Viggers, Karen «Le bruissement des feuilles» (2019)
Auteur : Née à Melbourne, Karen Viggers est vétérinaire, spécialiste de la faune sauvage. Elle exerce dans divers milieux naturels, y compris l’Antarctique. Elle vit aujourd’hui à Canberra, où elle partage son temps entre son cabinet et l’écriture. «La Mémoire des embruns», son premier roman, a été numéro un des ventes du Livre de Poche durant l’été 2016. En 2016 elle publie «La Maison des hautes falaises» suivi en 2017 par « Le Murmure du vent», en 2019 par « Le bruissement des feuilles»
Parution : Les escales – 11.04.2019 – 426 pages / Le Livre de poche – 25.03.2020- 576 pages
Résumé : Miki, dix-sept ans, vit coupée du monde depuis l’incendie qui a coûté la vie à ses parents. Sous le joug de son frère Kurt, un chrétien fondamentaliste, elle travaille comme serveuse dans leur restaurant et le soir, se rêve en héroïne de romans. Lors d’une escapade secrète en forêt, elle fait la rencontre de Leon, un garde forestier tout juste installé en Tasmanie. Les deux jeunes gens se donnent alors une mission extraordinaire : sauver les diables de Tasmanie de l’extinction.
Au coeur de paysages somptueux, le combat inoubliable d’une jeune fille pour protéger la nature et se sauver elle-même.
Mon avis :
Décidemment, j’aime beaucoup cette romancière. J’ai passé un excellent moment en Tasmanie avec Miki, Léon, Max, Géraldine et les autres.
Les trois personnages principaux sont des jeunes qui essayent de se construire une vie (ou une enfance) après avoir connu un début de vie bien difficile. Les trois vivent dans la peur et la solitude. Miki, après avoir perdu ses parents dans un incendie, vit isolée des autres car son grand frère lui interdit tout contact avec les personnes qui l’entourent. Léon, lui, débarque dans le village et se retrouve immédiatement isolé car le métier de garde-forestier dans un univers ou les bûcherons sont rois est un lourd handicap. Quant à Mike, c’est un jeune garçon qui est à la fois terrorisé par son père et par un grand de son école.
Un point commun est l’amour de la nature ou/et des animaux.
Miki se ressource lors de ses rares promenades dans la nature, en foret et ses contacts avec les animaux – Opossums, aigles, chats marsupiaux, diables de Tasmanie – et les arbres.
Max va faire la connaissance de son nouveau voisin, Léon, qui va le prendre sous son aile, l’aider en devenant une sorte de coach sportif et en l’aidant à protéger les chiens dont il est tombé amoureux.
Mais pour avancer vers la liberté, la route est longue et il faudra beaucoup lutter pour vivre libres dasn cet univers hostile.
Charlotte Brontë et Jane Eyre, Emily Brontë et Les Hauts de Hurlevent , Thomas Hardy et Tess d’Urberville et Loin de la foule déchaînée, St Exupéry et Le Petit Prince, Ernest Hemingway et Le vieil homme et la mer, aideront Miki à vivre sa solitude et à comprendre la vie. Le pouvoir des livres et l’aide de Géraldine, une ancienne enseignante qui travaille à l’Office du tourisme seront d’une grande aide pour lui tenir la tête hors de l’eau.
Quand à Léon, il renouera avec son vieux grand-père qui est « détenu » dans une maison de retraite et grâce à lui renouera avec le passé et sera guidé sur le chemin du pardon.
Un beau récit sur la liberté, l’amitié, la nature, l’évasion sous toutes ses formes, l’envie de vivre libre, les dangers de l’argent et des addictions, la volonté de s’intégrer et de combattre l’injustice, la violence faite aux femmes (tant morale que physique), l’intolérance.
Et c’est aussi un message d’alerte écologique sur les dangers qui guettent la nature en Tasmanie : éradication de certaines espèces, déboisement, destruction de la nature…
Extraits :
Quand elle entendit un raclement, elle braqua sa lampe torche vers un dasyure tacheté – connu aussi sous le nom de chat marsupial
Elle aimait bien ces chats marsupiaux avec leur pelage tacheté, mais elle préférait les diables de Tasmanie.
Ce que j’aime dans la littérature, reprit Geraldine, c’est qu’elle nous apprend à vivre. On tombe amoureux des personnages et on voit le monde à travers leurs yeux. Puis on découvre que des pans de leur vie ressemblent à la nôtre. Le lieu et l’endroit diffèrent, mais les problèmes sont les mêmes. Il faut être assez intelligent pour le voir.
Dans une autre rue, elle regarda la télévision à travers une fenêtre avant de comprendre qu’il était aussi triste d’observer les gens de l’extérieur que de l’intérieur. Tant qu’on n’interagissait pas avec d’autres personnes, on restait seul. Cette prise de conscience l’incita à rentrer chez elle. Elle n’avait pas seulement besoin de liberté, elle voulait aussi de la compagnie.
Plus tard, elle se demanda où les heures avaient filé. C’était la magie des livres, de la découverte des secrets gardés entre leurs pages.
Les créatures de la forêt étaient trop occupées : des rats et des souris marsupiales fouinaient dans les sous-bois, des opossums grignotaient des feuilles, des chouettes chassaient du gibier. Si les gens apprenaient à aimer la forêt au lieu de la craindre, ils auraient peut-être envie de la préserver.
Les livres nous montrent d’autres destins, parce que nous ne pouvons pas tout vivre – nous ne vivons que notre propre vie. Les livres sont capables de nous ramener dans le passé ou de nous transporter dans le futur. Ils élargissent nos esprits. Ils nous montrent de nouveaux mondes. C’est ça, la fiction. Son pouvoir est considérable.
Pour trouver sa propre vérité, le Prince avait quitté son monde habituel et confortable.
Mais lorsqu’il sortit du parking, les paroles de Stairway to Heaven, « l’escalier menant au paradis », de Led Zeppelin, se mirent à défiler dans sa tête. Il fila sur la route sous le pâle clair de lune, dont le reflet blanc flottait sur l’eau, et il chanta à tue-tête. C’était comme s’il entendait cette chanson pour la première fois. Il se demanda comment il pouvait ne comprendre ces paroles que maintenant alors qu’il avait passé des années à les chanter. Il n’y avait jamais réfléchi avant, se contentant de les réciter pendant des fêtes ou autour d’un feu, pour s’amuser entre amis.
Cette chanson résonnait sans doute différemment pour tout le monde mais, pour lui, cette nuit, elle parlait de beaucoup de choses. Accomplir le grand voyage de la vie. Faire des choix, se tromper. Affronter la mort. Gagner en sagesse. Faire face au passé. Pardonner et se racheter.
Il la chanta de nouveau, tête en arrière pour mieux s’abandonner, sachant au fond de lui-même qu’un jour il lui serait peut-être possible de changer de voie et de pardonner à son père.
Elle était piégée et l’impatience qui l’habitait évoquait une rivière en crue débordant de son lit. Plus elle était privée de liberté, plus elle en désirait.
La vie n’était pas faite pour être volée.
Elle savait qu’elle pourrait recommencer à zéro car elle l’avait déjà fait. Elle savait aussi que le plus important dans la vie ne pouvait être brûlé. La liberté. La volonté. L’amitié. La détermination. Le courage.
Info et Image : Diable de Tasmanie : (Sarcophilus harrisii) est une espèce de marsupiaux carnivores ne vivant que sur l’île de Tasmanie, au sud de l’Australie. Disparu du « continent » australien environ 400 ans avant l’arrivée des premiers colons européens en 1788, il a longtemps été considéré comme une menace pour le bétail et a été chassé impitoyablement jusqu’à ce qu’il devienne une espèce protégée à partir de 1941. Depuis les années 1990, un grand nombre de représentants de l’espèce sont victimes d’une tumeur cancéreuse (Devil facial tumour disease, ou DFTD), transmissible par morsure, qui réduit fortement sa population.Le diable de Tasmanie est caractérisé par sa fourrure noire, l’odeur forte qu’il dégage lorsqu’il est anxieux, son hurlement fort et inquiétant et son tempérament agressif envers ses congénères quand il mange.Cette espèce est la seule survivante du genre Sarcophilus mais il existe encore d’autres marsupiaux carnivores (chats marsupiaux).