pas penser.
Abby n’avait pas entendu parler des troubles bipolaires avant la fac. C’était à une fête d’étudiants. Quelqu’un évoquait la maladie mentale – la conversation tournait autour d’une de leurs camarades qui avait été hospitalisée. Elle avait été sidérée à l’idée que sa mère avait en fait souffert d’un mal bien connu. Bizarrement, cela l’avait réconfortée d’apprendre qu’il portait un nom. Sur Internet, elle avait effectué des recherches, stupéfiée par le nombre de personnes célèbres du monde des lettres, des sciences et des arts ayant été affectées par cette forme de psychose : Ernest Hemingway, Vincent Van Gogh, Ludwig Beethoven, Isaac Newton, Virginia Woolf, Albert Einstein, Kurt Cobain. Les descriptions correspondaient exactement : l’impulsivité, les insomnies, les changements brusques de l’humeur, l’énergie débordante, le débit de parole accéléré, les conduites à risque, puis la dépression, l’incapacité de sortir de son lit.
une des caractéristiques de la biologie des kangourous est de se reproduire continuellement jusqu’au moment où ils sont tellement nombreux qu’ils meurent de faim. Il décrit la situation sur le site où l’abattage est prévu. Le surpâturage et la dégradation des milieux naturels l’imposent. D’autres espèces sont en voie d’extinction et il n’y a plus rien à manger pour les kangourous. Ce serait plus cruel d’attendre qu’ils meurent.
le débat porte sur les valeurs, pas sur les kangourous. Elle comprend mieux à présent : défenseurs des animaux versus écologistes, ville versus campagne, kangourous versus plantes et sauriens.
Le gouvernement est trop content de sortir les fusils et de tuer des animaux plutôt que d’allonger l’argent nécessaire pour les déménager.
Ce n’est pas la peur de mourir qui la retient. Elle a choisi de vivre parce que justement elle est forte, parce qu’elle est capable de faire face à l’adversité, de composer avec la douleur. Tout le monde n’a pas cette forme de courage.
une immense noirceur s’était glissée en lui. Il s’était refermé sur lui-même comme une anémone de mer se repliant sur ses parties tendres et perdant tout son éclat. Elle le voyait dans ses yeux vides chaque matin quand il sortait de leur chambre.
Il avait passé toute sa vie proche de la terre, dans les grands espaces, dans l’air pur des montagnes. Son âme était à l’étroit dans notre jardin, entouré de barrières.
C’est la façon dont nous vivons avec qui fait ce que nous sommes et départage les forts des faibles. » Sauf qu’en chacun la force côtoie la faiblesse, ainsi que le courage d’entreprendre un nouveau départ. C’est le chemin qu’elle a suivi jusqu’ici, et aujourd’hui, elle fait un pas supplémentaire.
Le pays vit en vous et vous êtes le pays, dit-elle en soupirant comme si le poids du monde reposait sur ses épaules.
Après l’arrivée des Blancs en Australie, la maladie avait décimé son peuple. Puis, le petit nombre qui survécut fut parqué dans des missions.
Info : Les Macropodidae (ou macropodidés en français) forment une famille de marsupiaux qui comprend les kangourous, les wallabies, les petrogales, les dendrolagues, les thylogales et quelques autres espèces. Ils vivent tous soit en Australie, soit en Nouvelle-Guinée, soit en Indonésie.