McDowell, Michael « Les aiguilles d’or » (1980 / RL2023) 520 pages
Auteur : Michael McDowell (de son nom de naissance Michael McEachern McDowell) est un écrivain et scénariste américain, né le 1er juin 1950 et décédé le 27 décembre 1999 à Boston, Massachusetts. Co-créateur des mythiques Beetlejuice et L’Etrange Noël de Monsieur Jack, et auteur d’une trentaine de livres, réussit avec Blackwater à bâtir une saga en six romans aussi addictive qu’une série Netflix, baignée d’une atmosphère unique et fascinante digne de Stephen King. L’éditeur français, Monsieur Toussaint-Louverture, a d’abord pensé sortir un volume de 1200 pages, mais il s’est finalement dit qu’il allait coller à la stratégie d’origine et sortir en 6 volumes.
(Série Blackwater en 6 tomes) 1983 / 2022 – Blackwater I. « La crue » (The Flood) : 7 avril (260 pages)
– Blackwater II : « La digue » (The Levee) : 22 avril (244 pages) – Blackwater III : « La maison »(The House) : 5 mai (240 pages) – Blackwater IV : « La guerre » (The War) : 19 mai (255 pages)
– Blackwater V : « La fortune » (The Fortune) : 3 juin (255 pages)– Blackwater VI :« Pluie » (Rain) 17 juin (255 pages)
Voir la page sur le site de l’éditeur : Blackwater – Monsieur Toussaint Louverture
Romans : « Les aiguilles d’or » (1980/2023) – Calliope (McDowell, Michael & King, Tabitha) – Katie (1982/ 2024 )
Editeur : Monsieur Toussaint Louverture – Poche – 06.10.2023 – 520 pages ( Gilded Needles – 1980 – traduit par Jean Szlamowich)
Résumé:
Dans le New York de la fin du XIXe siècle coexistent deux mondes que tout oppose mais à peine séparés d’un coup de pistolet. D’un côté, l’opulence et le faste, les draperies soyeuses, les bijoux sertis et les sels parfumés. De l’autre, l’alcool frelaté et les jeux truqués, le vice monnayé, l’air saturé d’opium et la nudité corrompue.
C’est à la frontière indistincte entre les deux, au cœur de l’infâme Triangle Noir et ses quelques kilomètres carrés de vices, qu’une famille fortunée va machiavéliquement chercher à asseoir sa notoriété en faisant mine de débarrasser la ville de sa corruption.
Les Stallworth, dirigés d’une main de fer par leur patriarche, James Stallworth, influent et cruel juge, assisté de son fils Edward, pasteur presbytérien aux sermons incendiaires, et de son gendre Duncan Phair, jeune avocat à la carrière prometteuse, ont un plan implacable : déraciner le mal en éradiquant purement et simplement une lignée corrompue de criminelles, les Shanks.
Avec la complicité d’une presse prête à tout pour vendre du papier, d’une justice partiale et expéditive et de la peur viscérale qu’inspirent les déclassés, une machinerie infernale va se mettre en branle et n’aura de cesse que lorsqu’elle aura réduit sa cible en poussière. Seulement attention, à New York en 1882, la mort rôde quel que soit le quartier, toujours prête à frapper.
À mi-chemin entre un roman social et un roman à sensation, avec une touche de Dickens et un soupçon de Sweeney Todd, Les Aiguilles d’or brille par sa compréhension de la nature humaine et frappe par son écriture puissamment cinématographique. Le récit de cette lutte des classes, des pouvoirs et des sexes, tissé avec une précision aussi historique que diabolique, fait naître un plaisir presque coupable grâce à un savoureux mélange de justesse, d’authenticité et de démesure.
Mon avis:
J’avais lu au début de l’année la BD de Munuera, José-Luis « Un chant de Noël – Une histoire de fantômes » (adaptation de Charles Dickens) et j’ai retrouvé l’ambiance. Certes ce n’est pas un conte de Noël mais on y retrouve aussi une atmosphère du Londres du XIXème (même si l’action se déroule à New York. Les quartiers de misère, ce sont partout les mêmes.
Nous allons cohabiter le temps du roman avec deux familles Les Shanks et les Stallworth.
Et pour nous y retrouver au milieu des deux familles, il y a une liste au début du roman, ce qui est fort appréciable.
Dans l’entourage des Shanks, il y a la prêteuse sur gages, l’avorteuse consciencieuse, les maisons closes, les prostituées, les voleuses; Léna, la cheffe du Clan est décrite comme « un ange noir, et sa famille était composée de démons vengeurs. » et il y a surtout un passé, une haine tenace, un besoin de vengeance et de réparation…
Les Stalleorth, c’est un autre monde. Un monde de riches, de notables, qui respecte les traditions. D’ailleurs tout commence en l’an de l’an de grâce 1882, jour de visites pour présenter ses respects pour la nouvelle année. Il y a le patriarche qui est un Juge implacable, son fils le pasteur ,son gendre Duncan Phair, et au milieu de ce beau monde, il y a le petit- fils, Benjamin, qui va dans des endroits peu fréquentables et qui cumule les dettes de jeu!
La seule qui seule détonne dans la famille, c’est la fille du Pasteur, la jeune Helen (soeur de Benjamin) qui s’intéresse aux pauvres et nécessiteux et souhaite leur venir en aide.
Pour en revenir au chef de clan, le Juge, il est tout simplement exécrable : il pense que la plèbe est bête et violente, incapable de réfléchir et de planifier des actions intelligentes et souhaite tout simplement l’éradiquer…
Les deux clans vont se retrouver dressés l’un contre l’autre quand les «bienpensants » emmenés par la famille Stalleorth vont décider d’assainir le « Triangle noir » un espace de New-York concentrant tous les vices et incivilités. Les Républicains décident de nettoyer New-York suite à l’assassinat de leurs, l’avocat Cyrus Butterfield , un homme respecté et talentueux… (mais qu’allait-il donc faire dans ce quartier ?). Pour surveiller le nettoyage du quartier, un groupe de trois hommes va être constitué – Simeon Lightner (journaliste à « la Tribune » ) , Duncan Phair (avocat et gendre du Juge) et Benjamin Stallworth (Petit-fils du Juge qui connait bien le triangle en question) – ; leur mission sera de raconter dans la presse ce qu’il se passe et de jeter l’opprobre sur le parti adverse, les Démocrates.
Voilà… je vous abandonne dans le NewYork des années 1880 … C’est un voyage dans le temps qui vous fera grincer des dents, vibrer, avoir envie de trucider la moitié des personnages , de comprendre les autres … Emotions garanties et personnages extrêmement bien campés dans un New York qui est extrêmement bien dépeint historiquement.
Extraits:
« J’ai connu tellement de déceptions dans ma vie, dit-il, que je ne serais pas étonné de voir cette coutume effectivement disparaître. Cela n’en ferait qu’une de plus. Il y a vingt ans, ce salon aurait été encore rempli d’invités à cette heure. Même il y a dix ans.
En tant que clan, les Stallworth gardaient leurs vrais visages tournés loin du monde.
Jugements et emprisonnements, même s’ils en avaient assurément entendu parler, leur semblaient des afflictions aussi arbitraires que la maladie et la mort. Il fallait être chanceux et travailleur pour survivre à ces vicissitudes. La vertu n’y avait aucune place.
D’abord, concentrez-vous sur le Triangle Noir, noircissez le tableau. Puis trouvez une famille, un de ces clans qui se vautrent dans le péché, et jetez-le dans le fleuve. Et là, maintenez-leur la tête sous l’eau jusqu’à ce qu’ils se noient !
À cette échelle, en matière de vol, les femmes s’en sortaient mieux que les hommes. Elles excellaient au vol à l’étalage, au vol à la tire et à de petites arnaques grâce à la légèreté de leur toucher et à la délicatesse de leur adresse, et parce que les victimes potentielles étaient moins promptes à les suspecter. C’étaient les hommes qui réussissaient à braquer des banques, à dérober d’énormes fortunes en titres négociables, à mettre en œuvre de fabuleuses escroqueries, à dépouiller des demeures entières. Mais c’étaient aussi eux qui se faisaient prendre le plus souvent, parce qu’après avoir réussi un gros coup bien profitable, ils se montraient imprudents et dépensiers, s’enivraient et se vantaient de leurs exploits auprès de leurs bons – mais pas toujours fiables – amis. Ils étaient fréquemment trahis par des informateurs. Les femmes, plus fermées, plus enclines à cacher leurs gains et à rester muettes concernant l’état de leur fortune, affichaient le même comportement dans l’adversité que dans la prospérité.
C’est alors seulement que les aiguilles du chagrin commencèrent à le piquer aux extrémités, tandis que la grande flèche du choc était encore logée dans son sein. Mais rapidement, l’inconfort de ces aiguilles et de cette flèche fut englouti dans la compréhension de ce que signifiait la mort de son enfant.
Ce n’était plus une question de pardon, plus une question de savoir qui avait raison.