Remin, Nicolas « Gondoles de verre » (2009)

Remin, Nicolas « Gondoles de verre » (2009)

Auteur : Né à Berlin en 1948, Nicolas Remin a fait des études littéraires en Allemagne, puis à Santa Barbara. Grand voyageur, il a vécu en Californie et en Toscane. L’impératrice lève le masque et Les Fiancés de Venise sont les deux premiers tomes d’une série prenant pour décor la Venise du XIXe siècle.
Nicolas Remin étudie la littérature, la philosophie et l’histoire de l’art à l’université libre de Berlin, puis à l’université de Californie à Santa Barbara. Il s’est lancé tardivement dans la carrière littéraire, ne publiant son premier roman qu’à l’âge de 56 ans.

Série Alvise Tron : L’Impératrice lève le masque – Les Fiancés de Venise – Gondoles de verre – Les Masques de Saint-Marc – Requiem sous le Rialto
Les six romans policiers historiques dont il est l’auteur mettent en scène le personnage du commissaire Alvise Tron, héritier d’une vieille famille vénitienne déclinante, reconverti dans la fonction publique, et qui mène des enquêtes criminelles dans la Venise des années 1860, alors sous souveraineté autrichienne. Le commissaire Tron, dans ses investigations, est à la fois aidé et concurrencé par l’impératrice Élisabeth (dite Sissi), épouse de l’empereur François-Joseph, qui séjourne fréquemment dans la « cité des Doges ».

Tome 3 :

10/18 – 3.12.2009 – 376 pages –  Frédéric Weinmann (Traducteur)

Résumé : En 1864, dans le palais de la famille Tron à Venise, les murs autrefois ornés de tableaux du Tintoret continuent de s’effriter et les repas demeurent frugaux. Occupé par le prochain numéro de sa revue l’Emporio della Poesia, le commissaire Alvise Tron prépare aussi ses noces avec la riche princesse de Montalcino. Mais les réjouissances tournent court lorsqu’il apprend la mort mystérieuse du marchand d’art Kostolany. II n’a qu’un seul indice : la disparition de la Sainte Madeleine du Titien, que Marie-Sophie de Bourbon, sœur de l’impératrice Sissi, avait confiée à Kostonaly pour une expertise. Les suspects sont nombreux : le consul général de Russie, le restaurateur de tableaux Terenzio ou encore le colonel Orlov. Tous semblent taire un secret, tous semblent liés au meurtre…

Mon avis : Ce troisième tome de la série est le moins politique. Bien sûr il y a toujours le contexte historique mais il est nettement moins présent. Au centre du roman il y a le monde des marchands d’art, des faussaires, de la restauration des plafonds et des fresques … et toutes las magouilles qui se cachent derrière les ventes des tableaux de maitres. Pas très joli joli…
Notre brave Commissaire va se trouver bien occupé entre son enquête, son futur mariage avec la Princesse , le lancement de la verrerie Tron ( projet de la Comtesse Tron et de la fiancée, la Princesse Montalcini) et comme toujours les fausse pistes sont nombreuses et s’entrecroisent, en laissant sur leur passage un grand nombre de cadavres… Et toujours des personnages secondaires bien campés que je retrouve avec plaisir au fil des enquêtes.
Cette fois ci nous sommes à Venise non pas avec Sissi l’Impératrice mais avec sa sœur cadette, Marie-Sophie de Bourbon, Reine des Deux-Siciles, qui sous couvert d’anonymat, est venue à Venise pour se faire de l’argent en vendant un Titien… un original ? une copie ? Bien malin qui le découvrira… Mais avant de le savoir, il faudra mettre la main dessus, car suite à un meurtre, le tableau est introuvable…
Toujours un moment sympathique en compagnie du Commissaire Tron, de sa mère, de sa fiancée, de ses collègues ( dont Bossi qui est fasciné par les avancées de la technique scientifique pour aider à la résolution des enquêtes – ici il teste l’usage de la photographie) . Je m’attache ! et c’est mon enquete préférée.
Et j’ai fait la connaissance d’un peintre dont j’ignorais totalement l’existence : Bartolomeo Schedoni (ou Schedone en français – ou aussi Le Schidone) (Modène, 1578 – 1615) , peintre italien baroque de Reggio d’Émilie.

Extraits :

L’espace d’un instant, le mouvement dans le ciel lui donna l’impression que les palais de l’autre côté de l’eau se déplaçaient dans sa direction. Il imagina les façades foncer soudain vers lui, engloutir les astres et s’abattre sur sa tête comme le couvercle d’un cercueil.

On ne pouvait imaginer plus grand contraste avec l’atmosphère de vieux grenier qui régnait dans le palais

Tron, où les taches claires sur les tapisseries révélaient que les propriétaires avaient dû se séparer de leurs Tintoret et de leurs Tiepolo. Au palais Balbi-Valier, on nageait dans une vaine abondance. Au palais Tron, on léchait les murs.

Des photographies du lieu du crime constituent un instrument précieux pour la recherche de preuves, déclara-t-il. Il s’agit d’établir des chaînes d’indices. Ces méthodes ont été mises au point par la police parisienne.

Michel-Ange était connu pour emprunter les originaux et rendre des copies. L’idée ne date pas d’hier.

Le marchand d’art ne voulait pas entendre parler d’originaux de deuxième catégorie ; il ne jurait que par les faux de premier ordre que, du point de vue artistique, on pouvait en toute bonne conscience présenter aux clients comme des originaux.

Cet effet découlait bien entendu des vertus de l’art. l’art ennoblissait tout. Ah ! Songea-t-il en soupirant si seulement le commerce de l’art pouvait rendre les hommes nobles, serviables et bons !

Le commissaire s’était battu contre les Autrichiens pour la résurrection de la République de Venise ; Orlov contre Garibaldi pour la survie de la monarchie des Bourbons. Le rêve de Tron s’était effondré sous une pluie de bombes durant l’été 1849, celui d’Orlov était mort sous les feux de l’artillerie piémontaise dans la forteresse de Gaète, le nid d’aigle au bord de la mer où les restes de l’armée des Deux-Siciles avaient trouvé refuge.

 

En outre, il était rare que les entreprises à risque aient la précision d’une montre suisse ; il survenait toujours un contretemps.

En tout cas, songea-t-il, ce spectacle confirmait ce que les artistes savaient depuis toujours : à savoir que la vraie beauté ne réside pas dans les objets, mais dans l’œil du spectateur.

La vérité doit servir les hommes et non les hommes la vérité ?

Elle se raccroche à cette croix pour ne pas se casser la figure. Nous avons tous besoin d’une canne. On prend celle qu’on trouve.
— Vous croyez sa foi… sincère ?

Elle n’était pas repoussante – du moins aux yeux d’un passionné de chevaux. Elle avait de grandes incisives très saines, une bouche lippue et sensuelle ainsi qu’un nez bien formé, évoquant tout juste des naseaux. Aucune de ces caractéristiques – pas même son étonnante chevelure rousse – n’était laide en soi. Mais l’ensemble rappelait immanquablement un cheval.

Chez Titien, le roux symbolise la passion. Il est vrai que les courtisanes des anciens temps se teignaient les cheveux en roux.

Tous les esprits profonds aiment le masque, pensa-t-elle. Ils n’en avaient jamais parlé, mais – silence contre silence – ils se couvraient discrètement.

[…] dans ce conflit, c’est le passé contre le futur, reprit-il. La Sicile signifie l’agriculture, le Piémont l’industrie.

Sous l’effet de la chaleur accablante, les murs semblaient respirer comme des êtres vivants.

 

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