Beuglet, Nicolas «L’Archipel des oubliés» (RL2022) 400 pages – Série Grace Campbell – tome 3

Beuglet, Nicolas «L’Archipel des oubliés» (RL2022) 400 pages – Série Grace Campbell – tome 3

Auteur : Après quinze années passées chez M6, Nicolas Beuglet a choisi de se consacrer à l’écriture de scénarios et de romans.1er roman paru sous le nom de  Nicolas Sker : «Le premier crâne» (2011). En 2016 il publie « Le cri » et en 2018 « Complot » et  une nouvelle dans le recueil « Phobia »  (J’ai Lu 14/03/2018) . « L’île du diable » paraît en 2019. Une nouvelle «Ça n’arrivera pas» parait en 2020 sur le thème de la pandémie. En 2020 il crée la série Grace Campbell  « Le dernier message » (2020), suivi de «Le passager sans visage» (2021), de «L’Archipel des oubliés» (2022)

Editeur XO – 22.09.2022 – 400 pages / Pocket – 07.09.2023 – 400 pages

Série : Grace Campbell – tome 3

Résumé :

Cette histoire vous fera douter de tout…
Les inspectrices Grace Campbell et Sarah Geringën le savent. Malgré leurs caractères opposés, elles doivent unir leurs forces pour neutraliser l’« homme sans visage », l’architecte du plan diabolique qui mènera l’humanité à sa perte.
Seule piste : un manoir égaré dans les brumes d’Écosse. Derrière les volets clos de la demeure, l’ombre d’une jeune veuve austère, en apparence innocente. Mais cette femme est-elle vraiment ce qu’elle prétend être ? Ce que les deux inspectrices découvrent dépasse leurs pires hypothèses.
Dans une course qui les entraîne du loch Ness à la Norvège, Grace et Sarah vont devoir repousser les frontières de la peur pour rejoindre l’énigmatique archipel des Oubliés – l’ultime rempart au chaos du monde.
Un thriller glaçant. Et perturbant. Car ce qui se joue sur ces terres mystérieuses pourrait bien ressembler au choix de civilisation qui se dresse devant nous.
… même de vous…

Mon avis:

Vous vous souvenez de Sarah Geringën? Mais oui si vous avez lu l’autre trilogie de l’auteur ! Quelle super idée de les faire enquêter ensemble ! Les deux opposées : Grace est douce, humaine et pleine d’empathie et Sarah est un cheval fou… que je ne pensais pas retrouver après avoir tourné la dernière page de « L’île du diable ».
En premier lieu, je tiens à vous rappeler qu’il serait dommage de ne pas avoir lu les deux tomes précédents avant de lire le tome trois : même si c’est une intrigue à part entière, il y aurait de sacrés trous dans le déroulement de l’affrontement entre Grace et celui qui se prend pour le Dieu de l’Olympe…
Une double traque menée tambour battant ! Les deux enquêtrices à la poursuite du « Passager » et le « Passager » à la poursuite des deux enquêtrices…
Et l’atmosphère du nord de l’Ecosse met une pression supplémentaire… J’ai eu la chance de passer par le Loch Ness, l’Ile de Skye, Uig et je peux vous certifier que ce sont les lieux rêvés pour faire naitre des frissons dans le dos …
Et en plus de l’intrigue policière, des personnages énigmatiques et angoissants, il y a toute la partie intellectuelle, la description de l’évolution du monde, de la manipulation des personnes, de la prise de pouvoir par le contrôle des cerveaux et des âmes, l’endoctrinement, la manipulation, la prise de contrôle des individus par la toute-puissance des machines, l’annihilation de la pensée propre, de l’imaginaire …
Et même s’il s’agit d’un roman, l’auteur pose de vraies questions et se fonde sur des études et des documents dont il donne la liste en fin d’ouvrage…
Une lecture à la fois addictive du point de vue suspense et action, des personnages attachants, un contexte interessant, des prises de position sur l’avenir de notre monde… Un livre , non une trilogie, (et même deux ) que je recommande vivement.

Une fois encore le choix des prénoms n’est pas anodin; dans « Le dernier message » j’avais déjà relevé le choix des prénoms du binôme Grace et Naïs (voir mon commentaire sur le livre) et l’auteur a une fois encore choisi les prénoms en fonction des caractères des deux enquêtrices : Eleonore vient du grec eleos qui signifie compassion et ce prénom caractérise une personne déterminée et qui sait ce qu’elle veut dans la vie. Les Clara, nées pour diriger, se distinguent par leur sens de l’initiative, de l’observation et de la communication( là je suis un peu moins sûre). De nature complexe, elles dégagent une certaine appréhension de la vie en raison de leurs questions existentielles. 

Extraits:

 Après avoir contribué à faire baisser le QI des populations pour mieux les asservir, le Passager achève la deuxième phase de son programme : faire de la peur généralisée une arme de contrôle des masses. Quelle sera la troisième ? Et, surtout, à quoi devrait ressembler cette nouvelle civilisation imaginée par Olympe ?

La peur de soi, c’est bien la pire de toutes

La folie est la seule chose qui me terrifie, poursuivit Sarah. Soit lorsqu’elle sert à justifier l’internement de quelqu’un alors qu’il est simplement triste, soit lorsqu’elle est bien réelle et que la regarder en face nous confronte à l’inconcevable.

Selon la communauté médicale, cette propension à vouloir aider les autres malgré eux, et souvent en les mettant en danger, est typique des individus souffrant d’un délire de persécution.

Olympe souhaitait uniquement contrôler les populations pour leur faire accepter malgré elles un nouveau modèle de société. Un système basé sur moins d’humain et plus de technologie. Un système axé sur la digitalisation des rapports sociaux, la numérisation des identités, la dématérialisation de la vie et, finalement, un accroissement encore plus prononcé des inégalités. Parce que, évidemment, cette transition techno-centrée ne pouvait se faire que grâce à la puissance de production et d’innovation des grandes entreprises, donc en passant par la privatisation du bien commun : l’hôpital, les transports, l’eau, l’énergie, l’école, l’armée.

Nous avons tous compris que la connaissance se trouvait non pas sur Internet, qui certes peut être un outil intéressant d’amorce, mais qui ne sera jamais un lieu de savoir. Notamment parce que ce n’est pas vous qui choisissez ce que vous allez lire, mais un algorithme qui vous oriente vers ce qui a été jugé acceptable ou rentable par l’entreprise détenant le moteur de recherche que vous utilisez. Et quand bien même vous tomberiez sur une lecture qui échappe à ces filtres, elle sera toujours tronquée, ou le résultat d’une copie de copie de copie d’un extrait d’une seule source dont plus personne ne sait trouver l’origine. Alors que dans une bibliothèque, vous êtes maître du choix de l’ouvrage que vous allez lire. Et surtout, les livres sont les seuls qui prennent le temps de l’explication, de l’approfondissement, de la confrontation des sources, de la mise en perspective et, le plus important, de la nuance. Ici, contrairement à la lecture sur Internet, on a tout loisir de laisser infuser la réflexion. De relire posément les penseurs qui nous ont précédés. Tous ceux qui ont déjà longuement songé aux pièges dans lesquels l’être humain risquait de tomber.

Je lui ai redit que le progrès n’était pas bon en soi. Que chaque invention, si séduisante soit-elle intellectuellement, devait être évaluée sous deux critères : apporte-t-elle plus de liberté et de lien entre les hommes ou crée-t-elle plus de surveillance et plus de distance entre les êtres ? Notre modèle proposait bien sûr un monde où l’individu s’éloigne tant de ses congénères qu’il devient aliéné par la machine. Donc une machine lui-même qui oublie son âme et accepte toutes les abominations.

Abêtir, terroriser, récompenser. Ce sont les étapes de la torture mentale qui conduisent à l’acceptation de tout ce qui vient de votre « sauveur ».

notre âme se flétrira, nous perdrons notre créativité, nos envies, et nous deviendrons, sans même nous en rendre compte, de simples consommateurs, puis des machines consentantes.

« On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure. »

En réactivant l’imagination, on relance la curiosité, donc la connaissance, la réflexion, tout le dispositif intellectuel qui fait la liberté de l’homme.

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