Burton, Jessie « Miniaturiste » (2015)

Burton, Jessie « Miniaturiste » (2015)

Autrice : Jessie Burton a étudié à l’université d’Oxford puis dans une grande école de théâtre. Elle était actrice avant de publier son premier roman, « Miniaturiste », à 32 ans. L’ouvrage a été traduit en 38 langues et vendu à plus d’un million d’exemplaires à travers le monde. Une adaptation télévisuelle a même été diffusée par la BBC en 2017. En 2016 elle publie « The muse » qui parait en français sous le titre « Les filles au lion » en 2017. Elle publie ensuite en 2019 « The Confession» qui parait en français sous le titre  « Les secrets de ma mère » en 2020.
Littérature jeunesse : « Douze princesses rebelles » est son premier livre pour la jeunesse. « Le Bal des douze princesses » des frères Grimm fut le conte favori de son enfance. En grandissant, elle s’est aperçue, selon ses propres mots, « que quelque chose ne marchait pas dans cette histoire. J’ai voulu redonner aux douze sœurs leur individualité, leur joie de vivre, leur goût de la liberté… et changer le Prince charmant !» (2019) .

L’action de son premier roman, « Miniaturiste », publié en 2014, se déroule au XVIIe siècle (1686-1687) à Amsterdam, et implique divers membres de la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC, 1602-1799). Le roman est inspiré par la maison de poupée de Petronella Oortman (1656–1716), aujourd’hui au Rijksmuseum, bien qu’il ne s’agisse pas d’un roman biographique. L’auteure a mis quatre ans pour l’écrire. Le roman a fait l’objet d’une surenchère au London Book Fair en avril 2013

Gallimard (du monde entier) – 26.03.2015 – 504 pages / Folio – 2.03.2017 – 528 pages

Résumé

Nella Oortman n’a que dix-huit ans ce jour d’automne 1686 où elle quitte son petit village pour rejoindre à Amsterdam son mari, Johannes Brandt. Homme d’âge mûr, il est l’un des marchands les plus en vue de la ville. Il vit dans une opulente demeure au bord du canal, entouré de ses serviteurs et de sa soeur, Marin, une femme restée célibataire qui accueille Nella avec une extrême froideur. En guise de cadeau de mariage, Johannes offre à son épouse une maison de poupée, représentant leur propre intérieur, que la jeune fille entreprend d’animer grâce aux talents d’un miniaturiste.
Les fascinantes créations de l’artisan permettent à Nella de lever peu à peu le voile sur les mystères de la maison des Brandt, faisant tomber les masques de ceux qui l’habitent et mettant au jour de dangereux secrets. S’inspirant d’une maison de poupée d’époque exposée au Rijksmuseum d’Amsterdam, Jessie Burton livre ici un premier roman qui restitue avec précision l’ambiance de la ville à la fin du XVIIe siècle.
Au sein de ce monde hostile, où le pouvoir des guildes le dispute à l’intransigeance religieuse et à la rigueur morale, la jeune Nella apparaît comme une figure féminine résolument moderne. Ouvre richement documentée et conte fantastique, Miniaturiste est un récit haletant et puissant sur la force du destin et la capacité de chacun à déterminer sa propre existence.

Mon avis : Alors mon amie Lily me l’a tellement recommandé qu’il était impossible de boucler l’année sans le lire ! Et la seule question qui se pose : mais comment j’ai pu passer à coté de cette petite merveille ! Gros coup de cœur pour ce livre.
Un roman inspiré librement par la maison de poupée exposée au Rijksmuseum d’Amsterdam.
J’aime les romans historiques, j’aime Amsderdam, deux raisons de plus de le lire.
Dès le début, j’ai pris en affection Nella et je dois dire que presque tous les personnages sont attachants, avec leurs failles et leurs faiblesses.
Je me suis fondue dans cette Amsterdam du XVIIème siècle et je me suis attachée à cette jeune fille qui, à 18 ans, va se retrouver dans une situation peu enviable ; elle arrive toute seule, à peine mariée, dans une maison qui est loin d’etre accueillante, habitée par des personnes qui ont des secrets à cacher et qui ne font pas grand-chose pour la mettre à l’aise. Jeune mariée, elle est impatiente de découvrir son mari, qui la fuit plutôt qu’autre chose bien qu’il soit très prévenant.
Son cadeau de mariage, une maison de poupée qu’elle pourra décorer comme elle le souhaite va lui faire faire un saut dans l’inconnu, l’étrange, le mystérieux. Elle va faire appel à un atelier de miniaturiste… qui lui réservera bien des surprises.
Au fil des mois, elle fera preuve d’une force de caractère et d’une humanité peu commune.
Dans cette ville où la religion est omniprésente, où la morale régente tout, elle se retrouve dans une famille puissante du fait de sa richesse, mais bien loin des standards des bien-pensants (une belle-sœur non mariée, un homme de confiance de couleur…). Et comme elle st bien plus jeune que son mari, marchand richissime qui faisait l’objet de toutes les convoitises, elle est attendue au tournant… De magnifiques personnages de femmes et j’ai aussi beaucoup apprécié la description de la condition féminine au XVIIème aux Pays-Bas.
Un petit bémol : la fin est un peu abrupte… à moins qu’une suite se profile… mais cela me semble bien peu probable…
Juste à temps pour faire partie des coups de cœur de l’année 2020 : une année qui a laissé une grande place à la lecture…

Extraits :

La nouvelle belle-sœur de Nella est on ne peut plus attentive aux dépenses de la maisonnée ; les colonnes verticales sont une portée naturelle pour elle, et les chiffres forment des notes dont leur argent compose la mélodie silencieuse.

Les femmes ne construisent rien, et surtout pas leur propre destin ! Notre destin est entre les mains de Dieu — en particulier celui des femmes, quand leur mari les abandonne ou qu’elles subissent la torture d’un accouchement.

Les mots sont comme de l’eau, dans cette ville, Nella. Une goutte de rumeur pourrait tous nous noyer.

Le vent de janvier, turbulent, gonfle son manteau et l’agresse comme des griffes de chat.

Nous formons ensemble une trame tissée d’espoir dont la confection ne revient qu’à nous.

Quoi qu’il en soit, elle voudrait le contredire : elle a l’impression que son enfance est incroyablement loin, remplacée par l’incertitude et un léger sentiment de désarroi qui ne la quitte pas.

— La mémoire par les aliments, continue Johannes. La nourriture est un langage. Panais, navets, poireaux et endives. J’en croque quand personne ne peut m’entendre. Et le poisson ! Plie, sole, limande et morue sont mon quatuor de tête, mais je dégusterais tout ce qu’offrent les mers et les rivières qui coulent dans ma République. »

Ce n’est pas un homme qu’elle a épousé, mais un monde — argentiers, belle-sœur, curieuses relations, une maison dans laquelle elle se sent perdue, une autre plus réduite qui l’effraie.

il vaut mieux que l’amour soit un rêve qu’une réalité, qu’il vaut mieux le chercher que le trouver.

Il y a des horizons derrière les murs de briques. Vous verrez.

Pour désirer la disparition d’un autre être, combien de douleur avez-vous engrangé ?

Le problème, Seigneurs, Mesdames, c’est que ceux qui n’ont pas d’horizons veulent vous arracher les vôtres. Ils n’ont rien, que des briques et des poutres, pas la moindre miette des grandes joies de Dieu.

Ils se sont tenus les mains en silence. … Les mots avaient perdu leur pouvoir trompeur et, à leur place, tous deux avaient parlé une langue plus profonde, plus riche.

Elle se laisse glisser au sol et pose la tête sur ses genoux repliés pour étouffer des sanglots silencieux. Sans personne pour la serrer dans ses bras, elle s’enlace, le corps secoué de sanglots.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *