Calbérac, Ivan «Venise n’est pas en Italie» (2015)
Auteur : Ivan Calbérac, né le 3 novembre 1970, est un réalisateur, scénariste, producteur et écrivain français.
Flammarion – 10.03.2015 – 250 pages / Poche – 01.02.2017 – 317 pages
Résumé : Emile a quinze ans. Il vit à Montargis, entre un père doux-dingue et une mère qui lui teint les cheveux en blond depuis toujours, parce que, paraît-il, il est plus beau comme ça. Quand la fille qui lui plaît plus que tout l’invite à Venise pour les vacances, il est fou de joie. Seul problème, ses parents décident de l’accompagner… C’est l’histoire d’un adolescent né dans une famille inclassable, l’histoire d’un premier amour, miraculeux et fragile.
C’est l’histoire d’un voyage initiatique et rocambolesque où la vie prend souvent au dépourvu, mais où Venise, elle, sera au rendez-vous. Un roman où l’humour se mêle à l’émotion, dans la lignée de « La vie devant soi » de Romain Gary, de « L’attrape-coeurs » de J. D. Salinger, ou du film « Little Miss Sunshine ».
Mon avis : Sympa, gentillet dans le joli sens du terme. L’histoire d’un premier amour, de la rencontre au lycée de deux jeunes ados que tout sépare. Le jeune garçon vit avec ses parents dans une caravane en attendant un hypothétique permis de construire de la maison familiale ; son père est Représentant de Commerce (et philosophe) , son frère dans l’armée car il ne sait pas faire grand-chose et sa mère – qui a pour obsession de le vouloir blond et lui décolore ls cheveux – est très gentille mais tout sauf montrable. Lui aime bien sa famille mais en a quelque peu honte. Et quand il tombe amoureux de Pauline, qui vit dans les beaux quartiers et dont les parents sont beaux, cultivés et raffinés… il veut bien évidemment tout faire pour que Pauline ne découvre pas sa situation familiale ; il va donc remanier quelque peu la réalité.
Quand la jeune fille l’invite a le voir jouer en concert à la Fenice de Venise, il se réjouit d’y aller. Quand les parents décident de se joindre à la fête et de l’accompagner en camping… les choses se compliquent sérieusement.
Un joli petit moment de lecture mais qui ne laissera pas un souvenir impérissable. Petite comédie romantique qui m’a parfois fait penser aux livres de Barbara Constantine. Un livre touchant, avec des tas de petites phrases qui font sourire…
Le titre est tiré d’une chanson dont les paroles sont de Claude Lemesle interprétée par Reggiani :
« Venise n’est pas en Italie,
Venise c’est chez n’importe qui,
C’est n’importe où, c’est important
Mais ce n’est pas n’importe quand,
Venise, c’est quand tu vois du ciel
Couler sous des ponts mirabelle
C’est l’envers des matins pluvieux
C’est l’endroit où tu es heureux. »
Extraits :
J’ai eu l’impression de la connaître depuis toujours, c’est peut-être ça l’amour, se sentir incroyablement familier avec une inconnue. Un peu comme quand on écoute un tube à la radio pour la toute première fois, et qu’aussitôt, on sent que cette chanson va désormais habiter notre vie, qu’on va l’enregistrer, se la passer en boucle, et qu’on l’entendra encore des siècles plus tard, c’est évident et on peut pas l’expliquer.
Parce que, enfant, la plupart du temps, quand il commence à faire de l’orage, on peut pas lutter. On prend cher, on est en première ligne, on morfle, c’est la loi de la jungle qui s’applique aussi en milieu urbain. Et si on se plaint, c’est double tarif. Quand on est très vieux aussi, sans doute, parce qu’on peut plus se défendre, alors y en a plein qu’en profitent. Entre les deux, il y a l’âge adulte, c’est peut-être l’accalmie.
« Le monde est rempli de myopes qui veulent vous convaincre que le monde est flou. »
Ce doit être comme le vin, l’amour entre deux êtres, ça évolue avec le temps, il y en a qui tournent au vinaigre, d’autres qui se bonifient.
elle n’est pas belle à en mourir, non, au contraire, elle est belle à en vivre. Parce qu’elle est vraie. Parce qu’elle respire, que son cœur bat.
Personne n’est totalement hermétique, ai-je pensé, c’est comme les boîtes Tupperware, soi-disant garanties à vie, et qui s’ouvrent toutes seules dans le frigo. Ma mère prenait l’eau à une vitesse qui me laissait totalement démuni.
Elle me répète c’est pour ton bien, mais avec ce genre de phrases, on peut vous pourrir la vie radicalement.
Nietzsche a écrit que sans musique, la vie serait une erreur, mon père dit que même avec la musique, la vie est une erreur, et bourrée de fausses notes en plus.
Venise, je sais juste que c’est une ville qui peut couler, mais qui pour l’instant reste à la surface, et tout le mérite lui en revient, c’est le cas aussi de beaucoup de gens.
Mais ma mère, c’est un peu comme les divisions qu’on fait à l’école primaire, il manque souvent la retenue. Paraît que c’est un problème mondial, le manque de retenue et de poésie aussi.
Les mots sur du papier, c’est du silence qui parle, c’est le début de la poésie.
D’ailleurs c’est fou comme le passé est présent partout chez les gens qui ont peur de l’avenir.
Je me souviens juste de quoi j’ai rêvé. De Venise, bien sûr. Je pensais aux images que j’avais vues de cette ville sur l’eau, et j’ai dû beaucoup rêver d’inondation intérieure. Quand on a trop d’émotions, Venise, c’est pas qu’en Italie, c’est un peu en chacun de nous.
Selon eux, dans l’existence, il n’y avait rien de vraiment certain, à part s’en prendre plein la gueule à un moment ou à un autre, ça oui, ils pouvaient presque me le garantir, la plupart du temps, la vie les avait pris au dépourvu, comme une grosse averse quand on n’a pas de parapluie, le genre qui vous glace jusqu’aux os.
La vie m’arrivait, comme des vagues sur une plage, me recouvrait, m’inondait. Je prenais l’eau de partout, c’était même pas la peine d’écoper.
Sans doute qu’elle se rendait pas compte, parce qu’elle semblait plutôt pavée de bonnes intentions, comme l’enfer justement, et résultat, elle faisait du dégât.
Parce que niveau chaleur humaine, je me sentais bien loin de la canicule.
« La vérité, c’est qu’il y a énormément de gouttes d’eau qui ne font pas déborder le vase. »
L’air de famille, c’est souvent ce qu’il y a de plus difficile à respirer.