McDowell, Michael « Serie Blackwater : La digue » Tome 2 (2022)

McDowell, Michael « Serie Blackwater : La digue » Tome 2 (2022)

Auteur : Michael McDowell (de son nom de naissance Michael McEachern McDowell) est un écrivain et scénariste américain, né le 1er juin 1950 et décédé le 27 décembre 1999 à Boston, Massachusetts. Co-créateur des mythiques Beetlejuice et L’Etrange Noël de Monsieur Jack, et auteur d’une trentaine de livres, réussit avec Blackwater à bâtir une saga en six romans aussi addictive qu’une série Netflix, baignée d’une atmosphère unique et fascinante digne de Stephen King.

L’éditeur français, Monsieur Toussaint-Louverture, a d’abord pensé sortir un volume de 1200 pages, mais il s’est finalement dit qu’il allait coller à la stratégie d’origine et sortir en 6 volumes.

(Série en 6 tomes)  1983 / 2022

– Blackwater I. « La crue » (The Flood)  : 7 avril (260 pages)
– Blackwater II : « La digue » (The Levee)  : 22 avril (244 pages)
– Blackwater III : « La maison »(The House)    : 5 mai (240 pages)
– Blackwater IV : « La guerre » (The War) : 19 mai (255 pages)
– Blackwater V : « La fortune » (The Fortune) : 3 juin (255 pages)
– Blackwater VI : « Pluie » (Rain) 17 juin (255 pages)

Voir la page sur le site de l’éditeur : Blackwater – Monsieur Toussaint Louverture

Editeur : Monsieur Toussaint Louverture – Poche – 22.04.2022 – 244 pages ( traduit par Yoko Lacour et Hélène Charrier) Prix Babelio 2022 catégorie littérature étrangère

Tome 2 : « La Digue » – L’épique saga de la famille Caskey

Résumé : Tandis que la ville se remet à peine d’une crue dévastatrice, le chantier d’une digue censée la protéger charrie son lot de conséquences : main d’œuvre incontrôlable, courants capricieux, disparitions inquiétantes. Pendant ce temps, dans le clan Caskey, Mary-Love, la matriarche, voit ses machinations se heurter à celles d’Elinor, son étrange belle-fille, mais la lutte ne fait que commencer. Manigances, alliances contre nature, sacrifices, tout est permis.
A Perdido, les mutations seront profondes, et les conséquences, irréversibles.

 

Mon avis :

« Dans l’épique saga de la famille Caskey,
les rivières suivent leur cours… »

Et ce deuxième tome en est l’illustration …
Mary-Love est toujours aussi jalouse et en quête de pouvoir absolu : après avoir « perdu » son fils Oscar qui part s‘installer dans la maison voisine avec Elinor en laissant sa fille derrière elle, elle vit dans l’angoisse qu’Elinor vienne rechercher la petite. Elle n’envisagera de reprendre la lutte contre Elinor pour l’écraser et l’humilier que lorsqu’elle sera certaine que la petite Miriam restera sous sa garde et celle de sa fille Sister. Toujours aussi désagréable, elle fera tout pour séparer Grace de sa petite copine de jeux qui est noire. Dans ce tome Mary-Love va perdre de son assurance et de sa mainmise sur sa famille. Lentement mais sûrement sa fille Sister va s’affirmer, en analysant le comportement de sa mère et en lui coupant l’herbe sous les pieds. Elinor va occuper le terrain en ayant l’air de ne pas y toucher et étendre son emprise.
Les hommes ont toujours le rôle de faibles… Early Haskew, l’ingénieur engagé pour construire la digue a du mal à ne pas s’engluer dans les filets de Mary-Love, qui va tout faire pour l’avoir sous son toit, juste pour ennuyer Elinor. Il va se faire une alliée en la personne de Sister.

Elinor va accoucher d’une deuxième petite fille, Frances, qui elle aussi a un rapport spécial avec la rivière. On le remarque dès la nuit suivant sa naissance, quand sa mère la baptisera dans la rivière.
Sister va aussi avoir recours à la magie, au monde de la superstition et des envoûtements.
Dans ce volume on assiste à l’édification de la digue, à la transformation de la ville et du paysage, à l’arrivée des travailleurs et tous les désagréments que cela va engendrer (insécurité, alcoolisme, prostitution…). La sœur de la femme décédée de James arrive à Perdido avec ses enfants.
Quand des problèmes surgissent lors de la construction de la dernière digue, celle que concerne la rivière Perdido et passe devant la maison d’Elinor et Oscar, la superstition s’en mêle et fait fuir les ouvriers. La place de la maison va aussi s’imposer. On se rend compte que la maison d’Elinor est « habitée » pour ne pas dire légèrement hantée.
On parle bois, déforestation, racisme et la saga est de plus en plus addictive !
Et comme je suis persuadée que la maison va devenir un personnage à part entière et que le tome 3 a pour titre « La maison » … je suis très intriguée…
J’espère qu’il bougera un peu plus que le tome 2 qui est à mon avis un tantinet plat-plat …

Extraits :

Il n’était pas inhabituel d’en avoir dans ce coin de l’Alabama, mais il ne surgissait que la nuit et rares en étaient les témoins. Plus épais et sombre que d’ordinaire, celui-ci monta de la rivière comme un prédateur transperce la nuit après un long sommeil diurne, impatient de satisfaire sa faim. Il s’enroula autour des trois maisons, les enveloppant d’un voile stagnant, épais et silencieux. Ce qui avait été sombre quelques instants plus tôt, devint obscur. Il avait été si discret et délicat que son arrivée n’avait tiré personne du sommeil. L’humidité de la rivière infiltra les demeures et nimba les dormeurs d’une moiteur asphyxiante. Même les ronflements d’Early furent étouffés. Aucun des Caskey ne se réveilla, et s’ils luttèrent contre lui, ils ne le firent qu’en rêve – des rêves où l’oppressante brume était dotée de jambes et de bras visqueux et d’une bouche qui n’exhalait rien d’autre que vapeur et ténèbres.
Zaddie était la seule à savoir. Elle rêva du brouillard, dont les doigts moites tirèrent les draps qui la couvraient, si bien que son corps se refroidit.

Le principal défaut d’Ivey – du moins aux yeux de Mary-Love – était une forme larvaire de superstition qui lui faisait voir des démons dans chaque arbre, des augures dans chaque nuage et des significations néfastes dans chaque incident du quotidien. Ivey Sapp dormait avec des grigris, et des choses pendaient à une chaîne autour de son cou. Elle ne commençait jamais la récolte de canne à sucre un vendredi et s’enfuyait en courant de la maison si on y ouvrait un parapluie, refusant d’y remettre les pieds de toute la journée. Elle ne sortait jamais les cendres après quinze heures, au risque qu’un décès survienne dans la famille. Elle ne passait pas le balai la nuit de crainte de balayer la chance par la porte. Elle ne faisait aucune lessive le jour du Nouvel An, car alors il lui faudrait nettoyer un cadavre dans l’année.

Quand les digues seront finies – si elles le sont un jour –, ce sera comme vivre dans une carrière. Les digues s’usent avec le temps, elles se font emporter. Elles se fissurent et s’éventrent. Il n’y a rien qui puisse arrêter une rivière qui coule vers la mer, et rien n’empêchera jamais l’eau de monter et de se déverser par-dessus un tas d’argile.

Aux yeux de Mary-Love, commettre une action sans chercher à susciter de réaction dénotait une forme de perversité. Ça lui coupait le souffle.

Ils débarquaient d’on ne sait où, surgissaient sans crier gare de la forêt ou arrivaient en ville à l’arrière d’une charrette, à moins qu’ils n’aient simplement fait la route à pied depuis Atmore. Ils se faisaient appeler par un surnom et le passé de chacun semblait n’être que zones d’ombre.

j’avais un cours sur les civilisations anciennes, et chaque fois qu’elles commençaient la construction de quelque chose de très grand, par exemple un temple, un aqueduc ou un palais, ces sociétés lui offraient quelqu’un en sacrifice qu’elles enterraient sous la première pierre. La victime encore en vie, on lui arrachait les bras et les jambes, et on empilait les morceaux, qu’on recouvrait ensuite de pierres, de briques, ou de quoi que ce soit dont on se servait pour bâtir le monument. Ces civilisations croyaient que le sang aidait à solidifier le mortier. En tout cas, c’était leur façon d’honorer les dieux.

Elinor n’obligea jamais Frances à nager dans la Perdido, et l’enfant ne lui avoua jamais que ce n’était pas la peur qui l’en empêchait, mais l’étrange familiarité qu’elle éprouvait vis-à-vis de la rivière. Ne comprenant pas ce sentiment, elle craignait de le sonder.

Avant je haïssais la digue, mais par un jour comme celui-ci, j’ai l’impression de me rappeler à quoi ressemblait ce lieu avant l’existence de Perdido, des scieries, des ponts et des voitures.
— Tu te rapelles, maman ? »
Elinor se mit à rire, comme tirée de ses rêveries.
« Non ma chérie, j’imagine, c’est tout… »

Aucune maison est jamais vide. Y a toujours que’que chose qui s’installe. Faut juste faire attention que c’est bien des gens qui l’font en premier.

Les maisons surélevées, comme l’étaient celles des Caskey, tremblent toutes un peu sous les pas et les mouvements des résidents. Les verres tintent entre eux dans les vaisseliers de la salle à manger. Les portes glissent sur leurs gonds. Frances en avait conscience, néanmoins il lui semblait que la penderie était l’endroit où toutes ces vibrations trouvaient un écho ; elle tressaillait au moindre pas et conservait précieusement chaque bruit. Et lorsqu’elle pensait que personne ne prêtait attention, elle produisait elle-même les bruits, les vibrations et les tremblements.

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