Hénaff, Sophie « Rester groupés » (2016)

Hénaff, Sophie « Rester groupés » (2016)

Autrice : Sophie Hénaff est née le 9 août 1972, est une journaliste, romancière et traductrice française, auteure de romans policiers humoristiques. responsable de la rubrique humoristique « la Cosmoliste » du magazine Cosmopolitan. Elle a fait ses armes dans un café-théâtre lyonnais (L’Accessoire) avant d’ouvrir avec une amie un « bar à cartes et jeux de sociétés », le Coincoinche, puis, finalement, de se lancer dans le journalisme. Poulets grillés, son premier roman, a reçu le prix Polar en série, le prix Arsène-Lupin en 2015, et le Prix des lecteurs du Livre de Poche dans la catégorie policière en 2016.
En 2021 elle publie un roman « Voix d’extinction »

Série Commissaire Anne Capestan : Poulets grillés (2015 ) – Rester groupés (2016) – Art et Décès (2019) –

Série Anne Capestan n° 2

Résumé : Ça bouge au 36 Quai des Orfèvres. De nouvelles recrues rejoignent les rangs de la brigade maudite du commissaire Anne Capestan, dont Saint-Lô, sorti de l’hôpital psychiatrique dans la peau de d’Artagnan et Ratafia, rat policier.
Sale affaire pour l’équipe de bras cassés : trois assassinats éparpillés sur le territoire. Un point commun : le tueur a prévenu ses victimes. Cerise sur le gâteau : l’ex beau-père de Capestan est l’une d’elles.
Humour, dérision, suspense… après le succès de Poulets grillés, prix Polar en séries, Sophie Hénaff récidive !

Mon avis : Evidemment l’effet de surprise de « Poulets grillés » est passé. Mais j’ai bien aimé aussi. L’arrivée de d’Artagnan est une super idée, avec son langage d’époque. On plonge dans le passé de La Capestan, et elle s’humanise. Et toujours des descriptions savoureuses, l’humour, le système »D »,  l’amitié, la sensibilité dans les relations de la bande de branquignols, l’intelligence qui prime sur les « gros bras », la police qui vient en aide à la population sans se poser de questions.. Et j’adore les post-it qui s’amassent … Plus qu’à attendre l’année prochaine ! C’est ce qui arrive quand on se jette sur la suite !  😉

Extraits :

Regarde la corne de rhinocéros. Un jour y a un mou-du-plumard qu’a croisé un rhino, il s’est dit « Waouh, balaise, j’aimerais bien la même, ça se trouve il suffit de la piler et de la bouffer pour que ça marche ». Et depuis tous les bito-inquiets de la planète exterminent l’espèce pour ranimer Popaul.

Les paquets de silence s’empilaient dans la pièce, encombraient l’espace, les masquaient l’un à l’autre. Les vestiges de leurs amours couraient comme des fantômes le long des plinthes. Ils ne trouvaient pas les mots parce que, sans doute, il n’y en avait pas.

Nous, on est censés jouer la Suisse, les limiers indépendants.

prénom : Blanche. Prémonition ou volonté de ne pas encombrer leur jeunesse amoureuse ? Qu’est-ce qui avait poussé ses parents à la baptiser ainsi d’un prénom qui la rendait plus incolore encore, qui l’effaçait, elle qui existait déjà si peu.

Elle se demanda, comme souvent, si c’était mieux de ne jamais avoir connu le vrai bonheur ou de l’avoir pleinement vécu pour qu’il se recroqueville ensuite.

La pluie avait cessé de tomber et le soleil reprenait possession de son territoire. Les couleurs soulagées s’éveillaient peu à peu, les jaunes des façades, l’orangé des toits, le rouge des carreaux de terre cuite libéraient leurs pigments sous la clarté retrouvée.

La mémoire s’effondrait mais l’intelligence pour sa plus grande part restait intacte et avec elle l’absolue volonté de masquer son état.

La pergola sans vigne avait l’air d’un étendoir à linge.

Le rétablissement de la vérité n’avait aucun intérêt s’il s’agissait juste d’arriver, de piétiner les rêves ou les reconstructions avec les godillots du rationnel, puis de repartir, souverainement indifférent, comme le dernier des sagouins.

D’un coup, la terre bouge, tu t’aperçois que tu vis sur un sol meuble. Toute ton existence, tout ce que tu as mis des années à construire, n’est plus soumis qu’à la santé d’un seul être. C’est vertigineux. Après, tu trembles tout le temps.

le désespoir peut être réel, mais la peur, elle est abstraite. La vraie terreur, c’est celle de perdre.

Les gens dehors n’étaient que tas de laine et de plumes sombres qui passaient de boutique en boutique, la tête rentrée dans le cou, le pas engoncé et précipité.

Enfant, Saint-Lô s’était imaginé un tout autre destin, forgé de panache et de batailles. Il avait si souvent rêvé de libérer une Excalibur, de chevaucher sans répit pour conquérir terres et gloires. Mais ses tripes et ses talents étaient coincés ici, en ce siècle où chacun ricanait.

Avec son front de rascasse, un sourire de tronçonneuse et l’œil plus vide que les avens des Causses, il respirait la suffisance et ne s’embarrassait ni de manières, ni d’humanité.

Il assistait en arbitre à un ping-pong dont il confisquerait bientôt la balle.

Une simple apparition et elle ne comprenait même plus Le Miel et les Abeilles. C’étaient les prémices de l’amour, la recette du flan dans la tête et des diodes dans tout le reste du corps.

Cette sensation allait rester collée comme un Post-it dans un coin de sa tête.

Elle s’était renfermée et avait étouffé le moindre souffle de joie alentour. Elle laissait sa colère couver en permanence, latente, comme une menace, pour s’assurer le silence.

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