King, Stephen «Jessie» (1993)
Auteur: Stephen King a écrit plus de 50 romans, autant de best-sellers, et plus de 200 nouvelles. Couronné de nombreux prix littéraires, il est devenu un mythe vivant de la littérature américaine (médaille de la National Book Foundation en 2003 pour sa contribution aux lettres américaines, Grand Master Award en 2007 pour l’ensemble de son oeuvre). En février 2018, il a reçu un PEN award d’honneur pour service rendu à la littérature et pour son engagement pour la liberté d’expression.
Albin-Michel – 02.04.1993 – 389 pages – (Gerald’s game) Traducteurs : Mimi et isabelle Perrin
Résumé : II ne fallait pas jouer à ce petit jeu, Jessie. Vous voilà enchaînée sur votre lit, le cadavre de Gerald à vos pieds, condamnée à vous enfoncer dans la nuit, la terreur et la folie. Les femmes seules dans le noir sont comme des portes ouvertes… si elles appellent à l’aide, qui sait quelles créatures horribles leur répondront ? Aucun des précédents romans de King ne prépare au huis-clos terrifiant de Jessie, à cette lente exploration de nos phobies et de nos cauchemars les plus sombres. L’histoire de Jessie, sa dernière victime, montre à quel point il ne faut avoir peur que de soi-même.
Avis : Le livre fait partie de ce qu’on appelle sa «trilogie féministe» ( Jessie, Dolores Claiborne et Rose Madder)
Répertorié dans la liste des thrillers psycho-psychiatriques de l’incontournable Séverine… Il ne m’en fallait pas davantage pour que j’aille le chercher dans les non-lus de ma bibliothèque « héritée ». J’ai pas du tout accroché.
J’en ai lu d’autres de cet auteur que j’ai bien aimé. Misery, Dolores Clairborne, la ligne verte, Carrie, Dead Zone, Christine, 22.11.63, La part des ténèbres…
Mais celui-ci…. Au départ, (1/4 du bouquin) c’est mal barré… Elle est attachée sur son lit et elle m’agace, elle m’énerve, elle m’horripile… Je n’ai aucune empathie pour elle. Elle entend une petite voix dans sa tête, une copine de fac Ruth, puis d’autres voix se melent dasn son subconscient . Ok elle est prisonnière sur le lit, elle est surtout prisonnière dans sa tête et dans la vie dans laquelle elle s’est emmurée ! Pendant qu’elle se débat dans sa tête avec ses voix, son mari mort à ses pieds, elle reçoit une petite visite : le chien « ex-Prince » qui zone dans le coin et se revèle aussi paumé qu’elle. En même temps, il faut bien que le huis-clos s’installe… Enfin, après cela démarre… Les multiples personnalités qui se côtoient en Jessie communiquent entre elles et se répondent. Il y a celle qui l’enfonce et celle qui la booste, la plus jeune, la constructive, la négative…
Dans ce livre, Jessie (et ses diverses personnalités) est confrontée ( en cauchemars et en rêve ) – pendant qu’elle essaie de trouver un moyen d’échapper à son triste sort – à trois présences masculines destructrices qui surgissent du passé et du présent: son père, son mari et un horrible personnage fait de laideur et de noirceur dont on ne sait pas vraiment si il est réel ou pas. Comme dans la plupart des livres de cet auteur, on ne sait plus trop démêler le vrai du faux. C’est un roman épouvantable sur la violence que les femmes et les jeunes filles subissent.
J’ai été mal à l’aise du début à la fin et je n’ai malheureusement jamais ressenti d’empathie pour Jessie qui m’a tapé sur le système au lieu de m’amener à m’apitoyer sur son sort… alors qu’il y aurait de quoi la plaindre. Je lui reconnais l’instinct de survie mais je dois dire que j’ai fini par lire le livre en diagonale pour ne pas dire que je l’avais abandonné en cours de route.
( Il y a très très longtemps, j’avais lu un roman de Flora Rheta Schreiber « Sybil », paru en 1973, qui racontait l’ « histoire vraie » de Sybil, aux 16 personnalités, le concept de personnalité multiple, aujourd’hui appelé trouble dissociatif de l’identité, caractérisé par la présence de plusieurs identités ou « états de personnalité » distincts qui prennent tour à tour le contrôle du comportement d’une personne..)
Extraits :
Les chiens remuent la queue quand ils sont contents, mais aussi, comme les chats, lorsqu’ils hésitent et apprécient une situation.
Ça fait des années que tu n’es pas vraiment réveillée. Quand il t’arrive une tuile, tu sais ce que tu fais, Jess ? Tu te dis : « Oh, c’est pas grave, c’est juste un mauvais rêve. J’en fais de temps en temps, mais rien de bien méchant. Je n’ai qu’à me retourner sur le dos, ça passera. » Et c’est ce que tu fais, pauvre gourde, exactement ce que tu fais.
Ton esprit, lui, n’est pas enchaîné à la tête de lit, et on le sait toutes les deux. Tu peux toujours t’enfuir si t’en as envie, mais mon conseil c’est que tu n’en fasses rien, parce que je suis ton seul espoir. Si tu restes là à te dire que c’est juste un mauvais rêve que tu fais parce que t’es couchée sur le côté gauche, tu vas crever. C’est ça que tu veux ? C’est tout ce que ça te rapporte, d’avoir passé ta vie dans des menottes depuis le jour où…
Elle fit pivoter son poignet droit vers l’extérieur aussi loin que possible, puis leva le bras. Dans cette position, elle ressemblait à une femme égyptienne sur un hiéroglyphe.
tu avais l’impression de ne pouvoir confier à personne ce qui s’était passé ce jour-là, pas même à toi.
il y avait un ennemi en elle, une sale garce qui la trouvait très bien comme elle était – menottée, courbatue, assoiffée, effrayée et malheureuse – et ne voulait pas voir cette situation s’améliorer le moins du monde.
il y a une grosse différence entre vivre avec quelque chose et en être prisonnier. Vous ne comprenez donc pas que le culte du soi n’est jamais qu’un culte de plus, espèces de gourdes ?
Sans perdre connaissance, elle basculait par moments dans ce curieux néant réservé à ceux dont la terreur est devenue si intense qu’elle frise l’extase.
Contre vents et marées, Bobonne gardait le cap. Ce n’est pas un film d’horreur, ni un épisode de La Quatrième Dimension, Jessie. C’est la réalité.
les choses prennent un autre aspect quand il fait nuit, surtout si l’on reste seul, insistait-elle. Alors, les serrures de la cage qui emprisonne l’imagination sautent et des choses s’en échappent, toutes sortes de choses.
OK, d’accord. Penser à la mort était une mauvaise idée. Alors, qu’est-ce qui restait ?
La vie,
Ces endorphines te lavent l’esprit, et c’est pour ça que les gens travaillent mieux après avoir fait de l’exercice.
En effet, elle avait l’esprit dégagé. Le plus clair de sa panique s’étant dissipé comme des fumées au-dessus d’une usine par vent fort, elle avait retrouvé non seulement ses facultés rationnelles, mais aussi sa santé mentale, ce qu’elle n’aurait jamais cru possible. Elle trouva légèrement angoissante cette preuve de l’adaptabilité infinie de l’esprit et de son indéracinable détermination à survivre.
Si tu veux survivre à cette expérience, Jess, arrête de ressasser le passé et occupe-toi plutôt de chercher comment tu vas gérer l’avenir…
C’est surréaliste !
En effet. Tout semblait surréaliste, maintenant. Sauf que ce n’était pas le mot juste. Le mot juste, c’était…
« Hyperréaliste », fit-elle pensivement d’une voix basse.