Norek, Olivier « Surtensions » (2016)

Norek, Olivier « Surtensions » (2016)

Auteur : Engagé dans l’humanitaire pendant la guerre en ex-Yougoslavie, puis lieutenant à la section Enquête et Recherche de la police judiciaire du 93 depuis dix-huit ans, Olivier Norek est l’auteur de trois romans largement salués par la critique et traduits dans plusieurs pays, ainsi que le lauréat de nombreux prix littéraires. Après Code 93, Territoires et Surtensions, Il publie « Entre deux mondes » en 2017. « Surface » parait en 2019 

3ème enquête du Capitaine Victor Coste

Prix du Polar européen du Point 2016 au Festival Quai du Polar à Lyon.

Résumé : Cette sœur acceptera-t-elle le marché risqué qu’on lui propose pour faire évader son frère de la prison la plus dangereuse de France ? De quoi ce père sera-t-il capable pour sauver sa famille des quatre prédateurs qui ont fait irruption dans sa maison et qui comptent y rester ? Comment cinq criminels – un pédophile, un assassin, un ancien légionnaire serbe, un kidnappeur et un braqueur – se retrouvent-ils dans une même histoire et pourquoi Coste fonce-t-il dans ce nid de vipères, mettant en danger ceux qui comptent le plus pour lui ?

Des âmes perdues, des meurtres par amour, des flics en anges déchus : la rédemption passe parfois par la vengeance…

Pour cette nouvelle enquête du capitaine Coste, Olivier Norek pousse ses personnages jusqu’à leur point de rupture. Et lorsqu’on menace un membre de son équipe, Coste embrasse ses démons.

Mon avis : Efficace ! L’atterrissage est rude ! Description de l’univers carcéral … pas des tendres (à ce sujet je recommande aussi vivement le livre de Karine Giebel « Meurtres pour rédemption » – une plongée glaçante dans l’univers carcéral féminin – voir article sur le blog). Mais revenons à « Surtensions » ; pas de temps mort ; la BRI en prend – en peu – pour son grade… et les flics sont toujours aussi motivés et soudés dans l’équipe de Coste.

Au début, les quelques premières pages, j’ai eu un peu peur… je n’ai ressenti aucune tendresse, empathie, affinité, compassion, avec les personnages. Et si aucun d’eux ne me touche au cœur, même les victimes – je décroche… Mais Coste s’est fissuré… et tout a démarré, tout s’est déchainé. C’est parti pour l’enquête… du suspense, des flics qui se tirent la bourre, des otages, des braqueurs, des plans A et des plans B, les dérapages… Des enquêtes qui se mènent en parallèle, se recoupent… Au bout de l’amitié, de l’amour, de la haine ! Alors oui, oui et oui ! C’est documenté, flippant, angoissant, rythmé, haletant, et humain aussi ! Du tout bon ! Et on se dit que la famille… c’est parfois une belle source d’emmerdes! Un petit frère… ça fiche bien le bronx dans la vie ! Et les avocats… c’est sacrément retors…

Et des images et des expressions qui font sourire… Au fait… quand un personnage a pour nom Michael Mention, ça vous fait pas penser à quelque chose ?

Extraits :

Sur l’échelle de la douleur supportable, la rage de dents se situe dans les souffrances suicidaires.

– Ça va devenir ton meilleur ami. Finis-le et je t’en apporterai un autre.
– Un livre ? Rétorqua Nano, presque dédaigneux.
– Fais-moi confiance.

L’ignorance force à penser au pire.

– T’es tout seul ici. Et si un jour, tu crois te faire un ami… Méfie-toi de lui.

La seule mission du surveillant étant de rentrer chez lui en un seul morceau, il n’y avait plus qu’à laisser les détenus s’insulter, se battre, faire du commerce, se droguer et baiser entre eux, avec, comme seule limite morale, le suicide et le meurtre.

Tout n’est qu’inégalité et ultra-violence, ça ne sert à rien de réparer les esprits en pleine tempête.

Pas d’antivirus ? Même moi, je sais que c’est pas une bonne idée. C’est comme partir en Thaïlande sans capotes.

Son apparente insensibilité et son vocabulaire cru n’étaient que des protections qui lui permettaient d’oublier leur humanité.

J’ai des images résiduelles, comme quand on conduit toute une nuit sur l’autoroute et que la ligne blanche défile encore alors qu’on est arrivé depuis des heures.

L’ordre avait claqué comme la porte qu’elle referma sans délicatesse, laissant un moment de flottement silencieux dans la pièce.

Rien de plus inutile qu’une journée ensoleillée en banlieue, se dit Johanna. Ça te rappelle simplement que t’as ni la plage ni la montagne pour en profiter, juste des immeubles en béton qui chauffent pour rien.

– Y avait pas une photo de maman à côté de la fenêtre ?
– Si. Elle est dans ma chambre maintenant.
– C’est bien le moment de vous rapprocher.

Quand on est seul, on n’est responsable de rien. Ni du malheur, ni du bonheur.

…. avait consacré toute sa vie à son métier, manquant de temps pour tout, à toutes les occasions, répondant « demain » chaque fois qu’on lui parlait d’aujourd’hui.
Du temps, il en avait maintenant, assez pour s’ennuyer,…

– C’est sentimental. Ça excuse toutes les fautes de goût.

Les politiques ça titube, ça tangue, mais ça ne tombe jamais réellement.

– Tu m’as fait baisser les bras. Tu m’as presque fait abandonner. T’es ma goutte d’eau qui fait déborder le vase. C’est juste une question de timing. Ç’aurait pu être n’importe quel connard, c’est tombé sur toi.

Tu donnes tout à ce boulot et puis un jour, t’es trop vieux pour le faire et comme tu n’as eu de temps pour personne, après, autour de toi, y a personne.

elle croisa son reflet dans la glace et n’y vit qu’une femme fatiguée. Elle se tourna le dos, comme si elle voulait laisser cette image prisonnière du miroir.

Tu sais que mis bout à bout, un utilisateur normal d’ordinateur va passer trois mois de sa vie à regarder une barre de téléchargement avancer.

Ronan se sentit rassuré de constater que Coste n’était pas un flic de cinéma, avec la solution toujours dans la poche, identifiant le coupable avant les autres. Il séchait, comme tout le monde.

C’est un bien beau temps pour une journée de merde.

L’espoir est la pire chose qui peut arriver en prison.

il y avait toujours en elle un rottweiler prêt à mordre.

J’ai cru que j’allais devoir la tazer pour la faire taire.
– Je suis arrivé trop tôt, alors …

Tuer, c’est se tuer un peu. Quelque chose dans son âme s’était déréglé.

Le cerveau brumeux de Nano transformait le trafic automobile en vagues qui s’échouaient sur Paris. D’abord, un souffle lointain, lorsque la voiture approchait, puis une bourrasque lorsqu’elle passait devant et une caresse sur le sable lorsqu’elle se retirait.

j’en suis au même point que toi. Je tâtonne, je gymnastique, j’hypothèse.

Voir aussi les commentaires sur les deux premières enquêtes du capitaine Coste :  Code 93 et Territoires

3 Replies to “Norek, Olivier « Surtensions » (2016)”

  1. Ce troisième opus est à mon sens le meilleur. Les personnages sont de plus en plus attachants et j’espère qu’un quatrième volet est prévu.
    J’ai passé un très bon moment avec Coste et son équipe et je me sens triste de l’avoir terminé

  2. Et sur ma lancée, après Code 93 et Territoires, j’ai poursuivi avec Surtensions et, aucun doute possible, la qualité de la série va crescendo. Ce troisième opus est différent des précédents : beaucoup plus sombre, plus abouti aussi. L’auteur réussit la prouesse de nous offrir un récit habilement structuré et une intrigue de qualité tout en développant encore les personnages.

    Pour moi, un modèle du genre !

  3. Du bon , du très bon!
    Un polar exceptionnel qui porte bien son titre, aussi bien pour le roman que pour le lecteur ! les mêmes qualités de réalisme sans fioritures que dans les précédents , tout sonne vrai, le lieutenant de police Olivier Norek sait de quoi il parle.
    c’est haletant, ça se lit à 100 (pages) à l’heure. L’écriture est brillante, claire et percutante. Plus encore que dans les 2 premiers, je trouve.
    Les personnages sont, comme d’habitude, criants de vérité, policiers comme malfrats. . J’ai trouvé que dans ce 3ème tome il y avait un supplément d’âme comme si ce n’était plus des personnages mais qu’ils soient vraiment devenus nos amis.
    La fin m’a arraché des larmes et j’en veux presque à Oliver Norek d’avoir choisi celle-là

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