Row, Jess « Un monde nouveau » (RL2025) 608 pages

Auteur: Né le 25 octobre 1974 à Washington,
Jess Row est l’auteur de nouvelles récompensées par deux Pushcart Prizes et un PEN/O. Henry Award. Il est lauréat de plusieurs bourses prestigieuses – celles de la fondation Guggenheim et du National Endowment for the Arts. En 2007, le magazine Granta l’a classé parmi les « 20 meilleurs jeunes écrivains américains ». Il enseigne à l’université de New York et à l’école de zen Kwan Um. Il partage sa vie entre New York et Plainfield (Vermont). « Un monde nouveau » est son premier livre traduit en français.
Albin-Michel – Terres d’Amérique – 20.08.2025 – 608 pages – (The new Earth 2023) traduit de l’Américain par Stéphane Roques
Résumé:
Issue de la bourgeoisie juive new-yorkaise, la famille Wilcox n’a plus guère en partage que son nom. Membre d’un cabinet d’avocats huppé, Sandy ne s’est jamais remis de son divorce et a des pensées suicidaires. Son ex-femme,
Naomi, géophysicienne de renom, vit recluse dans un laboratoire avec sa com- pagne. Patrick, l’aîné, s’est installé au Népal où il est devenu moine bouddhiste. Sa sœur, Winter, avocate qui défend les sans-papiers, en veut à sa mère de leur avoir longtemps caché l’identité de son père génétique. Tous sont hantés par la disparition tragique de Bering, la cadette, militante pacifiste morte à vingt et un ans en Cisjordanie sous les balles d’un soldat israélien.
Comment les Wilcox en sont-ils arrivés là? La fracture entre eux tous est-elle irrémédiable?
À travers ces personnages, c’est l’histoire de l’Amérique contemporaine que déploie Jess Row. Repoussant avec brio les frontières du roman familial, il fait surgir les débats brûlants – l’identité raciale et religieuse, le conflit israélo- palestinien, la crise climatique, l’immigration – au moment où les repères du passé cèdent à la violence d’un présent sans lendemain.
Mon avis:
Le roman s’ouvre sur un poème, qui est en fait un long mail qui n’a jamais été envoyé.
C’est de fait une longue fresque qui nous parle d’une famille américaine, les Wilcox, et de cinq de ses membres en particulier. Une famille juive new-yorkaise totalement éclatée.
Extrêmement interessant il faut quand même dire que le roman n’est pas facile à lire. Il est extrêmement « touffu ». Je n’ai pas pu le lire d’une traite, j’ai avancé lentement ce qui est assez rare. Mais attention ! Aucun doute sur le fait que c’est excellent! Et le moins que l’on puisse dire c’est que l’auteur aborde tous (ou presque) les thèmes de société actuels, les thèmes politiques, le conflit israélo-palestinien , le racisme, les rapports familiaux, le suicide, la religion, la politique, le réchauffement climatique, et bien sûr l’Amérique. J’avoue quand même que j’ai parfois été un peu dérangée par le vocabulaire un peu « cru, violent et sexualisé », parfois un peu perdue dans des explications scientifiques sur les mouvements de la terre (mais je ne suis pas scientifique du tout).
Je vous conseille vivement de vous référer à la liste chronologique de la famille en fin du roman. Ça aide vraiment à ne pas se perdre.
Sandy Wilcox est avocat. Au début du roman il est au bord du suicide et il va quitter New-York pour retourner dans une maison qu’il habitait dans le Vermont avec son ex-épouse Naomi, une géophysicienne , il y a bien des années. Le couple a eu trois enfants : Patrick, Winter et Bering (décédée).
WInter va se marier et elle souhaite réunir tous les membres de sa famille pour l’occasion. Winter qui a été traumatisée en apprenant un secret : son père biologique était noir ! L’identité raciale est abordée du point de vue du ressenti des métisses dans un monde de blanc et de la difficulté de faire avec même si cela ne se voit pas. Le roman parle aussi des problématiques du mariage, de la situation familiale, de l’expulsion des étrangers, et la liste est encore longue…
Dans ce roman tout le monde fuit ( la famille et l’Amérique )… Entre le père et sa « retraite » de trois mois, le fils parti au Népal puis en Allemagne, la benjamine partie se faire tuer en Palestine, et de Winter et de son mari mexicain du Chiapas, la mère qui a quitté son mari pour mener sa vie avec une femme ( ce n’est pas les femmes qu’elle aime mais cette femme en particulier). C’est la famille explosée, éclatée dans toute sa splendeur, dans laquelle on respectes « l’autonomie de l’autre » … Je ne peux pas dire que je me suis attachée aux personnages…
Le livre aborde tellement de sujets qu’il n’est ni facile à lire, ni facile à commenter… Les sujets de réflexion sont multiples et une question fondamentale se pose : L’Amérique est-elle morte ?
Merci à Francis Geffard et la Collection Terres d’Amérique de leur confiance et de m’avoir permis de découvrir ce premier roman traduit de l’auteur.
Extraits:
Le roman est une forme de vie en dehors de la vie. Il sent qu’il est en train de lui céder. Il le tient quand il n’y a rien d’autre à tenir.
D’un autre coté, beaucoup de cultures soit-disant primitives, datant de l’âge de pierre, accordent beaucoup plus d’importance à l’écologie locale, à l’observation des causes et des effets, et aussi, bien sûr , à un sens plus prononcé de la vulnérabilité et de la fragilité .
Un enfant rend le temps circulaire, comme un roman. Il a ses propres implications, pourrait-elle dire. Certaines choses deviennent vives, vibrantes. Le roman exige cela. Il faut plier l’image.
Seule, qu’est-ce que cela pouvait bien dire pour quelqu’un qui se s’est jamais senti autrement que seul?
Quand tu parles espagnol, je ne peux pas m’empêcher de croire que tu te moques discrètement de moi.
– C’est plus fort qu’elle, fait Zeno. Tu es très moquable.
– Moquable n’existe pas en anglais. Ni en espagnol. Tu veux dire un personnage ridicule, une absurdité, un imbécile prétentieux sorti d’une pièce de Molière. Alors que je me vois plutôt comme un prophète méconnu, un Tirésias.