de Rosnay, Tatiana «Le Cœur d’une autre» (2011)

de Rosnay, Tatiana «Le Cœur d’une autre» (2011)

Autrice : Tatiana de Rosnay est née le 28 septembre 1961, à Neuilly-sur-Seine. Son père est français d’origine russe, sa mère, anglaise. Elle se décrit comme étant « franglaise » et a été élevée à Boston et à Paris. Après des études littéraires en Angleterre, à l’Université de East Anglia, Tatiana a travaillé à Paris comme journaliste pour Vanity Fair, Psychologies Magazine, ELLE et le JDD.
Ses romans : L’Appartement témoin – Elle s’appelait Sarah – La Mémoire des murs – Boomerang – Le Voisin – Le Cœur d’une autre – Rose – Spirales – À l’encre russe – Café Lowendal et autres nouvelles – Son carnet rouge – Manderley for ever – Moka – Sentinelle de la Pluie – Tamara par Tatiana – Les Fleurs de l’Ombre – Célestine du Bac

 

Plon – 1998 – 273 pages / Livre de poche – 31.08.2011 – 280 pages

Résumé :

Bruce, un quadragénaire divorcé, un peu ours, un rien misogyne, est sauvé in extremis par une greffe cardiaque. Après l’opération, sa personnalité, son comportement, ses goûts changent de façon surprenante. Il ignore encore que son nouveau coeur est celui d’une femme. Mais quand ce coeur s’emballe avec frénésie devant les tableaux d’un maître de la Renaissance italienne, Bruce veut comprendre. Qui était son donneur ? Quelle avait été sa vie ? Des palais austères de Toscane aux sommets laiteux des Grisons, Bruce mène l’enquête.
Lorsqu’il découvrira la vérité, il ne sera plus jamais le même…

 

Mon avis :

 

C’est le deuxième livre de cette autrice que je lis et je suis à nouveau tombée sous le charme de son écriture fluide et délicate.

Quand de droitier on devient gaucher, qu’on s’intéresse à la mode alors qu’avant on ne portait que des vieilles fringues, aux tâches ménagères alors qu’on vivait dans le désordre, qu’on a envie de faire les boutiques, que les goûts culinaires se transforment, que le comportement vis-à-vis des femmes change, que d’un coup on s’intéresse à la peinture et plus particulièrement aux peintres du Quattocento (et plus particulièrement à Paolo Ucello) … c’est que quelque chose s’est passé dans votre vie ! Est-ce qu’une transplantation cardiaque peut vous changer ce point ?
Petit à petit Bruce se dit que ce qu’il ressent ne vient pas de lui et se met en tête de découvrir l’identité de son donneur… ce qui va l’entrainer dans des aventures invraisemblables. Il va mener l’enquête, partir  la découverte de ce « cœur » qui lui a été donné…
Un voyage étonnant et magnifique, des rencontres, la découverte de sentiments qui jusqu’à présent lui avaient été inconnus.
Je ne vous en dis pas davantage et vous laisse partir à l’aventure, explorer, revivre, ressentir… Un très joli voyage en perspective.
Et une raison de plus de plébisciter le don d’organes. J’avais déjà lu un magnifique livre qui en parlait,    « Réparer les vivants » de Maylis de Kérangal (2014)

Extraits :

« On dirait que mon cœur et mon esprit n’appartiennent pas au même individu. »
Jean-Jacques Rousseau, Les Confessions.

Je le suivais à la trace tel un poisson pilote dans le sillage d’un grand requin blanc, et je jouissais de son amitié et de sa protection comme d’un privilège.

Je n’y croyais plus. Je n’en pouvais plus. La mort m’envahissait petit à petit comme la marée montante. Désormais, rien ne pouvait l’entraver. Quand enfin le sommeil m’emportait, il me semblait que les battements de mon cœur se faisaient de plus en plus lents, comme les coups d’une horloge qu’on a oublié de remonter.

Le professeur m’avait appris que le don d’organe était un acte anonyme et que l’identité du donneur resterait protégée, de même que la famille qui avait autorisé le prélèvement n’apprendrait pas à qui avait profité ce don.

— J’ai divorcé d’un alcoolique fumeur, égoïste, rabat-joie, mal habillé, vivant dans un taudis… bégaya-t-elle, hilare. Et je me retrouve à boire le thé dans un salon qui sent le Pliz, chez un type branché, souriant, impeccable, qui s’intéresse à mon travail pour la première fois de sa vie ! C’est trop drôle !

J’avais peu écrit, ces dernières années. Lorsqu’on passe ses journées devant un ordinateur, un stylo devient un objet suranné.

Comme on déchiffre du bout des doigts une page en braille, mon regard devint tactile, à l’affut du moindre détail

Vous avez envie de porter du rouge, de manger autre chose, de parler, de jouir de votre nouvelle liberté. Bravo ! Mais ces sensations n’ont rien à voir avec la personnalité de votre donneur, croyez-moi. Vous avez reçu son cœur. Cet organe est à présent le vôtre. Un cœur n’a pas de mémoire.

J’étais un corps muni du cœur d’une autre. Et j’attendais que cet être sans corps vînt s’insinuer dans son cœur.

Où étaient passés le temps, les aiguilles de la montre mortes d’ennui sur le cadran, le sable figé dans le sablier, le soir qui tardait à tomber, le jour qui refusait de se lever, le mois prochain qui paraissait encore lointain ?

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